Et nous, comment aurions-nous réagi aux événements ? Aurions-nous écouté les ordres de nos supérieurs ? Aurions-nous eu ce qu'il fallait en nous pour gérer, en tant que chef de guerre, ces hommes à la mort ? Autant de questions que l'on se pose face à l'analyse de ces images d'archive.


Comme son nom l'indique assez bien, la série découpe la Seconde Guerre mondiale en 10 grandes dates, 10 "batailles", les reliant les unes aux autres de manière rapide. Se voulant moderne, malgré son générique d'un autre âge, Les grandes dates de la Seconde Guerre mondiale en couleur délivre le récit attendu, raconté par Derek Jacobi en voix off, et par toute une panopée de professeurs d'histoire de différentes universités ou des spécialistes des événements en question, face caméra.


La modernité du show vient en partie de ces experts, nombreux (très peu de femmes), provenant de différentes parties du monde, et surtout relativement jeunes : deux ont même l'air d'avoir la trentaine, voire la vingtaine. Ces derniers, comme tous les autres, ont pourtant plus que l'air de maîtriser leur sujet. Ils analysent, interprètent telles mauvaises décisions, tel coup du sort, telle erreur, et nous font vivre cette aventure comme un passionnant cours d'histoire. Cette volonté de donner la parole à d'autres hommes que des "vieillards" vient sans doute du fait que cette guerre commence à dater, et que les survivants se comptent sur les doigts d'une main.


Nous aurons la chance d'écouter la version des faits de certains vétérans, dont un décédé pendant le tournage, et c'est là que viendra poindre l'émotion, que l'on perd totalement lorsque l'Histoire est racontée par des spécialistes détachés des événements (si l'on devait reprocher quelque chose à la série). C'est toujours touchant de voir à quels points ces hommes, même 70 ou 80 ans après les faits, ont du mal à dire ce qu'ils ont vécu, sans que la voix ne tremble, que les yeux s'embuent, comme s'ils revivaient inlassablement l'horreur.


Les grandes dates de la Seconde Guerre mondiale en couleur se montre ainsi peut-être plus analytique et moins émotive que des séries comme The world at war, qui en 26 épisodes était plus factuelle et prenait le temps de donner la parole à ces héros, ou encore Apocalypse: La 2ème guerre mondiale. Mais, contrairement à ces dernières, cette nouvelles série Netflix semble moins reposer sur la logique des cartes présentées au public pour expliquer les enjeux stratégiques, gagnant en vivacité. La parole de ces universitaires, la musique prenante, rythmée, qui n'en rajoute jamais, et la beauté du travail effectué pour remastériser ces images, et délivrer cette restitution colorée, rendent encore plus vivant ce rappel des faits.


Ce n'est jamais facile de regarder un film ou une série sur la seconde guerre mondiale, étant donné les atrocités vécues. Cependant, de par son côté plus analytique, le show met en avant quelque chose de fascinant : on comprend à quel point les événements auraient pu être autre. De là à dire que les Nazis auraient pu gagner la guerre, je n'irai peut-être pas jusque là, mais quand on prend conscience des erreurs stratégiques commises par les deux camps, on reste en questionnement.


Ce qu'on retient généralement de ce conflit majeur est ce qu'on en a appris à l'école : comment Hitler est arrivé au pouvoir, comment il a dominé l'Europe, comment s'est lentement dessinée la politique d'extermination des juifs. Mais lorsqu'on plonge un peu plus en détails dans l'Histoire, on apprend comment telles batailles auraient pu être gagnées si elles n'avaient pas été gérées par tels généraux, comment tels mouvements de troupes à tel endroit à tel moment étaient une erreur stupide et coûta la vie d'innombrables hommes, pourquoi tel renseignement communiqué par les services d'intelligence aurait dû être écouté pour éviter un nouveau massacre, etc.


La guerre se dessine ainsi pour ce qu'elle est : une succession d'essais-erreurs commises par des hommes plus ou moins aguerris ou prêts pour ce genre de responsabilités, plus ou moins conscients (ou de trop) du poids incommensurable de chaque décision prise. Avec des millions de morts à la clé.


On en vient alors à se demander : et nous, quel général aurions-nous fait ? Quel soldat aurions-nous été ? Aurions-nous montré autant de courage qu'eux ? C'est quoi, être courageux, en tant de guerre ?

Cambroa
8
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le 24 déc. 2020

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