Ils étaient dix
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Ils étaient dix

Série M6 (2020)

Je n'ai jamais lu le livre d'Agatha Christie, mais il paraît évident que c'est très différent. Je ne vais donc pas ici m'appesantir sur la comparaison avec le livre. Les deux premiers épisodes ont su éveiller mon intérêt, même si j'ai commencé à avoir des soupçons sur un personnage. Soupçons confortés dès les premières minutes de l'épisode 3 et quasiment totalement confirmés à la fin du même épisode. Du coup ça m'a un peu sorti du truc. Finalement les épisodes suivants se laissent regarder, l'intérêt remonte un peu. On a envie de savoir comment les choses vont se dérouler, quel crime ces personnages peuvent avoir commis dans leur passé, et surtout si on décèle d'autres indices… Et puis on commence aussi à s'attacher un peu à certains personnages malgré tout, même si on sait bien qu'il ne faut pas.


Du coup, je donne une note entre 6 et 7 pour le côté divertissant et le jeu des acteurs correct. Je comprends la déception pour les fans du réalisateur Pascal Laugier, spécialisé dans les films d'horreur, car là ça reste très soft. Il y a bien le côté slasher qui est présent, mais l'angoisse ne prend pas. Ne connaissant pas du tout l'œuvre du monsieur ni son background, j'ai plutôt pris ça comme autre chose, entre le polar et le thriller avec une bonne dose de survivalisme (on pense immanquablement à Lost), et pris comme tel, ça se laisse regarder. Mais je ne donne pas plus, parce que comme je le disais, on peut rapidement deviner le coupable, et si parfois c'est grâce à quelques indices sûrement volontairement disséminés plus ou moins subtilement, d'autre fois c'est clairement dû à des maladresses au niveau de la mise en scène. Je vais détailler en spoil les différents indices qui m'ont mené à cette conclusion. Attention, c'est vraiment du gros spoil, pas de subtilités pour contourner le propos !


Épisodes 1 et 2 :


Dès le 2ème épisode, Ève est la première à se confesser sur le fait d'avoir tué quelqu'un, ce qui déjà en soit est à souligner vu qu'aucun des autres n'est prêt à se dévoiler. Au final je ne sais pas trop si son histoire est vraie ou pas, ni si elle était vraiment flic, mais elle ne décrit pas un crime vraiment direct et volontaire : elle aurait fait libérer un homme soupçonné de viol sur la base d'un préjugé, car il lui paraissait être innocent. Il aurait alors récidivé et cette fois-ci aurait tué sa victime. Une histoire certes tragique mais qui ne la fait pas vraiment passer pour une criminelle. On éprouverait même plutôt de la compassion. Mais comme Ève, prenons garde à nos préjugés ! Alors, soit toute son histoire est fausse et tout tourne en fait autour de la mort de son mari (comme il sera révélé à la fin), soit son histoire est vraie et alors on peut supposer que, rongée par la culpabilité de son erreur, elle pourrait peut-être chercher à se rattraper en s'en prenant à d'autres criminels passés entre les mailles de la justice ?


Deuxième chose, avec le recul, son petit numéro avec le coup de fil, soi-disant de son "agent" à Los Angeles, dans le premier épisode, est tout de même assez louche. Surtout quand elle finit par dire de façon détachée que c'était une blague. Alors pourquoi ce coup de fil, qui rappelons-le l'a menée à s'éloigner quelques instants du groupe ? Peut-être pour placer le poisson dans le bungalow de Nina, par exemple…


Bien sûr, à ce stade on pourrait aussi imaginer que le coupable est extérieur, mais lors du meurtre de Gilles, ce dernier semble reconnaître le tueur lorsqu'il enlève son masque. Ce qui conforte dans l'idée que le tueur est bien l'un d'eux (en même temps sinon ça aurait été moins drôle).


Épisodes 3 et 4 :


Dans les premiers épisodes, on commence à voir les différents personnages découvrir des objets leur rappelant leur crime dans leur bungalow. Nina découvre les poissons, Xavier le médaillon de l'armée, Kelly le cœur en peluche, Malik les lunettes, etc. A chaque fois on les voit à l'écran faire leur sinistre découverte. Ainsi, quand au début de l'épisode 3, Ève arrive avec une perruque en affirmant qu'elle l'a trouvé dans son bungalow, et que cette perruque rappelle les cheveux de "sa" victime, on peut penser, comme les scénaristes l'ont sûrement voulu, qu'elle fait l'objet du même genre de harcèlement moral que les autres ; mais le fait qu'on ne voit pas en direct à l'écran sa découverte peut aussi tout de suite faire penser à une mascarade. Évidemment, elle veut faire croire aux autres (et au téléspectateur) qu'elle est menacée comme eux. Ça aurait presque pu passer, mais ça manque un peu de subtilité…


Puis vient la fin de l'épisode où son personnage semble mourir à son tour. J'attendais de voir cela, car il me paraissait assez évident que le coupable mettrait en scène sa propre mort à un moment où à un autre. Bingo, on voit vaguement un corps flotter au loin dans la mer avec les vêtements d'Ève, qui en plus part à la dérive, ce qui empêche les autres de la ramener. Et on est donc supposés croire sur parole que c'est elle. Sauf qu'on ne voit rien, cela pourrait carrément être quelqu'un d'autre, ou même… eh oui, on a bien déjà vu une perruque précédemment et surtout cette pièce remplie de mannequins, le lien est vite fait !


De plus, les scénaristes ont voulu à la fin de la série justifier le témoignage de Kelly (qui aurait vu le meurtre) en nous inventant une histoire de complicité dans la mise en scène de la mort d'Ève. Cette dernière a donc embobiné Kelly en lui faisant croire qu'elle allait enquêter dans l'ombre quand tout le monde la croirait morte. Le témoignage de Kelly était donc faux, inventé de toutes pièces. Ça aurait pu être l'occasion pour les scénaristes de semer le trouble en livrant un témoignage beaucoup plus concret qui aurait pu dissiper nos soupçons sur Ève. Au lieu de ça, on a un témoignage très flou : Kelly, éblouie par le soleil, distingue une silhouette en noir poignarder une Ève, assise au bord de l'eau, qui semble être statique et se laisser faire. Pas très adroit de la part des scénaristes car si à ce stade on a déjà des soupçons sur Ève, on peut très bien imaginer suite à ce témoignage qu'elle était à ce moment là déjà remplacée par un mannequin avec des poches de faux sang. Ensuite le soleil et l'imagination font le reste… Il n'en sera donc rien puisque tout le témoignage est faux, mais si les circonstances du meurtre avaient été décrites autrement et de façon plus explicite, avec par exemple une Ève qui se débat ou essaye de se sauver, cela aurait pu permettre de revoir nos soupçons, ce qui ne fut malheureusement pas le cas.


Épisode 5 :


Allez un dernier petit indice (je suis sûr qu'il doit y en voir d'autres que j'oublie ou que j'ai raté, bien évidemment) : lorsque Victoria découvre la salle aux écrans, antre du tueur, elle passe à un moment à côté d'un mur sur lequel sont accrochées les photos de tous les personnages de l'île. Tous sauf un… vous me voyez venir, je vous le donne en mille : pas de photos d'Ève évidemment (eh oui on a fait un arrêt sur image pour le vérifier).


Tout ceci pour un final où on tourne autour du pot tellement longtemps avant de dévoiler le coupable, que ça en devient assez ridicule quand le spectateur l'a déjà démasqué depuis longtemps, d'autant plus quand qu'il s'avère qu'on avait en effet vu juste. C'est donc bien là le plus gros défaut de cette série, car l'effet de surprise recherché peut être totalement absent. Il en restera donc, comme dit plus haut, un bon divertissement qui sait générer une certaine forme de curiosité et parfois de surprise, mais par d'autres éléments que ceux attendus… Et aussi, il ne faut pas se mentir, une forme de suspense quant à savoir si on a vu juste ou non, et bien sûr une petite pointe d'autosatisfaction le cas échéant !

Evanizblurk
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le 13 août 2021

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