Ascension
6.3
Ascension

Série SyFy (2014)

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Ascension, diffusée notamment sur Netflix, fait partie de ces séries dont l’excellent concept de base se trouve gâché par sa réalisation.


Sur le papier, Ascension promettait pourtant de sortir du lot : en 1963, les États-Unis initient un programme spatial ultra-secret destiné à coloniser d’autres mondes. Ainsi, 600 personnes vivent en huis clos dans un immense vaisseau parti pour un voyage de 100 ans. A mi-chemin de l’expérience, au bout de 50 ans, le meurtre non élucidé d’une jeune fille sera le déclencheur du chaos à bord.


C’est le genre de série devant laquelle on adore se repaître d’anecdotes historiques. La grande force de 22.11.63, autre série uchronique, en dépit de ses nombreux défauts, était bien de nous replonger avec succès dans les années Kennedy. Et à bord de l’USS Ascension, le temps semble s’être suspendu au cœur des trente glorieuses, et la vie poursuit son cours, de galas élégants en petits drames amoureux. Ou tout du moins, c’est ce qu’on nous raconte, mais sans nous le montrer, et le vaisseau entier ressemble à un gros anachronisme. Quelque chose ne colle pas : serait-ce la propreté rutilante des murs d’un édifice lancé il y a un demi-siècle qui trahit sa superficialité ?


En tout cas, Ascension ne prend pas le temps d’installer son ambiance proprement ni de nous régaler d’anecdotes en rapport avec ces années supposément figées. De nombreuses interrogations demeurent sans réponse : comment gèrent-ils les réserves de nourriture ? Comment renouvellent-ils les gardes-robes d’une génération à l’autre ? Quels sont les différents métiers à bord ? S’il y a un effort du côté des costumes, on regrette la pauvreté des décors qui ne parviennent à nous plonger dans l’atmosphère adéquate. Ce manquement crée un décalage trop faible entre l’intérieur du vaisseau et la Terre du XXIème siècle, où nous suivons un scientifique en charge du projet.


Néanmoins, le plus gros défaut de la production ne vient pas de ces éléments qu’on traite avec un brin de frustration mais une globale bienveillance. Le problème majeur d’Ascension provient de ses personnages : leur écriture, leurs dialogues et leur interprétation. Stéréotypés au possible, ils agissent comme des clichés sur pattes, du hurlement à la mort vers le ciel étoilé aux coups de poings dès le moindre mot de travers. Une petite fille peu à peu décrite comme “spéciale” pourrait être intéressante si l’actrice ne jouait pas aussi mal, tout comme la plupart de ses confrères. C’est un massacre à regarder et ça gâche prodigieusement le reste. Seul Gil Bellows (aperçu dans pas mal de productions comme Ally McBeal ou Esprits Criminels) tire à peu près son épingle du jeu en scientifique obsédé par la vision de son père : une sorte d’Arche de Noé visant à sauver l’humanité.


Mais le reste du casting, tout droit sorti d’un magazine de mode et exclusivement âgé de 20 à 55 ans, n’est même pas représentatif de ce que pourrait devenir cette population : où sont les personnes âgées ? En 50 ans de voyage, il doit bien en rester. Où est la diversité, la multiculturalité ? La perspective d’une colonie extra-terrestre est cruellement sujette à une vision patriotique américaine.


Les intrigues amoureuses viennent parasiter d’autres sujets potentiels qui pourraient être bien plus passionnants. Alors oui, on y effleure quelques enjeux de pouvoir et les dérives pouvant découler d’une telle situation : la “Crise” du descendant qui n’a eu d’autre choix que d’y être né, la régulation des naissances, la clandestinité… Mais tout ceci est traité bien superficiellement.


Reste l’intrigue, vraiment singulière, comprenant notamment un twist arrivé bien trop tôt mais qui ravive étrangement notre intérêt. Il nous force à considérer la série d’une manière complètement différente, ce qui peut créer une autre sorte de frustration chez certains spectateurs, mais en ravir d’autres. On vire vers un tout autre genre de science-fiction, un peu trop loin d’ailleurs, considérant qu’on espérait avoir une uchronie et qu’on se retrouve avec quelque chose de moins subtil. L’enquête complotiste sur Terre, presque à la X-Files, crée un peu de tension fort bienvenue et tout juste assez d’intérêt pour finir cette première saison. Dommage : la seconde ayant été annulée, nous n’aurons jamais les réponses aux questions amorcées.

Filmosaure
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le 5 févr. 2017

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