En 1990, alors que j’étais dans ma chambre, je m’apprêtais à partir sous les drapeaux, quand, sur une radio « libre », une voix inconnue aux accents anglo-saxons m’interpela. Accompagné d’une guitare, un vieux soldat racontait une marche de nuit.


Y'en avait jusqu'à la ceinture
Et le vieux con a dit d'avancer


Le vieux con, c’était son capitaine. J’étais sidéré. Dans un monde dépourvu d’internet, mettre un nom sur une voix n’était pas chose simple. Je n’ai identifié ce sublime anarchiste que bien plus tard.


Suivez-moi : je marcherai devant
Je n'aime pas les dégonflés


Graeme Allwright adaptait une chanson de Pete Seeger, Waist Deep in the Big Muddy (1967), écrite au plus fort de la guerre du Vietnam.


On avait d'la flotte jusqu'au cou
Et le vieux con a dit d'avancer


La fin est tragique. Le vieux con se noie et le sergent sauve, in extremis, l’escouade. Graeme ne dit rien de plus. Avec une admirable économie de mots et de notes, sans pathos, il illustre la bêtise humaine et la soumission absurde à l’autorité imbécile.


https://www.youtube.com/watch?v=MLUaV02Eo5s


Graeme est un compagnon de chaque jour. Installé depuis 60 ans en France, le néo-zélandais joue discrètement sa petite musique. Il est notamment l’auteur de chansons à boire.


Buvons encore une dernière fois
À l'amitié, l'amour, la joie
On a fêté nos retrouvailles
Ça m'fait d'la peine, mais il faut que je m'en aille

(Les retrouvailles)


Comme quoi, Graeme ne désespère pas totalement de l’espèce humaine.


PS. Version originale de Pete Seeger
https://www.youtube.com/watch?v=24VOo7-ctKU&feature=youtu.be&list=LLk1gH3mB_TA0r9cpbA9ZiRQ

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le 13 sept. 2018

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Step de Boisse

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