Les années passent et les livres de Philippe Djian sont de plus en plus elliptiques, l'auteur n'ayant aucun goût pour les scènes qui seraient cruciales pour la plupart des écrivains, préférant jouer avec l'intelligence du lecteur. Il semble d'ailleurs écrire principalement pour les plus fidèles d'entre eux qui savent qu'il faut chercher entre les lignes pour dissiper les silences de l'intrigue. Le cadre de Sans compter est posé sans préliminaires autour d'un narrateur (Nathan) privé de sa virilité et ironiquement cerné par des femmes qui ont des vues sur lui : son épouse, sa belle-mère, la femme d'un sénateur douteux et la femme de ménage de ce dernier. C'est la fin de l'hiver et le climat devient angoissant avec quelques morts plus ou moins suspectes qui se succèdent en peu de temps. Que notre héros ne soit pas fiable dans ce qu'il raconte parait une évidence, lui qui déambule désormais avec une créature fantastique à ses côtés (qu'il est le seul à voir). La tendance de Djian à épurer ses récits et à radicaliser leur forme (absence de ponctuation dans les dialogues) se confirme avec ce livre qui se déroule à la fois en terrain connu, avec ses thématiques favorites, dont évidemment les rapports entre hommes et femmes, et sur un dosage assez subtil entre roman noir, comédie et même fantastique.

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le 7 avr. 2023

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