C'est l'histoire d'un jeune homme qui, voulant de trop près toucher à la magie, va se voir accidentellement transformé en âne par sa maîtresse. Cela va être le début d'une longue série de mésaventures...


Une longue série de mésaventures, écrite par l'auteur de langue latine du IIe siècle, Apulée, qui est empreinte d'humour, d'ironie, mais aussi de cruauté. La cruauté de l'homme envers l'animal ne va pas nous être épargnée, celle de l'homme envers l'homme non plus. On suit donc avec intensité le parcours de cet âne si humain parmi cette espèce si inhumaine qu'est l'homme.


On aura aussi le droit à beaucoup de sensualité, d'une très grande audace. Les scènes où notre humain toujours humain a des relations sexuelles, décrites d'une manière à peine implicite, sont d'une charge érotique incroyable. Pour continuer sur le plan sexuel, c'est si audacieux que l'auteur ne reculera même pas devant


la zoophilie.


Tout cela sera régulièrement entrecoupé de récits ne faisant que de continuer à mettre en exergue la médiocrité de l'humain, dans lesquels on peut croiser une reprise de Phèdre, mais bien différente des versions d'Euripide et de Sénèque et, peut-être le moment le plus célèbre de tout le roman, les amours de Psyché et de Cupidon, qui s'étend sur près de deux livres sur les onze composant l'œuvre entière.


Donc un récit cruel, mais aussi audacieux, drôle et souvent mâtiné d'ironie, un récit admirable... sur les dix premiers livres. Oui, on n'atteint pas la réussite magistrale à cause du dernier livre.


Comme si Apulée ne voulait pas assumer qu'il avait écrit jusque-là une œuvre subversive et satirique, comme s'il voulait s'autocensurer lui-même,


il nous rédige un dernier livre bien-pensant à base de dieux dont on n'en a rien à foutre, avec de belles valeurs moralisatrices et tout ça, avec succession barbante de pénitences et de sacrifices physiques et mentales. Un dernier livre absolument illogique en plus sur le plan de l'intrigue, car pour retrouver sa forme initiale d'homme, le protagoniste n'avait nullement besoin de l'intervention d'un dieu ou, ici en l’occurrence, d'une déesse. Il suffisait juste qu'il bouffe une rose, pas besoin d'intervention divine à la con, une rose dans un jardin et c'était bon. J'ai lu sur Wikipédia qu'en fait cette partie, qui se greffe très mal avec le reste, était parodique, se moquant de la cupidité des collèges de prêtres. Franchement, ça ne se voit pas du tout. Si c'est de la parodie, c'est de la parodie ratée.


Ce qui fait que l'on termine sur une impression de déception une œuvre aussi admirable que prenante dans ses dix premiers livres. Tout ça à cause d'un fichu livre... Bon, je conseille tout de même de lire L'Âne d'or ou Métamorphoses (choisissez le titre que vous voulez !). Si on prend le roman dans son intégralité, ce serait dommage de passer à côté.

Plume231
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le 11 déc. 2020

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Plume231

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