Dans Guerre, ce roman peu épais, il y a : une infirmière chaudasse nommée L’Espinasse (pour la rime), un médecin appelé Mesconille (mais comme l’écriture de Céline est difficilement lisible, on n’est pas sûr que le « n » ne soit pas un « u »), une serveuse au grand coeur prénommée Destinée (comme la chanson de Guy Marchand) qui n’« était pas de nature à comprendre » , une dame de petite vertu qu’a pas froid aux yeux même si elle s’appelle Angèle, et surtout cette langue inimitable, quoique beaucoup imitée.
Le début est cafardeux et chaotique, la fin est sublime : « C’est drôle y a des êtres comme ça ils sont chargés, ils arrivent de l’infini, viennent apporter devant vous leur grand barda de sentiments comme au marché. Ils se méfient pas, ils déballent n’importe comment leur marchandise. Ils savent pas comment présenter bien les choses. On a pas le temps de fouiller dans leurs affaires forcément, on passe, on se retourne pas, on est pressé soi-même. Ça doit leur faire du chagrin. Ils remballent peut-être ? Ils gaspillent ? Je ne sais pas. Qu’est ce qu’ils deviennent ? On n’en sait rien du tout. Ils repartent peut-être jusqu’à ce qu’il leur en reste plus ? Et alors où qu’ils vont ? C’est énorme la vie quand même. On se perd partout. »