Ah ! George Dandin !
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Une des pièces les moins connues de Molière, et la réception contemporaine en pâtit : d’une comédie farcesque, on en fait maintenant une tragédie. A tort. Pourquoi interpréter les dernières paroles de George Dandin comme l’aveu du suicide à venir, quand on n’est censé y voir que la victoire féminine à l’encontre du patriarcat ?
Il faut bien se souvenir qu’au XVIIe siècle les femmes n’avaient pas voix au chapitre et se soumettaient au choix de leur père sur la question du mariage. Ce qu’Angélique fait, car il ne peut en être autrement. Mais plus la pièce avance, plus il devient évident qu’elle déteste son père autant que son mari, quand elle n’hésite pas à mentir effrontément à l’un, au mépris de la réputation (déjà peu reluisante) de l’autre. Dans un crescendo situationnel, le cocufiage qu’elle est sur le point de commettre se fait de plus en plus jour, et la tromperie s’y adapte en conséquence : George Dandin est constamment humilié ou remis à la place sans pouvoir prouver l’adultère dont il est victime. C’est finalement la ruse féminine qui l’emporte sur le patriarcat imposé. Angélique se rebelle impunément contre l’autorité paternelle, et en cela on ne peut qu’admirer en elle une femme au caractère des plus trempés ; le dialogue féministe engagé avec son mari à l’acte II, scène 2 va plus dans ce sens que n’importe quel artifice dramaturgique.
Tout caractère dramatique n’est cependant pas totalement à écarter dans cette pièce (bien que beauuuuuuuuucoup de recul soit de mise à ce sujet) : d’un roturier parvenu à s’élever socialement dans la petite aristocratie (ce qui est déjà quasiment impensable à cette époque), on en fait un bouffon, de la tromperie duquel on se moque sans vergogne. N’importe quel psychanalyste vous le dira : l’un des ressorts du rire est de jouer sur la peur, que l’on surmonte pour mieux s’en moquer. Au XVIIe siècle pour un public d’aristocrates (dont on sait aujourd’hui qu’ils seront plus ou moins renversés un peu plus d’un siècle plus tard), c’est une manière de se rassurer sur leurs positions bien campées. Pour un public bourgeois, c’est une manière de continuer d’espérer un possible renversement de situation. Qu’il est fort, ce J-B.
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Créée
le 15 déc. 2017
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