Cover Words (2015)

Words (2015)

"I fear those big words, Stephen said, which make us so unhappy." — Ulysses, James Joyce

Cette année, n'ayons pas peur des mots.

2017 :
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2016 (22) :
http://www.senscritique.com/liste/Words_2016/1146909

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26 livres

créee il y a environ 9 ans · modifiée il y a plus de 8 ans

L'Or
7.3

L'Or (1925)

Sortie : 1925 (France). Roman

livre de Blaise Cendrars

Paul_ a mis 7/10.

Annotation :

"L'Ante-Christ, c'est l'or."

.........

Pas grand chose à dire, Blaise remplit le contrat, le récit tient en haleine de bout en bout. C'est moderne dans son minimalisme, les chapitres sont très courts, mais ça a au moins le mérite d'être efficace. Et le mythe en lui-même fascine.

Lettre au père
7.4

Lettre au père

Brief and den Vater

Sortie : 1919 (France). Correspondance

livre de Franz Kafka

Paul_ a mis 7/10.

Annotation :

"J'étais écrasé par la simple existence de mon corps. Il me souvient, par exemple, que nous nous déshabillions souvent ensemble dans une cabine. Moi, maigre, chétif, étroit; toi, fort, grand, large. Déjà dans la cabine je me trouvais lamentable, et non seulement en face de toi, mais en face du monde entier, car tu étais pour moi la mesure de toutes choses."

.........

Douloureux à lire, on a l'impression de forcer notre passage dans l'intimité de Kafka - d'où la question de l'intérêt de cette publication. Il faudrait en savoir plus sur la vie de l'homme parce que telle quelle, cette lettre ne nous en apprend pas beaucoup et malgré tout le bien-fondé de son argumentation, tombe souvent dans des reproches unilatéraux. Ce que je veux dire, c'est que même si le fils se donne tous les efforts du monde pour se remettre en question lui aussi, je n'ai pas été très convaincu par sa démarche. Reste que le pseudo-complexe d'Œdipe mis en lumière est intéressant.

Le Livre de sable
7.8

Le Livre de sable (1975)

El Libro de Arena

Sortie : 1975 (France). Recueil de nouvelles

livre de Jorge Luis Borges

Paul_ a mis 8/10.

Annotation :

"Ulrica m'invita à m'asseoir à table. Elle me dit qu'elle aimait se promener seule.
Je me souvins d'une plaisanterie de Schopenhauer et je lui répondis:
- Moi aussi. Nous pouvons donc sortir ensemble."

.........

Toujours ce plaisir à lire l'Argentin, comme embarquer pour une contrée très lointaine, puis, une fois là-bas, pénétrer dans une vieille demeure en bois remplie de livres poussiéreux où un étranger nous y attend dans l'ombre, avec un sourire à la fois mystérieux et chaleureux. Résultat: on rentre chez soi un brin déboussolé mais avec le sentiment d'avoir fait un voyage dans l'espace et dans le temps.

Un privé à Babylone
7.8

Un privé à Babylone (1977)

Dreaming of Babylon : A Private Eye Novel 1942

Sortie : 1981 (France). Roman

livre de Richard Brautigan

Paul_ a mis 8/10.

Annotation :

"A guy's got to keep moving. If you don't the grass will grow on you."

"She wore a loose bathrobe that covered up a body that would have won first prize in a beauty contest for cement blocks... She had a voice that made Pearl Harbour sound like a lullaby."

.........

Ca coule tout seul, je recommande à tout ceux qui veulent lire en anglais. Un personnage très attachant, des touches d'humour un peu partout, c'est fun ! Le hic peut-être - puisqu'il en faut toujours un - c'est que ça se lit un peu trop vite.

Les Chants de l'innocence et de l'expérience
8

Les Chants de l'innocence et de l'expérience

Songs of Innocence and of Experience

Sortie : 1789 (France). Poésie

livre de William Blake

Paul_ a mis 7/10 et l'a mis dans ses coups de cœur.

Annotation :

"Folly is an endless maze;
Tangled roots perplex her ways;
How many have fallen there!
They stumble all night over bones of the dead;
And feel — they know not what but care;
And wish to lead others, when they should be led."

Entretiens avec le Professeur Y
7.8

Entretiens avec le Professeur Y (1955)

Sortie : 1955 (France). Essai, Nouvelle

livre de Louis-Ferdinand Céline

Paul_ a mis 8/10 et l'a mis dans ses coups de cœur.

Annotation :

"- Le lyrisme est peu français...
- Colonel, vous avez raison ! les Français sont si vaniteux, que le "je" des autres les fout en boule !...
- Et les Anglais ?... et les Allemands ?... et les Danois ?... ils se hérissent aussi au "je" ?... au "je" d'autrui ?... comme vous dites ?...
- Oh ! réfléchissant... y pensant... ils sont peut-être plus sournois... plus discrets... c'est tout !... moins nerveux... mais le fait est universel : personne aime le "je" d'autrui !... Chinois, Valaques, Saxons, Berbères !... kif !... ainsi du caca, vous remarquerez ?... chacun supporte à ravir l'odeur de son propre caca, mais l'odeur du caca d'Estelle, que vous adorez, soi-disant, vous est beaucoup moins agréable !... "de l'air ! de l'air !" que vous hurlez..."

À l'ombre des jeunes filles en fleurs
8.7

À l'ombre des jeunes filles en fleurs (1919)

À la recherche du temps perdu / 2

Sortie : 1919 (France). Roman

livre de Marcel Proust

Paul_ a mis 10/10.

Annotation :

"Nous descendîmes sur Hudimesnil ; tout d’un coup je fus rempli de ce bonheur profond que je n’avais pas souvent ressenti depuis Combray, un bonheur analogue à celui que m’avaient donné, entre autres, les clochers de Martinville. Mais cette fois il resta incomplet. Je venais d’apercevoir, en retrait de la route en dos d’âne que nous suivions, trois arbres qui devaient servir d’entrée à une allée couverte et formaient un dessin que je ne voyais pas pour la première fois, je ne pouvais arriver à reconnaître le lieu dont ils étaient comme détachés mais je sentais qu’il m’avait été familier autrefois; de sorte que mon esprit ayant trébuché entre quelque année lointaine et le moment présent, les environs de Balbec vacillèrent et je me demandai si toute cette promenade n’était pas une fiction, Balbec un endroit où je n’étais jamais allé que par l’imagination, Mme de Villeparisis un personnage de roman et les trois vieux arbres la réalité qu’on retrouve en levant les yeux de dessus le livre qu’on était en train de lire et qui vous décrivait un milieu dans lequel on avait fini par se croire effectivement transporté."

"Je savais que je ne posséderais pas cette jeune cycliste, si je ne possédais aussi ce qu'il y avait dans ses yeux. Et c'était par conséquent toute sa vie qui m'inspirait du désir ; désir douloureux, parce que je le sentais irréalisable, mais enivrant, parce que ce qui avait été jusque-là ma vie ayant brusquement cessé d'être ma vie totale, n'étant plus qu'une petite partie de l'espace étendu devant moi que je brûlais de couvrir, et qui était fait de la vie de ces jeunes filles, m'offrait ce prolongement, cette multiplication possible de soi-même, qui est le bonheur."

La Nouvelle rêvée
7.7

La Nouvelle rêvée

Traumnovelle

Sortie : 1926 (France). Roman, Recueil de nouvelles

livre de Arthur Schnitzler

Paul_ a mis 8/10.

Annotation :

''Il n'y a pas de rêve qui soit totalement un rêve.''

Poésies
8

Poésies (1899)

Sortie : 1899 (France). Poésie

livre de Stéphane Mallarmé

Paul_ a mis 9/10.

Annotation :

"Ses purs ongles très haut dédiant leur onyx,
L'Angoisse ce minuit, soutient, lampadophore,
Maint rêve vespéral brûlé par le Phénix
Que ne recueille pas de cinéraire amphore

Sur les crédences, au salon vide : nul ptyx,
Aboli bibelot d'inanité sonore,
(Car le Maître est allé puiser des pleurs au Styx
Avec ce seul objet dont le Néant s'honore.)

Mais proche la croisée au nord vacante, un or
Agonise selon peut-être le décor
Des licornes ruant du feu contre une nixe,

Elle, défunte nue en le miroir, encor
Que, dans l'oubli fermé par le cadre, se fixe
De scintillations sitôt le septuor."

Extinction
8.5

Extinction (1986)

Un effondrement

Auslöschung - Ein Zerfall

Sortie : 1986 (Autriche). Roman

livre de Thomas Bernhard

Paul_ a mis 9/10.

Annotation :

"(...) mes parents détestaient ce qu'on appelle l'oisiveté, parce qu'ils ne pouvaient imaginer qu'un homme de l'esprit ne connaît aucunement l'oisiveté, ne peut aucunement se la permettre, qu'un homme de l'esprit vit dans la plus grande tension et dans le plus grand intérêt justement quand il s'adonne en quelque sorte à l'oisiveté (...)"

"Au tournant du siècle, penser ne sera plus du tout possible pour cette humanité, Gambetti, et le processus d'abêtissement qui a été mis en branle par la photographie et qui, par les images mobiles, est devenu une habitude universelle, aura atteint le sommet. Vivre dans un tel monde, qui ne sera plus dominé que par la stupidité, ne peut plus guère être possible, Gambetti, ai-je dit à celui-ci, ai-je pensé à présent devant la tombe ouverte, et ce sera bien si, juste avant que ce processus d'abêtissement du monde se soit totalement réalisé, nous nous suicidons. Dans cette mesure il est tout à fait logique, Gambetti, qu'au tournant du siècle ceux qui existent par la pensée et grâce à la pensée se soient suicidés. Mon conseil à l'homme qui pense ne peut être que de se suicider avant le tournant du siècle, Gambetti, c'est en vérité ma conviction, ai-je dit à Gambetti, ai-je pensé à présent devant la tombe ouverte."

.........

Rien de nouveau sous le soleil bernhardien: on prend les mêmes et on recommence. Le narrateur n'a jamais eu autant de fiel à revendre, ses phrases comme des serpents se torsionnent sans cesse, on gravite autour de trois, quatre personnages qui ne sont qu'évoqués, qu'on entrevoit à peine. Ne restent que le narrateur, quelques photos et ses pensées. Tout y passe dans cette gigantesque machine à laver qui ne s'arrête jamais de tourner. Et ça marche, et on redemande.

L'Arrêt de mort
7.6

L'Arrêt de mort (1948)

Sortie : 1948 (France). Récit

livre de Maurice Blanchot

Paul_ a mis 5/10.

Annotation :

"Je l’ai aimée et n’ai aimé qu’elle, et tout ce qui est arrivé, je l’ai voulu, et n’ayant eu de regard que pour elle, où qu’elle ait été et où que j’aie pu être, dans l’absence, dans le malheur, dans la fatalité des choses mortes, dans la nécessité des choses vivantes, dans la fatigue du travail, dans ces visages nés de ma curiosité, dans mes fausses paroles, dans mes serments menteurs, dans le silence et dans la nuit, je lui ai donné toute ma force et elle m’a donné toute la sienne, de sorte que cette force trop grande, incapable d’être ruinée par rien, nous voue peut-être à un malheur sans mesure, mais, si cela est, ce malheur je le prends sur moi et je m’en réjouis sans mesure et, à elle, je dis éternellement : « Viens », et éternellement, elle est là."

.........

Quel drôle de livre. Mais est-ce encore un livre ? Si l'on s'en tient à la définition d'un livre comme un assemblage de feuilles portant des signes destinés à être lus, alors, oui, sans aucun doute, c'est un livre. En revanche, pour ce qui est de la correspondance de ces signes entre eux, rien n'est plus sûr. Pour reprendre Cioran, "chaque phrase est splendide en elle-même, mais ne signifie rien. Il n'y a pas de sens qui vous accroche, qui vous arrête. Il n'y a que des mots." On ne saurait être si radical toutefois - tout semble faire sens, dans L'arrêt de mort, du point de vue grammatical et même narratif. Alors, qu'est-ce qui cloche ? Tout cela est bien fascinant, mais moi, j'ai besoin d'une prise, sans quoi je tombe.

Le Neveu de Wittgenstein
7.8

Le Neveu de Wittgenstein (1982)

Wittgensteins Neffe

Sortie : 1985 (France). Roman

livre de Thomas Bernhard

Paul_ a mis 8/10 et l'a mis dans ses coups de cœur.

Annotation :

''Je me suis soumis à l'humiliation de ces remises de prix. Jusqu'à quarante ans. Je me suis laissé chier sur la tête dans tous ces Hôtels de Ville, dans toutes ces salles des fêtes, car une remise de prix n'est rien d'autre qu'une cérémonie au cours de laquelle on vous chie sur la tête. Accepter un prix, cela ne veut rien dire d'autre que se laisser chier sur la tête parce qu'on est payé pour ça. J'ai toujours ressenti ces remises de prix comme la pire humiliation qu'on puisse imaginer, et pas comme un honneur. Car un prix est toujours décerné par des gens incompétents qui veulent vous chier sur la tête, et qui vous chient copieusement sur la tête quand on accepte leur prix en mains propres.''

Les Choses
7.4

Les Choses (1965)

Une histoire des années soixante

Sortie : 1965 (France). Roman

livre de Georges Perec

Paul_ a mis 8/10.

Annotation :

"Ils se retrouvaient au complet dans la salle, le premier soir. L'écran s'éclairait et ils frémissaient d'aise. Mais les couleurs dataient, les images sautillaient, les femmes avaient terriblement vieilli; ils sortaient; ils étaient tristes. Ce n'était pas le film dont ils avaient rêvé. Ce n'était pas ce film total que chacun parmi eux portait en lui, ce film parfait qu'ils n'auraient pu épuiser. Ce film qu'ils auraient voulu faire. Ou, plus secrètement sans doute, qu'ils auraient voulu vivre."

Le Procès
7.8

Le Procès (1925)

(traduction Alexandre Vialatte)

Der Prozess

Sortie : 1933 (France). Roman

livre de Franz Kafka

Paul_ a mis 9/10.

Annotation :

''Il ne s'est rien passé, chuchota-t-elle. J'ai seulement jeté une assiette contre le mur pour vous faire sortir.''

La Vie dans les plis
8.1

La Vie dans les plis (1949)

Sortie : 1949 (France). Poésie

livre de Henri Michaux

Paul_ a mis 8/10.

Annotation :

"Ils ont mis des gants pour se rencontrer.
Dans le gant, on trouve une main, un os, une
épée, un frère, une sœur, une lumière, cela
dépend des Meidosems, des jours, des chances.
Dans la bouche on trouve une langue, un
appétit, des mots, une douceur, l'eau dans le
puits, le puits dans la Terre. Cela dépend des
Meidosems, des jours, des chances.
Dans la cathédrale de la bouche des Meidosems,
ils font aussi claquer des pavillons."

L'Origine - La Cave - Le Souffle - Le Froid - Un enfant
9.1

L'Origine - La Cave - Le Souffle - Le Froid - Un enfant

Sortie : février 1990 (France). Roman

livre de Thomas Bernhard

Paul_ l'a mis dans ses coups de cœur.

Annotation :

L'Origine (7.5)
La Cave (8.5)
Le Souffle (8)

Retour de prêt à la médiathèque oblige, je n'ai pas pu lire Le Froid et Un enfant.
.........

''J'avais mis fin à une période d'inutilité, me semblait-il, une période malchanceuse, une période terrible. J'avais alors eu deux possibilités, c'est encore aujourd'hui bien clair dans mon esprit : me tuer, ce pour quoi le courage me manquait, et/ou quitter le lycée d'un instant à l'autre ; je ne m'étais pas tué, j'étais entré en apprentissage.'' (La Cave)

Élégies de Duino
8.2

Élégies de Duino (1922)

(traduction François-René Daillie)

Duineser Elegien

Sortie : 2006 (France). Poésie

livre de Rainer Maria Rilke

Paul_ a mis 6/10.

Annotation :

"Qui donc, si je criais, parmi les cohortes des anges
m'entendrait? Et l'un d'eux quand même dût-il
me prendre soudain sur son cœur, ne m'évanouirais-je pas
sous son existence trop forte? Car le beau
n'est que ce degré du terrible qu'encore nous supportons
et nous ne l'admirons tant que parce que, impassible, il dédaigne
de nous détruire. Tout ange est terrible."

Littératures
8.3

Littératures

Sortie : 18 février 2010 (France). Essai, Littérature & linguistique

livre de Vladimir Nabokov

Paul_ a mis 7/10 et l'a mis dans ses coups de cœur.

Annotation :

“Literature was not born the day when a boy crying "wolf, wolf" came running out of the Neanderthal valley with a big gray wolf at his heels; literature was born on the day when a boy came crying "wolf, wolf" and there was no wolf behind him.”

Je m'en vais
6.9

Je m'en vais (1999)

Sortie : 7 septembre 1999. Roman

livre de Jean Echenoz

Paul_ a mis 6/10.

Annotation :

"Vous allez sur Toulouse ? lui demande Baumgartner.
La jeune femme ne répond pas tout de suite, son visage n'est pas bien distinct dans la pénombre. Puis elle articule d'une voix monocorde et récitative, un peu mécanique et vaguement inquiétante, qu'elle ne va pas sur Toulouse mais à Toulouse, qu'il est regrettable et curieux que l'on confonde ces prépositions de plus en plus souvent, que rien ne justifie cela qui s'inscrit en tout cas dans un mouvement général de maltraitance de la langue contre lequel on ne peut que s'insurger, qu'elle en tout cas s'insurge vivement contre, puis elle tourne ses cheveux trempés sur le repose-tête du siège et s'endort aussitôt. Elle a l'air complètement cinglée. "

Le Côté de Guermantes
8.5

Le Côté de Guermantes (1921)

À la recherche du temps perdu / 3

Sortie : 1921 (France). Roman

livre de Marcel Proust

Paul_ a mis 10/10.

Annotation :

"Et quand je portais mes yeux sur cette baignoire, bien plus qu’au plafond du théâtre où étaient peintes de froides allégories, c’était comme si j’avais aperçu, grâce au déchirement miraculeux des nuées coutumières, l’assemblée des Dieux en train de contempler le spectacle des hommes, sous un velum rouge, dans une éclaircie lumineuse, entre deux piliers du Ciel. Je contemplais cette apothéose momentanée avec un trouble que mélangeait de paix le sentiment d’être ignoré des Immortels ; la duchesse m’avait bien vu une fois avec son mari, mais ne devait certainement pas s’en souvenir, et je ne souffrais pas qu’elle se trouvât, par la place qu’elle occupait dans la baignoire, regarder les madrépores anonymes et collectifs du public de l’orchestre, car je sentais heureusement mon être dissous au milieu d’eux, quand, au moment où en vertu des lois de la réfraction vint sans doute se peindre dans le courant impassible des deux yeux bleus la forme confuse du protozoaire dépourvu d’existence individuelle que j’étais, je vis une clarté les illuminer : la duchesse, de déesse devenue femme et me semblant tout d’un coup mille fois plus belle, leva vers moi la main gantée de blanc qu’elle tenait appuyée sur le rebord de la loge, l’agita en signe d’amitié, mes regards se sentirent croisés par l’incandescence involontaire et les feux des yeux de la princesse, laquelle les avait fait entrer à son insu en conflagration rien qu’en les bougeant pour chercher à voir à qui sa cousine venait de dire bonjour, et celle-ci, qui m’avait reconnu, fit pleuvoir sur moi l’averse étincelante et céleste de son sourire."

Infinite Jest
8.5

Infinite Jest (1996)

Sortie : 1 février 1996 (États-Unis). Roman, Version originale

livre de David Foster Wallace

Paul_ a mis 9/10 et l'a mis dans ses coups de cœur.

Annotation :

"'I read,' I say. 'I study and read. I bet I've read everything you've read. Don't think I haven't. I consume libraries. I wear out spines and ROM-drives. I do things like get in a taxi and say, "The library, and step on it." My instincts concerning syntax and mechanics are better than your own, I can tell, with due respect.
'But it transcends the mechanics. I'm not a machine. I feel and believe. I have opinions. Some of them are interesting. I could, if you'd let me, talk and talk. Let's talk about anything. I believe the influence of Kierkegaard on Camus is underestimated. I believe Dennis Gabor may very well have been the Antichrist. I believe Hobbes is just Rousseau in a dark mirror. I believe, with Hegel, that transcendence is absorption. I could interface you guys right under the table,' I say. 'I'm not just a creãtus, manufactured, conditioned, bred for a function.’
I open my eyes. 'Please don't think I don't care.'"

Autres rivages
7.5

Autres rivages (1951)

autobiographie

Speak, memory

Sortie : juin 1989 (France). Autobiographie & mémoires

livre de Vladimir Nabokov

Paul_ a mis 8/10.

Annotation :

"When a butterfly has to look like a leaf, not only are all the details of a leaf beautifully rendered but markings mimicking grub-bored holes are generously thrown in. "Natural selection", in the Darwinian sense, could not explain the miraculous coincidence of imitative aspect and imitative behavior, nor could one appeal to the theory of "the struggle for life" when a protective device was carried to a point of mimetic subtlety, exuberance, and luxury far in excess of a predator's power of appreciation. I discovered in nature the non-utilitarian delights that I sought in art. Both were a form of magic, both were a game of intricate enchantment and deception."

Un coup de dés jamais n'abolira le hasard
8.2

Un coup de dés jamais n'abolira le hasard (1914)

Sortie : 1914 (France). Poésie

livre de Stéphane Mallarmé

Paul_ a mis 8/10.

Les Vagues
8.2

Les Vagues (1931)

(traduction Marguerite Yourcenar)

The Waves

Sortie : 1937 (France). Roman

livre de Virginia Woolf

Paul_ a mis 9/10.

Annotation :

"Mrs Constable, girt in a bath-towel, takes her lemon-coloured sponge and soaks it in water; it turns chocolate-brown; it drips; and, holding it high above me, shivering beneath her, she squeezes it. Water pours down the runnel of my spine. Bright arrows of sensation shoot on either side. I am covered with warm flesh. My dry crannies are wetted; my cold body is warmed; it is sluiced and gleaming. Water descends and sheets me like an eel. Now hot towels envelop me, and their roughness, as I rub my back, makes my blood purr. Rich and heavy sensations form on the roof of my mind; down showers the day -- the woods; and Elvedon; Susan and the pigeon. Pouring down the walls of my mind, running together, the day falls copious, resplendent. Now I tie my pyjamas loosely round me, and lie under this thin sheet afloat in the shallow light which is like a film of water drawn over my eyes by a wave. I hear through it far off, far away, faint and far, the chorus beginning; wheels; dogs; men shouting; church bells; the chorus beginning."

Maximes
7.5

Maximes (1665)

Sortie : 1665 (France). Aphorismes & pensées, Philosophie

livre de François de la Rochefoucauld

Paul_ a mis 7/10.

Annotation :

"Il y a dans les afflictions diverses sortes d'hypocrisie. Dans l'une, sous prétexte de pleurer la perte d'une personne qui nous est chère, nous nous pleurons nous-mêmes; nous regrettons la bonne opinion qu'il avait de nous; nous pleurons la diminution de notre bien, de notre plaisir, de notre considération. Ainsi les morts ont l'honneur des larmes qui ne coulent que pour les vivants [...] Il y a encore une autre espèce de larmes qui n'ont que de petites sources qui coulent et se tarissent facilement: on pleure pour avoir la réputation d'être tendre, on pleure pour être plaint, on pleure pour être pleuré; enfin on pleure pour éviter la honte de ne pleurer pas."

Sodome et Gomorrhe
8.8

Sodome et Gomorrhe (1922)

À la recherche du temps perdu / 4

Sortie : mai 1922 (France). Roman

livre de Marcel Proust

Paul_ a mis 10/10.

Annotation :

"Dans l'ordinaire de la vie, les yeux de la duchesse de Guermantes étaient distraits et un peu mélancoliques, elle les faisait briller seulement d'une flamme spirituelle chaque fois qu'elle avait à dire bonjour à quelque ami ; absolument comme si celui-ci avait été quelque mot d'esprit, quelque trait charmant, quelque régal pour délicats dont la dégustation a mis une expression de finesse et de joie sur le visage du connaisseur. Mais pour les grandes soirées, comme elle avait trop de bonjours à dire, elle trouvait qu'il eût été fatigant, après chacun d'eux, d'éteindre à chaque fois la lumière. Tel un gourmet de littérature, allant au théâtre voir une nouveauté d'un des maîtres de la scène, témoigne sa certitude de ne pas passer une mauvaise soirée en ayant déjà, tandis qu'il remet ses affaires à l'ouvreuse, sa lèvre ajustée pour un sourire sagace, son regard avivé pour une approbation malicieuse ; ainsi c'était dès son arrivée que la duchesse allumait pour toute la soirée. Et tandis qu'elle donnait son manteau du soir, d'un magnifique rouge Tiepolo, lequel laissa voir un véritable carcan de rubis qui enfermait son cou, après avoir jeté sur sa robe ce dernier regard rapide, minutieux et complet de couturière qui est celui d'une femme du monde, Oriane s'assura du scintillement de ses yeux non moins que de ses autres bijoux."

Paul_

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