Cover Ces films qui furent réhabilités avec le temps.

Ces films qui furent réhabilités avec le temps.

Cette liste cherche à répertorier autant que faire se peut les films ayant connu l'un des phénomènes les plus intrigants de l'Art en général. Un phénomène mettant d'autant plus en évidence la contingence absolue des réactions autour n'importe quelle œuvre, et démontrant une fois de plus que la ...

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Liste de

14 films

créee il y a presque 4 ans · modifiée il y a 7 mois

Metropolis
8.1

Metropolis (1927)

2 h 25 min. Sortie : 6 février 1927 (France). Muet, Drame, Science-fiction

Film de Fritz Lang

Doc-Cineco a mis 9/10.

Annotation :

Aujourd’hui, Metropolis est probablement le film muet le plus connu qui soit. Il est considéré comme une pierre angulaire du cinéma de science-fiction, comme l'un des plus illustres représentants de l'expressionisme allemand, et est particulièrement reconnu comme étant l’un des films les plus en avance sur son temps. En 2001, il fut même le premier film inscrit sur le registre international de la mémoire du monde de l’UNESCO.

Pourtant à l’époque de sa sortie, le film fut massacré par la critique. Ont été saluées ses qualités techniques, mais le scénario fut considéré comme stupide. Le critique Mordaunt Hall résuma l’opinion générale en décrivant le film comme étant une "merveille technique aux pieds d’argiles". En particulier, le romancier de science-fiction H.G. Wells (dont le travail avait pourtant inspiré le film) le détesta, lui reprochant d’être idiot, cliché, et complètement incohérent sur sa vision du progrès technologique.

L’accueil critique initial fut si mauvais que pour son exploitation, le film ne cessa d’être raccourci en des montages de plus en plus courts. Ce qui entraîna pendant des décennies la disparition pure et simple des montages originaux. Le film fut naturellement un énorme échec commercial, avec des recettes estimées à 75 000 reichsmarks… là où il en avait coûté plus de cinq millions. Faisant au passage de lui le film le plus cher de tous les temps à l’époque de sa sortie, et le film muet le plus cher qui soit encore aujourd'hui.

Le pire dans cette histoire étant qu’à l’époque une certaine partie de la population allemande apprécia le film… les nazis. Goebbels en particulier, qui déclara à Fritz Lang qu’après avoir vu son film, Hitler lui-même souhaitait qu’il devienne le réalisateur officiel du parti nazi. Spoiler : Lang finira par fuir le territoire. Selon le réalisateur Peter Bogdanovich, qui l'avait interviewé, cette fascination que les nazis avaient pour Metropolis expliquerait pourquoi même Fritz Lang détestait son film.

Depuis, le film fut restauré plusieurs fois, et il a complètement été réhabilité. D'ailleurs en 2008, la quasi-totalité des scènes manquantes ont été retrouvées dans le musée du cinéma de Buenos Aires, grâce à une copie 16mm du film. C'est pourquoi nous pouvons aujourd’hui profiter d’une version de 148 minutes du film, soit cinq de moins que la version originale.

Le Mécano de la Générale
8.1

Le Mécano de la Générale (1926)

The General

1 h 18 min. Sortie : 24 février 1927 (France). Muet, Action, Aventure

Film de Clyde Bruckman et Buster Keaton

Doc-Cineco a mis 8/10.

Annotation :

Aujourd’hui, "Le mécano de la générale" est considéré comme l’un des plus grands films burlesques américains et comme l’œuvre la plus emblématique de son réalisateur Buster Keaton. En 1989, il fut même le premier film à avoir été sélectionné et archivé par la National Film Registry pour son importance cinématographique, et en 2007, il fut classé 18ème meilleur film de tous les temps par l’American Film Institute.

Pourtant à l’époque de sa sortie, le film fut une énorme déception pour les critiques, en particulier du fait qu’on ne le trouvait absolument pas drôle. Voici un petit florilège de ce qu’on pouvait lire à son sujet :
Le New-York Times : "La direction artistique est très bien faite, mais l’amusement n’est pas au rendez-vous." "Ce n’est en aucun cas aussi bon que les précédentes créations de Mr Keaton."
Le Los Angeles Times : "Ni une comédie pure ni un drame passionnant." "Le film traîne terriblement la patte avec une longue et fatigante poursuite d’un moteur par un autre."
Le Motion Picture Classic : "Comédie légère de la guerre civile, pas à la hauteur des meilleurs standards de Keaton."
Le New York Herald Tribune : "Long et fastidieux, la chose la moins drôle que Buster Keaton ait jamais faite."
Robert E. Sherwood : "Quelqu’un aurait dû dire à Buster Keaton qu’il est difficile de tirer un rire de la vue d’hommes tués au combat."

De ce fait, et en particulier à cause de son budget élevé (le film contient d'ailleurs le plan le plus cher de l'histoire du cinéma muet), le film fut un échec commercial, ne rapportant qu’un peu plus d’un million de dollars. En 1963, Buster Keaton déclara qu’il s’agissait du film dont il était le plus fier, et qu’il fut ravi de sa réhabilitation par le public.

La Règle du jeu
7.7

La Règle du jeu (1939)

1 h 50 min. Sortie : 8 juillet 1939. Comédie dramatique

Film de Jean Renoir

Doc-Cineco a mis 3/10.

Annotation :

Aujourd'hui, "La règle du jeu" est considéré comme l'un des meilleurs films de son réalisateur Jean Renoir et comme l'un des plus grands films du cinéma français.

Pourtant à l'époque de sa sortie, le film fit un énorme scandale. Le public le rejeta massivement, la raison étant imputée au fait qu'il se reconnaissait trop dans la vision critique que le film dressait de la bourgeoisie. Lors de la première du film le 7 juillet 1939, la salle se mit à huer le film, et un spectateur essaya de mettre le feu à la salle avec un journal et des allumettes. Une semaine après cette avant-première, Renoir raccourcit de plus en plus le film, enlevant les passages les plus "choquants". Au fur et à mesure des différents montages, le film passa de 113 à 85 minutes. Malgré tout, lors de son exploitation, il fut un énorme échec commercial. D'autant qu'il avait coûté plus de cinq millions de francs, ce qui en faisait le film français le plus cher jamais réalisé à l'époque. Les critiques de la presses étaient quant à elle très partagées. Enfin, en octobre 1939, le gouvernement français décida ni plus ni moins que de l'interdire, le qualifiant de "déprimant, morbide, immoral (et) ayant une influence indésirable sur la jeunesse." Cette interdiction dura le temps de la Seconde Guerre Mondiale… puis le film fut ré-interdit en 1945. Renoir déclara lui-même que La Règle du Jeu fut le plus grand échec de sa vie, et qu'il envisagea même à l'époque d'arrêter le cinéma ou au moins de quitter la France.

Puis, petit à petit, la version de 85 minutes fut redécouverte par le monde entier, et en 1952 elle fut même inscrite dans le top 10 des meilleurs films de tous les temps du magazine anglais Sight & Sound. Malheureusement, le négatif original de 113 minutes avait été détruit lors d'un bombardement allié en 1942. C'est pourquoi la Société des Grands Films Classiques décida de restaurer le film. Ainsi, après plusieurs années de travail, à partir d'archives et sous les conseils directs de Jean Renoir, elle reconstruisit une version du film de 106 minutes. Renoir la jugeât satisfaisante, déclarant qu'il ne manquait qu'une scène sans importance. Cette restauration fut alors projetée à la Mostra de Venise de 1959, vingt ans après sa sortie en salle. Le film fut alors acclamé comme un pur chef-d'œuvre. Truffaut le qualifiera même plus tard de "crédo des cinéphiles, le film des films."

Il fallut néanmoins attendre 1965 avant qu'il ne soit de nouveau projeté en France.

Godzilla
7.2

Godzilla (1954)

Gojira

1 h 36 min. Sortie : 14 mars 1957 (France). Science-fiction, Catastrophe, Fantastique

Film de Ishirô Honda

Annotation :

Aujourd'hui, Godzilla est vu comme l'origine de tout un pan du cinéma japonais, à savoir le kaijū eiga, et comme un classique du film de monstre. La métaphore qu'il incarne est également saluée, puisqu'il cherche à exorciser l'un des pires traumatismes de l'Histoire japonaise que sont les bombardements d'Hiroshima et de Nagasaki. En 1984, il fut même considéré comme l'un des vingt meilleurs films japonais par 370 critiques dans le magazine Kinema Junpo.

Sauf qu'à l'époque de sa sortie, il a au contraire été plutôt mal accueilli par les critiques japonaises. Pire, c'est précisément la métaphore qu'utilise le film qui a été critiquée, le réalisateur Ishirô Honda ayant été accusé de récupérer l'iconographie des victimes japonaises de la Seconde Guerre Mondiale pour en faire du simple divertissement. Le film s'est également heurté à l'incrédulité du public japonais de l'époque. Il faut à ce titre rappeler encore une fois qu'il s'agissait du tout premier kaijū eiga, et autant dire que les gens n'étaient pas prêts à voir un film se prenant au sérieux avec un monstre géant qui crache du feu. Le réalisateur s'en était d'ailleurs plaint : "Ils ont dit que c'était une daube grotesque et que ça ressemblait à quelque chose qu'on viendrait de cracher. Je me suis senti mal pour mon équipe, parce qu'ils avaient travaillé si dur !"

Puis, le film est sorti en salle aux États-Unis, et il y fut bien mieux reçu. La honte que ressentaient les américains vis à vis de l'évènement que le film symbolisait ayant aidé à ce meilleur accueil. Les critiques américaines déclaraient : "ce film dépeint honnêtement les horreurs de la bombe atomique." C'est précisément cette réception internationale qui fit relativiser le film aux yeux des japonais, qui désormais le considèrent comme une œuvre éminente du patrimoine cinématographique de leur pays.

La Nuit du chasseur
8.1

La Nuit du chasseur (1955)

The Night of the Hunter

1 h 32 min. Sortie : 11 mai 1956 (France). Drame, Thriller, Film noir

Film de Charles Laughton

Doc-Cineco a mis 6/10.

Annotation :

Aujourd'hui, "La nuit du chasseur" est considéré comme l'un des plus grands films américains, particulièrement grâce à son style visuel expressionniste très impressionnant et à la performance mémorable de Robert Mitchum. En 2008, il a successivement été à la 71ème positition dans le top 500 des meilleurs films de tous les temps selon le magazine Empire, et au deuxième rang de la liste des 100 films pour une cinémathèque convenable des Cahiers du Cinéma.

Sauf qu'à l'époque de sa sortie, il ne fut ni un succès commercial, la faute à une mauvaise exploitation de la United Artists, ni même un succès d'estime. Les critiques furent au contraire assez mitigées, et déplorèrent le potentiel gâché du film qui adaptait alors le best-seller de Davis Grubb. Exemples :
Le New York Times : "Essai bizarre et intrigant"
Variety : "La terreur implacable du roman de Davis Grubb a échappé à Paul Gregory et Charles Laughton dans leur traduction de La Nuit du Chasseur"
Life : "Il s'efforce trop d'être simple et finit par être prétentieux"

Charles Laughton prit très mal cette réception, et ne regagnât jamais la confiance des studios après cet échec. Si bien qu'il ne réalisera plus jamais un seul film.

Puis, la popularité du film s'est accrue auprès d'une jeune génération alors qu'il passait régulièrement à la télévision, et il fut redécouvert par les critiques dans les années 70. Roger Ebert, le plus célèbre critique de cinéma au monde, dira même qu'il s'agit de "l'un des films les plus effrayants, avec l'un des méchants les plus inoubliables, et sur ces deux points, il tient le coup... même après quatre décennies." Malheureusement, Charles Laughton mourut d'un cancer en 1962, soit avant sa réhabilitation.

Sueurs froides
8.1

Sueurs froides (1958)

Vertigo

2 h 08 min. Sortie : 12 décembre 1958 (France). Romance, Thriller, Film noir

Film de Alfred Hitchcock

Doc-Cineco a mis 8/10.

Annotation :

Aujourd'hui, "Sueurs froides" (ou Vertigo) est considéré comme l'un des meilleurs films de son réalisateur légendaire Alfred Hitchcock, et comme un pur chef-d'œuvre du thriller romantique, genre cher au réalisateur. En 2007 il fut classé septième meilleur film de tous les temps par l'American Film Institute.

Pourtant à l'époque de sa sortie, le film reçut un accueil assez froid de la part des critiques. Beaucoup ne retrouvèrent pas l'étincelle des précédents succès du réalisateur, et trouvèrent au contraire le film long et pénible, n'appréciant pas le fait que le mystère soit résolu au deux tiers du long-métrage. L'écrivain Charles Barr résuma l'accueil critique du film en Angleterre ainsi : "Sur les 28 critiques de journaux et de magazines que j'ai examinées, six sont favorables avec quelques réserves, neuf sont très mitigées et 13 presque entièrement négatives." Orson Welles n'aima pas le film, le trouvant encore plus mauvais que Fenêtre sur Cour. Hitchcock quant à lui trouva qu'il s'agissait de l'un de ses meilleurs travaux, et imputa son échec au fait que James Stewart avait 49 ans alors que Kim Novak n'en avait que 24, rendant selon lui leur relation amoureuse peu crédible aux yeux du public.

De ce fait, sans avoir été un échec commercial, le film marcha nettement moins que les précédents succès de ce cher Alfred.

Néanmoins, la qualité du film fut revue à la hausse au fil des ans. Les Cahiers du Cinéma, inconditionnel adulateurs de Hitchcock, le défendirent bec et ongle, en 1968 Robin Wood considéra qu'il s'agissait du "chef-d'œuvre d'Hitchcock à ce jour et l'un des quatre ou cinq films les plus beaux et les plus profonds que le cinéma nous ait donnés.", son arrivée sur le marché vidéo en 1984 fut accompagnée d'un grand succès commercial, et il gravit les échelons des classements du magazine Sight & Sound jusqu'à arriver premier en 2012, dépassant ainsi Citizen Kane.

La dolce vita
7.8

La dolce vita (1960)

2 h 54 min. Sortie : 11 mai 1960 (France). Comédie dramatique

Film de Federico Fellini

Doc-Cineco a mis 4/10.

Annotation :

Aujourd'hui, "La dolce vita" est considéré comme un classique du cinéma italien, et comme l'œuvre phare du cinéma de Federico Fellini aux côtés de son 8½. Ballade pharaonique de près de trois heures, il est reconnu comme ayant à lui seul marqué un tournant dans la carrière de son réalisateur et dans le cinéma italien en général, entérinant définitivement la fin du courant néoréaliste.

Pourtant à l'époque de sa sortie, le film a fait scandale en Italie. Lors de sa première, il fut jugé trop long, ennuyeux, mais surtout profondément immoral. Tellement que les spectateurs quittèrent la salle pendant la scène "d'orgie" finale (selon les mots de l'époque, parce que ça n'a rien d'une orgie) en protestant à voix haute, qu'après la fin du film les rares applaudissements étaient couverts par les sifflements, que Fellini qui était là se fit littéralement cracher dessus, et que l'acteur Marcello Mastroianni se fit insulter. Les critiques quant à elle furent très dures à son encontre, et La Dolce Vita s'est retrouvé au cœur d'un affrontement politique. D'un côté, les fascistes catholiques l'accusaient d'être un film décadent, de l'autre les gauchistes libertaires y voyaient une propagande puritaine, et ce même si la gauche était en général plus prompt à défendre le film. Même Pier Paolo Pasolini le décrivit comme un film idéologique catholique, Les catholiques intégristes boycottaient tellement le film que ce dernier passa devant le parlement italien afin que celui-ci discute de sa valeur morale. Il finit d'ailleurs par être interdit en Espagne franquiste, et au Portugal pendant dix ans.

Paradoxalement, ce vent de scandale fut très bénéfique pour la carrière en salle du film. En effet, dès le lendemain de sa première, des foules venaient le voir en masse, craignant qu'il finisse par se faire censurer et qu'ils ne puissent plus le voir. Il rapporta au final plus d'1,5 milliards de lires, faisant de lui le film italien ayant fait le plus d'entrées cette année-là.

À l'international, le film fut en revanche bien mieux accueilli. et quelques mois après sa date de sortie en Italie, il remporta ni plus ni moins que la palme d'or au festival de Cannes. Sa réhabilitation fut donc assez rapide.

Pour une poignée de dollars
7.6

Pour une poignée de dollars (1964)

Per un pugno di dollari

1 h 39 min. Sortie : 16 mars 1966 (France). Western

Film de Sergio Leone

Doc-Cineco a mis 6/10.

Annotation :

Aujourd'hui, "Pour une poignée de dollars" est reconnu comme l'un des plus grands représentants du genre du western spaghetti, comme ayant intronisé son acteur Clint Eastwood et son réalisateur Sergio Leone, et comme étant la première pierre d'une trilogie aujourd'hui légendaire, à savoir la trilogie de l'homme sans nom.

Pourtant à l'époque de sa sortie, le film fut réduit en charpie par les critiques, aussi bien dans son pays qu'à l'internationale. La raison de ce rejet étant que l'on trouvait le film parfaitement vulgaire. Florilège :
Les Cahiers du Cinéma : "Nettement supérieur à tous les autres westerns européens, ce qui ne signifie pas, tant s’en faut, que cela présente le moindre intérêt"
Positif : "Quel désert, quelle nullité !"
L'Humanité : "Ce n'est pas du cinéma, mais de la pacotille."
The Observer : "Le sadisme calculé du film serait offensant sans le rire suscité par le ridicule de tout l'exercice. Si l'on ne connaissait pas la provenance réelle du film, on devinerait qu'il s'agit d'un film privé réalisé par un groupe de riches européens fans de western dans un ranch de mecs... Pour une Poignée de dollars est visuellement immonde, a une bande-son inexistante, et est totalement dépourvu de sentiments humains."

Pour l'anecdote, la violence du film et de son personnage principal furent jugées tellement immorales que lors de la diffusion du film à la télé américaine en 1975, un prologue de presque cinq minutes avait été rajouté. Il introduisait le personnage de l'homme sans nom, et était censé justifier toute la violence dont il allait faire preuve au cours du film. Sauf que ce n'était pas Clint Eastwood qui jouait dans ce prologue, ce qui fait qu'on n'y voit jamais le visage du personnage.

Malgré toutes ces critiques assassines, le film fit un carton au box-office, rapportant plus de trois milliards de lires. Il devint ainsi le film italien le plus lucratif de l'année.

Ce ne fut qu'après les sorties de ses suites que sont ...Et Pour Quelques Dollars de Plus et Le Bon, la Brute et le Truand, qui furent bien mieux accueillies, que le film fut réévalué. Par contre même Sergio Leone et Ennio Morricone trouvaient toujours le film nul.

Les Valseuses
7.1

Les Valseuses (1974)

1 h 57 min. Sortie : 20 mars 1974. Comédie dramatique, Road movie

Film de Bertrand Blier

Doc-Cineco a mis 5/10.

Annotation :

Aujourd'hui, "Les valseuses" est considéré comme l'un des films les plus cultes de Bertrand Blier, et comme l'une des comédies les plus délicieusement provocatrices du cinéma français.

Pourtant à l'époque de sa sortie, le film s'est fait allumer par les critiques, son indécence et sa représentation du sexe ayant provoqué des réactions épidermiques. Et là je suis obligé de refaire un petit florilège des critiques qu'a essuyé le film, elles sont à mourir de rire :
Écran : "J'ai vu, pour la circonstance, d'autres films pornos, je dois dire qu'aucun ne m'a paru aussi nauséabond que les Valseuses…" "un film authentiquement nazi"
La Croix : "film d'obsédé sexuel" "décharge publique"
Roger Ebert : "Les Valseuses est vraiment une décadence cynique. C'est aussi, et ce n'est pas un hasard, le film le plus misogyne dont je me souvienne ; sa haine des femmes est palpable et embarrassante. (…) Je suis sorti des Valseuses avec le sentiment d'avoir passé deux heures en compagnie d'un cinéaste que je ne voudrais jamais rencontrer."

Cela n'empêcha pas le film de faire un carton en salle, puisqu'à la fin de son exploitation il comptabilisait plus de cinq millions d'entrées sur le territoire français. Mais bon ça ne veut pas dire grand chose, rappelez-vous que la même année sortait Emmanuelle, qui fit encore plus… comme quoi 1974 était vraiment une bonne année pour les films sexuels en France.

Puis Bertrand Blier eut la carrière qu'on lui connaît, et son deuxième long-métrage fut revu avec un regard neuf.

Shining
8.1

Shining (1980)

The Shining

1 h 59 min. Sortie : 16 octobre 1980 (France). Épouvante-Horreur, Thriller

Film de Stanley Kubrick

Doc-Cineco a mis 7/10.

Annotation :

Aujourd'hui, Shining est considéré comme une référence incontournable du film d'horreur et comme l'un des innombrables classiques de son réalisateur Stanley Kubrick.

Pourtant à l'époque de sa sortie, les critiques étaient beaucoup moins enthousiastes. Beaucoup critiquèrent la lenteur du film et l'adaptation que proposait Stanley Kubrick du best-seller de Stephen King. Florilège :
Los Angeles Time : "Que ce soit ceux qui s'attendent à un sens profond de la part de Kubrick ou ceux qui cherchent simplement à se faire peur, les deux seront tout aussi déçus.
Variety : "Kubrick a fait équipe avec l'incontrôlable Jack Nicholson pour détruire tout ce qui était si terrifiant dans le best-seller de Stephen King."
Gene Siskel : "Une déception écrasante. La plus grande surprise est qu'il ne contient pratiquement pas de sensations fortes. Compte tenu de la réputation mondiale de Kubrick, on peut supposer en première instance qu'il cherchait autre chose que des frissons avec ce film. Si c'est le cas, il est difficile de savoir quoi."
The Washington Post : "Une distillation lourde et terne du roman à succès de Stephen King, se profilant comme la grande déception de la nouvelle saison cinématographique. Je ne me souviens pas d'un film d'épouvante aussi minutieusement inefficace."
Enfin, l'avis négatif le plus notable fut sans doute celui de Stephen King lui-même, qui déplora publiquement le fait que le film s'éloigne à ce point de son roman. Il refusera d'ailleurs que son nom apparaisse au générique pour cette raison.

Cette réception poussa la Warner et Kubrick à réduire la durée du film d'une vingtaine de minutes pour son exploitation européenne. Et des six derniers films de Kubrick, il fut le premier à ne recevoir aucune nomination aux Oscars et aux Golden Globes. À la place le film fut nommé pour deux Razzie Awards à l'occasion de leur toute première édition, à savoir ceux de la pire actrice et du pire réalisateur. Après ça Kubrick ne fera plus de films pendant sept ans.

Puis, le film fut de plus en plus apprécié au fil du temps. En effet, Tim Cahill indiqua en 1987 qu'une réévaluation du film était en cours dans l'opinion générale, et le film fut sélectionné par plusieurs classements de l'American Film Institute.
Comme dirait Peter Bracke : "Shining a su renaître des cendres de sa mauvaise presse pour se redéfinir non seulement comme une œuvre fondatrice du genre, mais aussi comme le film d'horreur le plus majestueux et le plus artistique jamais réalisé.3

La Porte du paradis
7.9

La Porte du paradis (1980)

Heaven's Gate

3 h 39 min. Sortie : 22 mai 1981 (France). Drame, Western

Film de Michael Cimino

Doc-Cineco a mis 5/10.

Annotation :

Aujourd'hui, "La porte du paradis" est considéré comme une fresque majestueuse ayant réinventé le genre du western, comme l'un des meilleurs films de son auteur Michael Cimino aux côtés de Voyage au Bout de l'Enfer, et comme le film ultime du Nouvel Hollywood.
(enfin... presque. Mais on en parle après.)

Pourtant à l'époque de sa sortie, le film fut conspué au dernier degré et trainé dans la boue. En effet, l'attitude mégalomaniaque du réalisateur lors du tournage avait fait scandale, et surtout le film était considéré comme extraordinairement ennuyeux. Lors de l'avant-première, Michael Cimino demanda pourquoi personne n'était venu boire du champagne lors de l'entracte, Steven Bach lui avait répondu : "Parce qu'ils détestent le film Michael." Le New York Times résuma l'opinion générale : "Un désastre inqualifiable" "Une visite forcée de quatre heures de son propre salon." "L'échec est tel que l'on pourrait soupçonner Cimino d'avoir vendu son âme au diable pour obtenir le succès de Voyage au Bout de l'Enfer, et que le diable aurait désormais récupéré son dû."

Non seulement le film se fit assassiner par les critiques, mais il fut de surcroît l'un des plus gros échecs commerciaux de l'Histoire du cinéma. Tellement qu'il fut retiré des écrans au bout d'une semaine seulement pour ressortir huit mois plus tard dans une version de 2h30, soit plus d'une heure de moins que la version originale. Cette version fut de nouveau un échec commercial, sans même être un meilleur succès critique. Roger Ebert avait d'ailleurs dit qu'il s'agissait selon lui du "plus scandaleux gâchis cinématographique que je n'ai jamais vu, et souvenez-vous, j'ai vu La Kermesse de l'Ouest."

L'échec absolu du film provoqua même la faillite de son studio United Artists, il avait en effet coûté plus de 40 millions de dollars pour n'en rapporter que 3 millions. Ceci signant symboliquement la fin du Nouvel Hollywood. Il détruisit également la carrière de Michael Cimino, lui faisant même gagner un Razzie Award du pire réalisateur pour cinq nominations au total, dont celle du pire film.

Puis le film fut lentement réhabilité… en partie. En effet, les critiques européennes le réévaluèrent au fil du temps, et en 2012 il fut même remasterisé et remonté en une version de 3h30 à l'occasion du festival de Cannes, où il fut acclamé. Mais cette réhabilitation n'est que partielle, car aux États-Unis la plaie qu'a ouverte le film, ayant mis fin au Nouvel Hollywood, n'a pas totalement cicatrisé...

Blade Runner
7.9

Blade Runner (1982)

1 h 57 min. Sortie : 15 septembre 1982 (France). Science-fiction, Film noir, Thriller

Film de Ridley Scott

Doc-Cineco a mis 6/10.

Annotation :

Aujourd’hui, Blade Runner est considéré comme l’un des plus importants films de science-fiction de l’Histoire du cinéma, comme l’un des meilleurs films de son réalisateur Ridley Scott, comme une claque esthétique alliant à merveille le film noir et le cyberpunk, et comme l’une des réflexions les plus profondes et mélancoliques sur la notion d'être humain. En 2002 il fut classé meilleur film de science-fiction de tous les temps par le magazine Wired, en 2004 il fut classé n°1 du top 10 des meilleurs films de science-fiction suite à sondage mené auprès de 60 scientifiques, et en 2008 il fut classé vingtième meilleur film de tous les temps par le magazine Empire.

Pourtant à l’époque de sa sortie, le film divisa fortement l’opinion générale. Le film fut d’ailleurs critiqué avant même sa sortie salle, puisque les premières projections test furent désastreuses. Tellement que les producteurs prirent peur et décidèrent de sortir le film dans une version modifiée comportant une voix-off constante de Rick Deckard et un happy-end monté à partir de rushs non utilisés du film Shining, dont nous avons également parlé dans cette liste. Puis le film sortit en salle, et si beaucoup reconnurent déjà l’aspect visionnaire du long-métrage, beaucoup d’autres furent très sévères à son encontre. On trouva le film trop lent, confus, et peu divertissant. Sheila Benson du Los Angeles Time le rebaptisa même "Blade Crawler" ("crawl" signifiant "ramper"). De plus, son travail d’adaptation de la nouvelle "Les Androïdes Rêvent-ils de Moutons Électriques ?" fut jugé décevant. Le magazine Métal Hurlant dira même que Philip K. Dick est mort une seconde fois avec cette adaptation. C’est pourquoi le film fit une très faible performance au box-office, et que seules ses qualités techniques furent réellement reconnues à l’époque.

Puis le film acquit lentement un statut culte de part ses parti-pris radicaux, et il fut surtout complètement redécouvert grâce à sa director’s cut qui sortit en 1992. Une version entièrement basée sur le workprint de Ridley Scott lui-même et qui présentait enfin le film qu'il avait en tête dix ans auparavant. La VHS de cette version devint l’une des plus louées aux États-Unis, ce qui en fit plus tard l’un des premiers films à être édité en DVD. Le film devint alors le monument que l’on connaît, tellement qu’en 2007 Ridley Scott sortit une version définitive intitulée "Final Cut" dans laquelle il peaufina quelques détails, pour fêter les 25 ans de son film culte.

The Thing
8

The Thing (1982)

1 h 44 min. Sortie : 3 novembre 1982 (France). Épouvante-Horreur, Science-fiction

Film de John Carpenter

Doc-Cineco a mis 5/10.

Annotation :

Aujourd'hui, The Thing est considéré comme un chef-d'œuvre de la science-fiction horrifique aux côtés d'Alien, comme contenant parmi les meilleurs effets spéciaux de l'Histoire du cinéma, comme l'un des rares exemples de remakes supérieurs à l'original, et comme le meilleur film de John Carpenter.

Pourtant à l'époque de sa sortie, le film fut très mal accueilli. Il faut dire qu'il sortait deux semaines après le carton E.T. L'Extra-Terrestre, et que le contraste entre ces deux œuvres de rencontre alien n'a pas aidé le film, avec d'un côté la vision guillerette de Spielberg et de l'autre la vision nihiliste de Carpenter. Les personnages du film ont particulièrement été décriés, considérés comme fades et comme n'étant que de la chair à canon pour des effets sanguinolents et grand-guignol. Paradoxalement, les effets-spéciaux de Rob Bottin ont même été critiqués à cet effet : jugés comme étant certes très réalistes, mais uniquement dans un but de gore accentué et repoussant, frisant même le ridicule. Christian Niby, le réalisateur du film dont The Thing est un remake, a même déclaré : "Si vous voulez du sang, allez dans un abattoir... Dans l'ensemble, c'est une publicité formidable pour le scotch J&B." En somme, au milieu de la pléthore de films de science-fiction du début des années 80, The Thing n'était pas arrivé à sortir du lot, et ne fut considéré que comme un tentative vaine et vulgaire d'offrir du gore à foison.

Naturellement, le film fut un échec commercial, ne rapportant que 13 millions de dollars là où il en avait coûté 10 millions. Il eut même une nomination étonnante au Razzie Award de la pire musique.

Cet échec affecta gravement Carpenter, puisqu'ensuite il perdit son contrat chez Universal, ainsi que son poste de réalisateur pour le film Firestarter. Il déclara même en 2008 : "Je prends chaque échec très au sérieux. Celui que j'ai le plus mal pris, c'est pour The Thing. Ma carrière aurait été différente s'il avait été un grand succès... Le film était détesté."

Puis, le film fut réhabilité, la sensibilité du public vis à vis du gore et des œuvres nihilistes ayant évolué. Et il est aujourd'hui considéré comme l'un des meilleurs films d'horreur de tous les temps. Carpenter déplore néanmoins le fait qu'il fallut autant de temps pour qu'il trouve enfin son public.

Scarface
7.6

Scarface (1983)

2 h 50 min. Sortie : 7 mars 1984 (France). Drame, Gangster

Film de Brian De Palma

Doc-Cineco a mis 7/10.

Annotation :

Aujourd'hui, Scarface est considéré comme un classique absolu du film de gangster, son personnage principal Tony Montana est une icône de la pop culture, et il est jugé comme l'une des meilleures réalisations de Brian De Palma. En 2003, le magazine Entertainment Weekly l'a mis à la huitième place de son classement des 50 meilleurs films cultes, et en 2011 le magazine Empire l'a classé 284ème dans son top des 500 meilleurs films de tous les temps.

Pourtant à l'époque de sa sortie, les critiques étaient beaucoup moins élogieuses. Il y eut certes plusieurs personnalités pour défendre le film, et il eut même trois nominations aux Golden Globes pour meilleur acteur, meilleur acteur dans un second rôle et meilleure musique, mais l'opinion générale était plutôt négative et le film reçut même une nomination pour le Razzie Award du pire réalisateur. La raison invoquée pour cette réception étant la glorification que le film ferait de la violence, de l'obscénité, et de la drogue. Lors de l'avant-première du film, après que plusieurs personnes ait quitté la salle suite à la scène de la tronçonneuse, Martin Scorsese se tourna même vers l'acteur Steven Bauer et lui dit : "Les gars vous êtes géniaux, mais préparez-vous parce qu'ils vont le détester à Hollywood… parce que ça parle d'eux."

Néanmoins le film marcha correctement au box-office, et son personnage principal est tellement devenu une icône (notamment dans la sphère hip hop) qu'il fut réévalué au fil des ans pour devenir le film culte que nous connaissons tous aujourd'hui.

Doc-Cineco

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