Bryan Singer - Commentaires

Annotation :

Une histoire maléfique, vénéneuse, que l’on se raconte de truand à flic, de cinéaste à spectateur, et où l’on s’enfonce, où l’on se perd, avant de réaliser qu’elle n’est quelle n’est qu’un subterfuge pour entretenir des mirages et des illusions, des pièges où l’on se laisse prendre pour notre plus grand plaisir. Dans le genre désormais usé à la corde de la construction manipulatrice, toute en chausse-trappes, fausses pistes et coups de théâtres, le film se pose un peu là, et s’offre comme un commentaire fascinant sur l’art même de la mystification. Mais il vaut bien mieux : le brio incroyable du style et du montage, les sonorités hermanniennes de la bande originale, la classe de ses interprètes servent davantage qu’une jubilation pure : une certaine idée de ce que peut être un très grand polar d’aujourd’hui, racé, virtuose, subtilement tragique. Éblouissant.
Top 10 Année 1995 : http://lc.cx/UPg

Annotation :

Il y a deux camps chez les mutants , et chacun y va de sa spécificité. Mais entre celui des bons et celui des méchants, les frontières sont un peu moins étanches qu’à l’accoutumée, malgré le manichéisme primaire des antagonismes, sans doute parce que Singer ambitionne une allégorie sur l’affrontement ambigu du bien contre le mal. S’appuyant sur une thématique propre aux années soixante (la bipolarité du monde, la lutte contre le racisme et l’intolérance, le combat pour les droits civiques), le cinéaste se sort honorablement de ce blockbuster plutôt léger et élégant, qui trouve un certain équilibre entre les exigences du divertissement et les subtilités offertes par le sous-texte. Techniquement soigné, son univers manque toutefois d’un peu de chair, et peine à insuffler une véritable étoffe aux personnages.

Annotation :

Le début est particulièrement brillant, qui voit une ombre supersonique s’infiltrer dans la Maison Blanche et mettre à sac le bureau ovale en laissant des volutes d’encre noire à chacune de ses envolées. La fin est assez forte, tandis que Jean Grey, sous des rafales d’eau, met ce qui lui reste d’énergie au service des siens et se sacrifie, épuisée de ne pouvoir choisir entre deux amours. Dans l’intervalle, le programme habituel, décliné avec un savoir-faire sans accroc et assumant la logique de surenchère qu’appelle toute suite de grosse production à succès : plus de personnages (exotiques mais étrangement délavés), plus de sous-intrigues, plus de péripéties, plus d’action. L’ensemble se suit sans passion ni déplaisir, poursuivant un discours simpliste mais efficace contre les préjugés et la ségrégation raciale.

Annotation :

Normalisation de l’esthétique-bouillabaisse numérique, développements psychologiques sommaires, construction narrative à la va-comme-je-te-pousse autour d’un principe un peu crétin (même en étant regardant sur les hypothèses SF), conception et conditionnement industriels du produit, avec son lot de rebondissements attendus, de suspense téléphoné et de sentences signifiantes sur la-force-en-chacun-de-nous et le-futur-qui-n’est-jamais-écrit... L’habile artisan qu’est Singer s’amuse à projeter ses créatures dans les coulisses de la grande histoire (les années 70), donnant ainsi un peu de piment ludique à la machinerie. En bref, rien de vraiment nouveau sous le soleil du blockbuster, dont je prends des nouvelles de temps à autre : pas désagréable, plutôt distrayant, mais oublié dès la sortie de salle.