Quel jeu est véritablement Hogwarts Legacy ?


C’est tout d’abord le titre tant espéré, et jamais concrétisé jusqu’ici, qui retranscrit l’univers foisonnant d’Harry Potter dans toute sa splendeur et son enthousiasme communicatif ; dans les livres de JK Rowling, la Magie est aussi banalisée que l’électricité et les développeurs d’Avalanche Studios ont parfaitement intégrés cette composante de l’imaginaire dans leur version interactive de Poudlard : les tableaux vous saluent, jouent de la musique, s’endorment parfois ou quittent leurs portraits car ils n'ont pas que ça à faire de leur journée; les statues s’inclinent à votre passage ; l’esprit frappeur Peeves descend les escaliers en entonnant une chanson de sa voix criarde ; les autres fantômes vous adressent un signe de la main, entament une danse dans les airs ou se pourchassent éternellement à travers les murs du château ; les élèves ratent des sortilèges ou reçoivent des beuglantes qui font partager à tout le monde les remontrances de leurs parents ; bref, c’est littéralement magique et un émerveillement de chaque instant à arpenter les couloirs de l’école de sorcellerie, éveillant toutes les minutes des souvenirs, parfois lointains, de l’œuvre littéraire ; les profs sont sympas et se démarquent relativement de leurs homologues sur papier ou sur grand écran ; les élèves entament des discussions prometteuses sur leurs aspirations quant à l’année à venir et le château regorge d’énigmes inventives et de secrets à découvrir en tout genre : le jeu met de surcroît l’emphase sur la découverte de ses mystères pour le gain d’XP, de telle sorte que la découverte de ses documents est encore valorisante, d’autant qu’elle s’accompagne d’anecdotes appréciables sur l’Histoire séculaire de l’école ; bref on s’y croit à fond et difficile de tempérer son allégresse face à ce Level Design de fous furieux, la qualité de la direction artistique et la multiplicité des sorts à notre disposition : Hogwarts Legacy sera indéniablement un jeu généreux et lorsque la première visite aérienne du château s’effectue à dos de balai, avec son petit frisson qui l’accompagne, on se dit qu’effectivement le plus dur est déjà fait.


Mais Hogwarts Legacy ne cantonne malheureusement pas son action à son illustre château et ses environs ; le titre élargit considérablement sa carte par rapport aux prévisions pour faire du lieu emblématique de la saga Harry Potter le simple point de départ ou centre névralgique de l’action du jeu qui nous amènera à arpenter les contrées reculées de l’Écosse où un élève ne devrait normalement pas trop foutre les pieds. Et c’est bien là qu’un problème de conception commence bien trop rapidement à malmener notre immersion, alors même que la retranscription interactive de Poudlard mérite tous les éloges : cette aventure pâtit quasiment dès ses premières heures d’une certaine inexpérience en matière de RPG et d’un classicisme éhonté en matière de monde ouvert. Équilibrage en PLS avec une montée de niveau bien trop importante par rapport à la liberté offerte très rapidement dans le jeu, composante MetroidVania Light qui rend l’exploration souvent frustrante car les compétences adéquates pour outrepasser ses obstacles se débloquent majoritairement dans la quête principale, portes et énigmes figées artificiellement tant que les quêtes associées ne sont pas activées et bien évidemment le sempiternel Loot qui gangrène toute production occidentale qui s’évertue à ignorer les efforts de Breath Of The Wild, Elden Ring ou encore Death Stranding pour épurer les interactions dans un monde ouvert : le parfait cahier des charges du Light RPG Post The Witcher 3 est rempli avec une mécanique assez redondante d’autant que les influences ne sont pas vraiment digérées avec brio : la structure des quêtes imite clairement les péripéties de Geralt de Riv mais sans la qualité narrative et les dilemmes moraux qui caractérisaient le périple du Sorceleur ; les épreuves de Merlin évoquent les Korogus du dernier chef d’œuvre de la série des Zelda mais s’avèrent assez dispensables à accomplir puisqu’elles n’octroient qu’une capacité accrue pour notre inventaire de vêtements (autrement dit moins d’allers retours à la boutique pour se débarrasser du superflu là où le gain d’espace dans Breath Of The Wild était bien plus significatif avec le système d’armes brisables) et très vite votre carte se retrouvera constellée de tâches de mouches et d’interactions aussi rébarbatives que des devoirs à accomplir (sans même l’option de pouvoir supprimer certains indicateurs visuels dans tout ce fouillis d’icônes à l’écran). Et une première question épineuse commence alors à germer dans notre esprit : « Qu’est ce que tout ça vient foutre dans Harry Potter, au juste ? »


Harry! La putain de ta race!

Les passants vont interpellent à la première occasion, ne manquent jamais de s’étonner de votre jeunesse, pour finalement vous envoyer dans la gueule du loup, sans la moindre appréhension, pour aller démonter la tronche du troll du coin, aller décimer l’inévitable camp de bandit décuplé une cinquantaine de fois sur toute la Map ou bien aller retrouver le service à thé de leur tante perdu dans le cimetière maudit. Aucune option pour leur dire : « Écoutez, laissez la police faire son travail », les officiers du coin pouvant être clairement désignés comme les pires fainéants vus dernièrement dans un jeu (de rôle ?) et ne parlons même pas des professeurs qui vous raconteront avec plaisir leurs anecdotes personnelles, sans jamais vous mettre en garde sur les hordes d’assassins qui vous attendent à la sortie du château. Bref, tout le monde semble vivre dans sa bulle et la structure du RPG de Fantasy classique est parfaitement respectée : des donjons en veux-tu en voilà, des quêtes à profusion et du Loot car c’est important le Loot, rappelons-le. Alors moi pour être franc, un jeu qui me proposerait d’incarner un Auror patrouillant aux alentours de Poudlard pour venir en aide à la population locale, je n’aurais aucun problème avec ça ; le soucis, c’est que je suis censé incarner un élève en cinquième année, certes formidablement doué, mais que la notion de RolePlay est sacrément malmenée par cette somme d’actions tout bonnement impensable pour un étudiant encore en formation, même en songeant aux nombreuses escapades d’Harry et ses comparses dans la saga littéraire. Mais malheureusement, cette notion de RolePlay n’était clairement pas la priorité des développeurs comme nous y reviendrons assez vite.


Comment faire alors pour continuer à profiter d’un jeu clairement généreux, mais peut être un peu trop boulimique pour son propre bien ? Hé bien faire le tri tout simplement dans les interactions qui nous sont proposées ; une démarche que le joueur ne devrait normalement pas avoir à effectuer mais qui a déjà été plus d’une fois salvatrice par le passé pour apprécier les vraies qualités de certains titres englués dans leur myriade de contenu rébarbatif (Dragon Age : Inquisition en était déjà le parfait exemple pour ma part) : les quêtes de compagnons sont bien plus intéressantes que la plupart des quêtes secondaires, souvent portées par des efforts notables de mise en scène et des constructions de personnages plus approfondies ; les échos de Magie Ancienne sont bien plus significatifs pour la montée en puissance de votre personnage que tout le reste de l’aventure (jusqu’à briser complètement le challenge, même en difficile, avec les buffs appropriés), les constellations offrent des mini-jeux amusants et relativement clairsemés sur la Map et les courses de Balai occasionnent évidemment leurs petits moments d’adrénaline. C’est dommage car la taille de la Map est véritablement conséquente mais on se demande bien pourquoi autant d’efforts ont été investis dans la conception d’un monde aussi gigantesque pour qu’il soit simplement redondant à parcourir, quand tant d’autres aspects du jeu auraient mérité un plus grand approfondissement. Le titre a néanmoins le mérite de mettre en place sur le long terme une boucle de gameplay particulièrement intéressante en dissociant clairement la progression de notre héros durant la deuxième moitié du jeu : les Loots associés au craft des potions seront récoltés dans l’environnement et sur les ennemis tandis que les composants nécessaires à l’amélioration de notre équipement résulteront de notre élevage des créatures magiques ; contre toute attente, Hogwarts Legacy met en place un système de capture héritier de Pokémons qui s’avère particulièrement efficace et enchanteur : vos bestioles favorites se retrouveront ainsi dans des enclos de la Salle sur Demande, pièce emblématique de Poudlard qui bénéficie de possibilités proprement ahurissantes de personnalisation tandis que les créatures gambadent dans des lieux propres à leurs espèces respectives, avec un thème musical différent pour chaque réserve animale ; encore une fois, la générosité du jeu déborde de partout et c’est sans compter les multiples configurations possibles pour nos sortilèges en combat, avec quatre ensembles de sorts pour switcher facilement de raccourcis adéquats selon la situation, le tout pour une trentaine ( !) de pouvoirs utilisables durant les affrontements. Il y a du boulot dans ce jeu indéniablement. Mais peut être un certain manque de vision créative en amont…


Harry Potter et le Malaise des Jeunes

Pour être parfaitement honnête, ce n’est pas un écueil qui m’est apparu évident d’entrée de jeu durant ma quarantaine d’heures sur cet Hogwarts Legacy, mais au fur et à mesure de ma progression dans le titre, un sentiment désagréable, et légèrement discordant, commençait à devenir de plus en plus récurrent dans mon aventure : ma gêne face à ce que je pourrais sommairement appeler une vision extrêmement Bisounours d’Harry Potter. Votre personnage arrive directement en cinquième année et personne n’a la moindre parole désobligeante à son encontre, ou une légère moquerie de ses camarades ; tous les profs sont sympas avec vous, les élèves également et tout le récit de Poudlard baigne dans une légèreté digne des deux premiers tomes de la série littéraire. Mais Harry Potter, ce n’était pas que ça. Où sont les angoisses liées à l’adolescence ? Les inquiétudes à l’égard de la mort ? Les rivalités très fortes entre les Maisons ? Le harcèlement scolaire dont même Harry finissait par être victime, en dépit de sa popularité ? Les rapports très conflictuels avec certains adultes, et plus globalement le pouvoir en place ? Ou même ces simples incertitudes du type : « Cette fille me plaît mais je ne sais pas comment lui parler. » ? Tous ces éléments qui conféraient à Harry Potter une touchante banalité, et j’oserais l’affirmer une universalité de son propos, en dépit du caractère fantaisiste des péripéties contées. Dans Hogwarts Legacy, ces problématiques existent également mais elles sont uniquement centrées sur le personnage de Sébastian, véritable pivot émotionnel de l’aventure dont la mise en retrait progressive est particulièrement préjudiciable pour le récit tant l’adolescent tourmenté méritait un rôle d’antagoniste de premier plan ; pour le reste, le personnage incarné est complètement indifférent à ses questionnements identitaires et de ce fait peine grandement à susciter l’empathie du joueur ; nous sommes dans la pire alternative possible pour un RPG Occidental : un héros serpillière, toujours serviable mais dénué d’une véritable personnalité, sans que le joueur ne puisse malheureusement se l’approprier réellement. Et pour le reste, l’ensemble du titre baigne dans cette vision un brin timorée de Poudlard : le Directeur est juste un idiot tourné en dérision et certainement pas un tyran sadique qui mettrait les adolescents mal à l’aise, même avec une tasse de thé à la main et tous les élèves s’entendent à merveille dans le meilleur des mondes : stigmate de cet adoucissement évident du propos, les étudiants sont d’ailleurs bien plus mélangés en groupes de maisons différentes, même dans les configurations de NPC que vous croiserez régulièrement dans les couloirs. Difficile de ne pas y voir les angoisses d’une équipe probablement terrorisée par la haine grotesque que le jeu suscita dès son officialisation sur la toile (et qui ne s’avère heureusement n’être qu’un coup d’épée dans l’eau comme souvent avec les minorités bruyantes d’Internet), mais je ne pensais pas qu’une action débutant directement en cinquième année de Poudlard serait autant chargée d’une certaine mièvrerie.


Car malheureusement, en parallèle de cette vision quelque peu édulcorée du château des sorciers (pour la petite anecdote, il ne pleut même jamais dans le jeu et les décors baignent très souvent dans une atmosphère rassurante, même une fois la nuit tombée), le jeu peine grandement à dissimuler ses lacunes en matière de RolePlay et de vraisemblance de son interactivité par rapport à l’univers illustré. Le titre met en place un système jour / nuit mais qui n’est que purement cosmétique : pourquoi notre héros peut-il déambuler librement dans les couloirs du château à minuit, sans même devoir faire l’effort de dissimuler sa présence ? Pourquoi le jeu a-t-il fait l’effort admirable d’opérer un basculement visuel de Poudlard durant les périodes de Halloween et de Noël (encore une fois, chapeau aux enviros artists) alors qu’aucune quête, même secondaire, ne propose la célébration de ses évènements ? Pourquoi n’y a-t-il aucune interdiction concrète pour le joueur d’entrer dans la forêt interdite, dès le début de l’aventure ? Hé bien tout simplement car le jeu n’a mis en place aucun système pour annihiler toutes ses contradictions : pas de jauge de moralité, de réputation ou même un simple suivi de la Coupe des Quatre Maisons ; Hogwarts Legacy est un jeu doté d’une structure classique qui s’évertue autant que possible à retranscrire brillamment l’atmosphère des livres mais sans mettre en place les systèmes adéquats pour immerger le joueur dans la routine d’un élève de Poudlard. A chacun dès lors de passer outre ses paradoxes, malheureusement fréquents dans l’industrie du jeu vidéo, mais qui me paraissent d’autant plus préjudiciables qu’ils se confrontent à l’imaginaire convoyé durant cette quarantaine d’heures de jeu. Car oui, n’écoutez pas les paroles rassurantes des développeurs qui vous assurent que le titre s’étalera sur une centaine d’heures si vous vous arrêtez au moindre brin d’herbe en spammant Revelio toutes les dix secondes ; le contenu véritablement intéressant, lui, avoisine cette trentaine ou quarantaine d’heures : une durée de vie honnête mais dans la mesure où la ReplayValue est bien moindre que de nombreux RPG Occidentaux, la déception peut tout de même être de mise. Car oui, autant crever l’abcès également à ce sujet : vos décisions n’auront aucune incidence sur le déroulement du récit, que ce soit dans l’immédiat ou sur le long terme ; les choix véritablement impactants se comptent littéralement sur les doigts d’une main et votre appartenance à une Maison de Poudlard est certainement le plus important de tous ; c’est à se demander à nouveau si le jeu n’avait pas été initialement conçu comme une expérience linéaire, avant que les développeurs ne fassent demi-tour en cours de route. Un doute légitime car la fin de l’aventure témoigne hélas d’une production précipitée avec un contenu vraisemblablement conséquent enlevé en cours de route ; c’est bien dommage car la mise en place de l’intrigue principale était alléchante mais son déroulement, lui, sera bien plus conventionnel et bien loin des trésors d’inventivité que JK Rowling avait su insuffler à ses sept ouvrages.


Au fait, on peut même pas acheter de hibou dans le jeu?

Je n’ai pas envie de reprocher à Hogwarts Legacy de ne pas avoir été le jeu dont j’avais tant rêvé durant presque deux décennies. Un jeu où le calendrier scolaire aurait dicté sa cadence aux déplacements du joueur, où la moindre sortie nocturne aurait pu être synonyme de retenue ou de punition envers sa maison associée, où le choix de s’aventurer dans la Forêt Interdite n’aurait pas été anodin, où les Sortilèges Impardonnables n’auraient pas été balancés littéralement devant la figure des enseignants avec des réactions aussi évasives que « Ahlalalala, ils aiment s’amuser, ces jeunes » ; bref un jeu où je n’aurais pas eu besoin de m’accrocher à ma suspension d’incrédulité toutes les deux minutes pour me dire que j’étais bien à Poudlard. Que le Quidditch ne soit pas présent dans le jeu, honnêtement je m’en fous ; que le RolePlay soit à ce point piétiné par la structure de RPG archétypal, ça me chagrine bien plus, pour le coup.


Mais je ne veux pas non plus cracher dans la soupe de ce qui a été accompli : une retranscription exceptionnelle de l’univers Harry Potter (bien qu’un brin superficielle avec le recul) et une aventure marquée par une indéniable générosité dans le contenu proposé, même si ce dernier pâtit d’un certain manque de diversité. Durant quelques moments, lorsqu’on se surprend à s’attarder sur un portrait différent de ses semblables ou à contempler la silhouette d’un Phénix dans les cieux, la Magie opère véritablement ; Poudlard était un cadre véritablement exceptionnel qui aurait mérité une expérience bien plus condensée (et idéalement inspirée de la série des Persona mais à nouveau, je ne veux pas me répéter) et la concrétisation admirable de ce château mérite à lui seul votre considération envers ce titre ; bien qu’il ne faille peut être pas en attendre davantage. Il est malheureusement quelque peu risible que le nom de JK Rowling ait été tant dissocié de cette œuvre interactive alors que cette dernière s’efforce surtout de retranscrire son imaginaire à l’écran, au lieu d’y apporter sa propre vision créative (à la différence d’un Star Wars : Kotor bien plus illustre) ; ce sont les nombreux souvenirs associés à ces formidables aventures littéraires qui élèvent la sympathie envers cet Hogwarts Legacy, bien plus que le périple qu’il s’efforcera plus ou moins maladroitement de nous conter. C’est sans nul doute la création la plus importante pour l’univers d’Harry Potter de cette dernière décennie (peu gâtée par les derniers longs métrages) ; mais à nouveau, vous pourrez entonner ce sempiternel refrain : les livres étaient meilleurs.

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le 18 févr. 2023

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