Avez vous déjà entendu dire que "le tout est plus que la somme de ses parties" ? Eh bien c'est tout le contraire pour Assassin's Creed. Je crois que je devrais commencer par préciser que, comme la plupart de mes critiques, il s'agira plus d'une sorte de réflexion sur mon expérience de jeu qu'un guide d'achat. Suivant cette prémisse, j'évoquerais donc certains moments clés de l'histoire, mais ne fuyez pas ! Je tenterais de ne pas être trop explicite, et de toute façon si je puis me le permettre (et comme ça je tente de gagner quelques lecteurs supplémentaires) le scénario est vraiment très maigre, ne présentant finalement que peu d'intérêt.

Car finalement, le goût qui perdure en fin de partie est celui d'un énorme potentiel gâché. En effet, lorsqu'Assassin's Creed 3 commence vraiment (si il y a encore quelqu'un qui ne le sait pas, le jeu a une intro de 5 heures) on ne peut qu'être émerveillé, de un par les graphismes pétillants, mais aussi par tout ce que le vaste monde offre à faire, en plus du contexte de la Révolution Américaine qui charme. C'est dans cet univers que s'inscrivent des personnages qui s'annoncent charismatiques et également une trame paraissant intéressante qui dilue véritablement la frontière entre le bien et le mal.
Le problème est que plus l'on jouera, plus on se rendra compte que toutes ces belles promesses ne sont qu'illusoires, et que ce qui est censé monter en intensité ne devient que de plus en plus fade. Le cadre de la guerre et de la révolution est ainsi très mal exploité. Les personnages finissent par se montrer très vides, inconsistants (mis à part Haytham Kenway qui brille lors de ses collaborations avec Connor). On pourra prendre l'exemple du grand méchant Charles Lee qui n'apparait quasiment pas pendant tout le jeu (rabaissant ainsi le génie de Haytham au rôle de sous-fifre) et lorsqu'il daigne à se montrer ne fait qu'un ou deux trucs pour montrer à quel point il est vil, actions qui en toute honnêteté tombent à plat. Il en va de même, pour citer un autre exemple, du meilleur ami de Connor, qui est sujet à une séquence qui se veut émouvante, mais où l'on ne sent rien car le personnage n'a pas du tout été travaillé, et en toute simplicité : on s'en fiche. On aura même l'impression que le jeu a fini par être bâclé, les chapitres se faisant de plus en plus courts et donnant finalement l'impression que tout est expédié. Sentiment d'autant plus renforcé que le jeu ne propose aucune sorte de conclusion satisfaisante.

C'est finalement le fantôme de la série qui vient hanter cette itération : Il s'agit du problème de la lassitude et de la répétitivité. Il faudra tôt ou tard que les créateurs comprennent que même si l'on balance 100 activités différentes au joueur, ça ne servira à rien si il s'agit de tâches toutes bêtes. Et comment faire pour éviter que ces tâches soient toutes bêtes ? Il suffit d'investir le joueur en essayant de rendre chaque chose qu'il fait significative, essayer de donner un poids à ses actions. Mais c'est raté de ce point de vu là, et autant dans les quêtes annexes que dans les quêtes principales. On pourra prendre pour exemple le concept de chasser des bêtes dans la forêt qui en soit est alléchant, mais en voyant qu'il est très restreint et qu'on finit par toujours rencontrer les mêmes animaux, on termine plutôt par le voir comme un pâle imitation de ce qui se fait dans Red Dead Redemption. Le sentiment de lassitude passe également par une interactivité réduite : Oui il y a plus de choses à faire, mais il faut aussi considérer la manière dont on les fait. Dans ce cas ci, on remarque une simplification du gameplay qui passe par l'expédition radicale du système "High Profile" et "Low profile", limitant les manières d'agir, le tout dissimulé sous les mots "c'est plus intuitif comme ça".
Tout ceci est d'autant plus frustrant du fait que je prends position en tant que fan de l'opus mal-aimé Revelations, qui lui faisait part d'une maîtrise et d'un soin incroyable dans chaque chose qu'il proposait au joueur de faire, sachant l'investir et donner du sens à chaque quête.

Je suppose que c'est pour combler ce manque, cette répétitivité maintes fois reprochée à la saga, qu'Ubisoft a essayé de miser sur une approche spectaculaire d'action à tout-va. Bien évidemment, il s'agit d'une stratégie cherchant à attirer le plus grand public sur ce qui fut un des gros jeux de fin d'année, mais c'est à partir de là que je prends mon appui pour réfléchir sur LA nouvelle grande saga du jeu vidéo.
Malheureusement, la série n'a jamais touché au niveau de l'excellence, j'ai toujours eu de gros reproches à lui faire (dans un langage plus basique, aucun épisode ne mérite un 9). Dans un Assassin's Creed il y a toujours du très bon comme du très mauvais. Alors qu'auparavant, l'aspect "tueur silencieux à la classe phénoménale" était plus mis en avant, cette fois ci c'est "guerrier bruyant et badass". Ce constat est visible sur plusieurs points, les jaquettes par exemple, ou même dans le marketing du jeu : avant la lame cachée était l'arme de prédilection, silencieuse, froide, cool et efficace, c'est maintenant sur le tomahawk féroce, agressif et sauvage que se pose l'éclairage dans les différents trailers et autres présentations de Connor.
On se retrouve donc dans le jeu avec des moments spectaculaires, des explosions, de l'action. En théorie je n'ai absolument aucun problème avec cette approche. La "Unchartedisation" opérée depuis l'opus Brotherhood ne sied pas trop mal à la série, on sent toujours le potentiel, ça pourrait marcher. Il est bon de varier et de nous offrir pour une fois un jeu plus straightforward, plus épique, plus intense, ce qui va en harmonie avec son héros : impulsif, jeune, sauvage. Ainsi, bien que Connor soit un grimpeur hors-pair et soit attribué de l'ancestrale lame cachée, le jeu nous poussera plutôt a nous frayer un chemin en accumulant les cadavres ennemis trucidés à la hachette en combat.
Tout ça avait l'air plutôt alléchant sur papier mais un problème se trouve enraciné dans le coeur même de la saga : Assassin's Creed ne sait pas faire de l'action. Les phases d'action de cette saga ont été et restent moisies. On garde ainsi plus en mémoire de se faufiler en courant sur les toits, avec quelques assassinats par ci et par là avant de trouver sa proie et l'achever avec une impressionnante air assassination, que les combats. Et c'est là que faute Assassin's Creed 3. Les villes sont plus des villages que des villes, et dans ces villages les toits sont difficiles et surtout pénibles à parcourir. Connor est un personnage au sang chaud, et le joueur finit par ne plus retrouver ce qui fait la force de la saga, mais à être un dommage collatéral de la lutte entre Ubisoft et son système de combat. On a en effet l'impression que les développeurs ont cru avoir complètement arrangé les moments guerriers de la saga (toujours critiqués) et en ont donc rajouté pleins. Mais non, c'est toujours aussi ennuyeux et mal foutu. Le combat d'Assassin's Creed, bien que rajoutant quelques alternatives agréables, reste dans son essence, dans sa nature même, très ennuyeux. On finit donc par regretter ces chers moments passés avec Ezio sur les toits de Florence, à courir comme des ombres. Il en va de même pour les "moments spectaculaires" à la Uncharted qui pourraient être bien sympas mais qui ne donnent pas le sentiment d'urgence et d'adrénaline, peut être parce que le héros est trop infaillible, trop expert dans ses mouvements, peut être parce que la plateforme est trop automatisée.
Je ne sais pas. Mais je sais que les créateurs ont eu la terrible idée d'effacer l'assassin silencieux et classieux pour amener le guerrier supposément fougueux, et se sont ainsi condamnés. Oublier sa force pour rajouter sur des défauts, non merci Ubi.
En conséquence, et par le chemin évident que suivront les prochains épisodes de la saga (ça se voit déjà avec Black Flag), je conseille vivement aux développeurs d'apprendre à concocter une formule d'action qui marche, qui fasse sentir autre chose que de l'ennui au joueur.
Pour moi, Assassin's Creed 3 restera un titre exemplaire de potentiel énorme incroyablement perdu. Dommage.
Vagabond
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le 3 mars 2013

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