Yelling to the sky porte un regard incisif sur une Amérique difficile. Il n'expose pas là une vulgaire guerre de gang, mais opte plutôt pour un schéma beaucoup plus complexe. Si conflit il y a, il s'agit de la bataille qu'engagent les personnages avec eux-mêmes. Bien que cet affrontement découle d'un contexte social épineux, le film porte davantage l'accent sur l'individualité en tant que tel. Nés alors des personnages ambigus : ni bons, ni mauvais. Souvent l'un et l'autre. Ils cherchent leur place dans un milieu difficile où peu de personnes leurs laissent une chance. Peut-il y avoir ne serait-ce qu'une esquisse d'espoir dans cette société américaine ? Les réponses sont parfois apportées par l'image comme celle du drapeau emblématique de ces nations hachurée par des fils électriques, symbole d'une société industrialisée et renfermée. Où est le rêve américain ? La présentation des films du festival de Deauville semble répondre unanimement qu'il n'y en a pas, ou du moins, plus vraiment.

Pourtant, Yelling to the sky trébuche. Ces personnages nous échappent complètement. Nous ne les aimons pas. Nous ne les détestons pas. A force de complexité, une trop grande distance s'installe entre les personnages et le spectateur. Tantôt le père nous apparaît comme un homme violent et lunatique, tantôt son regard trahit sa gentillesse. Un des professeurs du lycée révèlera certains vices sans pour autant négliger l'attention qu'il porte à ses élèves. Enfin, le personnage sur lequel le film porte le plus d'attention est initialement une victime avant de renaître par la violence. Dans ce cadre là, il est difficile de choisir entre l'attachement ou le mépris que nous pouvons ressentir envers un personnage. A quoi se raccrocher alors ?

Le sujet se veut fort mais le film n'atteint pas son objectif. De la retenue, oui. C'est avec pudeur que nous apprenons le décès du frère de Gordon O'Hara (Jason Clarke). Nous n'entendrons pas la réponse de Sweetness O'Hara (Zoë Kravitz) à la demande du professeur : « Si tu as des questions, vas-y. ». Cette démarche est intéressante : le film ne s'attarde pas sur le Passé pourtant la cause de tout. Ce qui importe ici c'est le présent abordé par le silence. L'avenir ? La question se pose difficilement. Les personnages ne semblent pas y croire eux même. Ce futur semble n'exister qu'à travers la fuite. La sœur s'échappe du foyer familial mais finalement réitère le même schéma avec un mari violent.

Fuir grâce à la drogue. Fuir en fac peut-être ?

Certes cette réserve aurait pu être un atout majeur, mais qui est ici relativement mal maîtrisé et qui nous impose des longueurs et un certain ennui. Yelling to the sky risque fort de devenir un film que nous oublierons d'ici quelques mois.
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le 19 sept. 2011

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