Brigate rosse

L'action du film de John Frankenheimer sorti en 1991 se passe en Italie vers 1978, dans ces années dites "de plomb" où les pays européens de l'Ouest voyaient fleurir tous ces mouvements terroristes, brigades rouges (I), fraction armée rouge (RFA), Action directe (F), etc …

Le sujet est donc suffisamment intéressant pour, postérieurement, que le cinéma y apporte un œil critique ou a minima un décryptage.

Sauf que là, le film est monté façon thriller. Vu sous un angle américain. Un journaliste américain (Andrew McCarthy) est envoyé à Rome pour couvrir ces évènements terroristes avec un objectif personnel qui est d'en tirer un bouquin. Dans le même temps, une photographe intrépide et free-lance se démène, par tous les moyens possibles, pour se trouver au centre de l'évènement et en tirer la bonne photo choc, le scoop … Sharon Stone … Et quand je dis par tous les moyens, c'est bien par tous les moyens, n'est-ce pas …

Si on compte sur le film pour tenter de comprendre ce qu'il se passe, alors il vaut mieux passer son chemin. Au mieux, on comprend que tous les milieux de la société sont gangrénés par le phénomène. On découvre que c'est loin de n'être qu'un mouvement de jeunes gens ou d'étudiants désespérés par l'avenir et la société pourrie. Il y en a, certes, pour constituer les bataillons qui vont au feu ou dans les manifs mais les chefs (ceux qui tirent les ficelles) sont des gens bien établis dont le but semble de faire bouger les lignes (pour renverser l'État et prendre la place toute chaude). Je n'en sais strictement rien car le film est plutôt muet sur le sujet. C'est juste un peu ce qu'on peut déduire à voir la dégaine des gens montrés par le film.

Ce qui m'a le plus gêné, ce sont les incohérences scénaristiques qui décrédibilisent les personnages. Comme par exemple, la nana qui se pointe dans une manif ultra-violente (Sharon Stone, toujours elle) et qui prend des photos sans trop de précautions sans qu'il lui arrive des bricoles, ça fait vraiment très louche. Dans le plus mauvais manuel du parfait manifestant insurrectionnel, il est écrit en toutes lettres qu'il faut commencer par détruire tout ce qui s'apparente à un appareil photo (et le journaliste, si possible)… Sans oublier que les deux américains sont à l'épreuve des balles, qu'ils parviennent à s'enfuir (à pied) sans problème dans une ville qu'ils ne connaissent pas a priori alors que ces cons de terroristes juchés sur des scooters très mobiles ne sont pas foutus de les retrouver… D'ailleurs, on peut se poser des questions sur leur aptitude à tirer convenablement.

En ce qui concerne le casting, Andrew McCarthy qui interprète le journaliste américain fait le job sans génie et Sharon Stone joue avec un peu trop de frénésie pour être vraiment crédible.

Finalement, c'est Valeria Golino qui interprète un rôle beaucoup plus complexe et convaincant de femme bourgeoise, dans une liaison compliquée avec le journaliste qui tire vraiment son épingle du jeu.

Au final, c'est un film qui se laisse bien regarder comme on regarderait un thriller qui se déroule dans des coins de Rome plutôt sordides (pour faire couleur locale). D'ailleurs, je me faisais la réflexion pendant le visionnage qu'il suffisait de changer les noms italiens des personnages en des noms irlandais et on avait exactement le même film sur l'IRA à Belfast.

En bref, c'est un film bien trop schématique pour être considéré comme un bon film. Même la scène finale constitue une chute décevante dont on ne tire rien de bien concret.