Bad Pitre

Wrinkles The Clown est un documentaire qui revient sur l'incroyable histoire d'une vidéo Youtube devenue virale et qui finira par entraîner la naissance d'une quasiment légende urbaine aux multiples répercussions. Le film documentaire de Michael Beach Nichols revient donc sur cette histoire à travers un entretien avec l'homme derrière le masque et surtout avec une mécanique narrative passionnante qui ne cessera d'interroger le spectateur en dressant les contours de ces nouvelles peurs nourries et phagocytées par les réseaux sociaux.

A l'origine de tout il y a une donc vidéo qui façon caméra de surveillance nocturne montre un clown sortir de sous le lit une jeune petite fille endormie pour l'observer de manière inquiétante, ensuite un stickers avec le portrait de ce clown et un numéro de téléphone fera son apparition promettant aux parents qui rencontrent des problèmes de discipline avec leurs enfants que Wrinkles le clown viendra pour leur donner une bonne leçon en les terrorisant.

Le film nous embarque donc en Floride à la rencontre de ce clown qui contre quelques dollars promet de venir foutre une peur monumentale aux sales gosse indisciplinés qui n'écoutent pas leurs parents. Le film permet d'entendre de nombreux messages téléphoniques de parents qui appellent de leurs vœux pour que Wrinkles vienne terroriser, voir carrément manger leurs enfants tandis que l'on entend derrière ces douces paroles des gosses pleurer, hurler et supplier de ne pas faire ça. La peur du Père Fouettard façon Pennywise de Stephen King engendre d'emblée un certain malaise tant on se demande lesquels entre les sales gosses turbulents, le pitre sans scrupule ou les parents inconscients d'offrir à leurs gosses 10 ans d'une future psychanalyse lesquels sont réellement les plus monstrueux.

Le film s'interroge également sur la manière dont ces vidéos virales finissent par engendrer de véritables légendes urbaines à mesure que chacun et chacune s'en empare et y apporte de nouvelles pierres pour construire l'édifice d'une mythologie mutante et façonnée par ce besoin irrationnel de se faire peur. Le répondeur de Wrinkles le clown ne servira bientôt plus uniquement à des parents désespérés mais aussi à des admirateurs de tout âge y compris des gamins et des détracteurs insultant et menaçant de mort le spectre du clown maléfique. Le phénomène finira par s'inviter dans les networks et les talk show américains pour finir de façonner totalement le mythe. Plus inquiétant encore c'est sans doute partiellement de cette vidéo et de Wrinkles le clown que va naître en 2016 cette vague de clowns maléfiques avec des personnes qui par mimétisme, par défi ludique absurde, par soif de reconnaissance vont s'amuser sous des costumes de pitres grotesques à effrayer et même agresser des enfants et des adolescents .

Par une jolie pirouette narrative qui survient au deux tiers du film Wrinkles The Clown nous interroge sur notre propre perception des événements et de ce que l'on nous donne à voir et croire. D'un seul coup le spectateur se verra invité à tout remettre en question et à s'interroger sur ce qui fait partie du réel, du fantasme, de la fabulation et de l'imaginaire dans toutes ses histoires qui naissent parfois d'une simple vidéo en forme le canular effrayant. Qui est véritablement Wrinkles le clown, une simple légende, une réalité boursoufflée de mensonges, un authentique boogeyman 2.0 ? Bien malin celui qui pourra répondre à toutes ces questions tant le film nous rappelle qu'à la manière des rumeurs et des récits fantastiques d'autrefois les légendes urbaines actuelles se nourrissent de millions de vues et d'autant d'esprit prompt à s'enflammer dans l'imaginaire. Wrinkles censé au départ effrayer les gosses finira même par devenir un modéle iconique pour certains d'entre eux.

Wrinkles The Clown et un très bon petit documentaire qui vous fera vous interroger sur notre époque, sur nos peurs, sur l'abandon de l'autorité parentale, sur la notion de châtiment, et surtout sur les esprits malléables gavés passivement de vidéos YouTube, Tik Tok et compagnie.