Quand le conte merveilleux se transforme en un cauchemar bien réel


Au coeur de la Forêt des Rêves Bleus, un jeune garçon du nom de Jean-Christophe rencontra de jeunes créatures des plus étranges. Des êtres hybrides, que d'autres auraient considérés comme des abominations. Les créatures se présentèrent comme Maître Hibou, Coco Lapin, Bourriquet, Porcinet, sans oublier, bien sûr, Winnie l'Ourson. L'enfant naif qu'il était ne tint pas compte du danger et il se lia d'amitié avec eux. Il leur apportait à manger, et chaque jour passé ensemble renforçait leur camaraderie. Les jours et les années passèrent, et avec les années vint la maturité. Jean-Christophe dut se résoudre avec douleur, à quitter ses amis pour partir à l'université et devenir médecin. Ils allaient devoir réapprendre à se débrouiller seuls...




La forêt des Rêves Bleus ne vous sauvera pas



"Winnie l'Ourson : Du sang et du miel" se présente comme un film d'épouvante indépendant venu d'Angleterre, écrit et réalisé par Rhys Frake-Waterfield, qui explore une approche tout à fait folle, mais incroyablement novatrice et audacieuse, en revisitant de manière gore et effroyable les ouvrages d'Alan Alexander Milne et d'Ernest Howard Shepard sur le personnage de Winnie l'ourson. Cette adaptation sans pitié met en scène Winnie l'ourson et Porcinet sous un nouveau jour, en tant que dévoreurs de chair humaine, avides et impitoyables, tandis que Jean Christophe devient leur malheureuse victime. Le concept à l'origine de ce film est tout simplement fantastique sur le papier, car il ose mélanger une icône chérie de l'enfance avec une approche décalée. Un projet puisant son inspiration dans un studio bien connu pour son engagement en faveur de prises de paroles inclusives, idéologiques et politiques, malheureusement souvent au détriment du divertissement lui-même, comme vous l'aurez deviné : Disney. Mais ici, toutes ces conventions sont joyeusement balayées pour revenir à l'essence même du divertissement. Cette contre-proposition a le mérite d'exister et offre une alternative véritablement captivante, que l'on soit adepte des programmes de Mickey ou non. C'est un souffle rafraîchissant qui ne manquera pas de susciter l'intérêt.


Il faut reconnaître que malgré toute cette admirable volonté, le film présente plusieurs problématiques, tant sur le fond que sur la forme. Cependant, il est important de rappeler que ces difficultés sont en grande partie liées au manque de budget et de temps de tournage. En effet, "Winnie l'Ourson : Du sang et du miel" est l'œuvre de Jagged Edge Productions, un petit studio spécialisé dans l'horreur fondé en 2020 par Scott Jeffrey et Rhys Frake-Waterfielden. Avec un budget limité à seulement 100 000 dollars et un tournage qui s'est déroulé en seulement dix jours, le défi était de taille. Cependant, malgré ces contraintes, ce long-métrage se présente comme un véritable petit miracle. Il est tout à fait remarquable de voir une telle proposition prendre forme avec des ressources aussi modestes, un calendrier si restreint, le tout orchestré par un studio encore jeune et financièrement limité, créé il y a à peine trois ans, et porté par un réalisateur novice. Soyons honnêtes, une telle réussite était tout simplement inespérée ! Cela démontre l'incroyable détermination et le talent de l'équipe impliquée dans ce projet, qui a su transcender les obstacles pour offrir au public cette œuvre unique en son genre.


Alors, oui, ce long-métrage souffre d'un budget limité et présente certaines problématiques, mais il est essentiel de souligner son incroyable succès au box-office. Grâce à cette réussite, une suite est prévue (et j'attends avec impatience de la découvrir), où le studio investira davantage de ressources et prendra le temps nécessaire pour peaufiner le projet. C'est là que naissent les premières pierres d'une future saga qui "pourrait" devenir véritablement géniale dans les années à venir, ce qui justifie mon attitude particulièrement compréhensive envers cette proposition. De plus, le studio a annoncé deux autres titres d'horreur qui pourraient être passionnants, "Bambi: The Reckoning" et "Peter Pan's Neverland Nightmare", adaptés du roman "Bambi, l'histoire d'une vie dans les bois" de l'auteur Felix Salten, et de "Peter Pan" apparu pour la première fois dans le roman "Le Petit Oiseau blanc" de l'auteur J. M. Barrie. Deux œuvres littéraires que le studio Disney a su transformer en des adaptations animées emblématiques, les propulsant ainsi dans la mémoire collective du grand public, et que Jagged Edge Productions compte bien exploiter à son tour à travers un univers partagé. Deux projets qui auront pour but de s'inscrire dans une même franchise, avec une continuité commune et la possibilité de crossovers. Une idée formidable qui pourrait devenir une véritable mine d'or pour le studio. Il est donc très probable que les suites soient de meilleures qualités, et je serai certainement plus exigeant envers celles-ci. En attendant, je salue chaleureusement ce nouvel univers qui s'annonce prometteur.



...L'hiver s'installa. Les nuits étaient glaciales, la terre stérile n'offrait rien à se mettre sous la dent. Par une nuit fatidique, la famine devenant insupportable, Winnie décida que, pour survivre, le groupe devait se nourrir de l'un de leurs chers amis. Ainsi, Bourriquet ne fut plus...



Bon c'est bien beau tout ça, mais que vaut Winnie l'Ourson : Du sang et du miel ! Rhys Frake-Waterfield, qui assure également l'écriture du scénario, nous propose un film se définissant comme un slasher, qui, malgré son originalité dans l'approche, conserve une certaine conventionnalité. L'histoire est plutôt simple, mais elle a le mérite de nous plonger efficacement dans le vif du sujet dès le départ, grâce à une introduction animée captivante qui accroche immédiatement le spectateur. Lorsque Jean Christophe part poursuivre ses études, la joyeuse bande composée de Maître Hibou, Coco Lapin, Bourriquet, Porcinet et Winnie l'ourson se retrouve livrée à elle-même dans la forêt des Rêves Bleus. Ce qui aurait pu être une simple aventure devient rapidement un cauchemar, les entraînant dans une spirale de régression violente, les plongeant dans un état primaire et terrifiant. Au retour de Jean Christophe, des années plus tard, désireux de présenter sa tendre bien-aimée à ses anciens amis, il se trouve confronté à une série d'exécutions barbares orchestrées par Porcinet et Winnie, désormais devenus de redoutables bourreaux.


Malgré un manque d'originalité flagrant, les meurtres s'enchaînent rapidement avec un rythme haletant, ne laissant aucun répit pour l'ennui. Le carnage meurtrier aurait cependant gagné à être encore plus délirant. Malgré cette débauche de violence, le récit parvient à offrir une bonne dose de drame entre Jean Christophe et Winnie, qui se révèle captivant. La réalisation est plutôt bien faite, bien que les différents plans manquent parfois d'audace. La photographie de Vince Knight s'avère efficace, notamment dans la représentation de la forêt des Rêves Bleus. Les décors, provenant de la forêt d'Ashdown elle-même, dans le Sussex de l'Est, en Angleterre, qui ont servi de décor à la série de livres originale, offrent un clin d'œil très intéressant. Ce cadre excellent aurait mérité d'être davantage exploré, mais il livre néanmoins quelques décors intéressants à travers un labyrinthe de bois. Les masques utilisés pour Winnie et Porcinet sont déstabilisants. J'apprécie le côté malsain qu'ils dégagent, cependant, ils manquent d'élasticité, ce qui les rend parfois artificiels et moins réalistes.


Le casting ne brille pas vraiment par son excellence ! Que ce soit Amber Doig-Thorne, Maria Taylor, Danielle Ronald, Natasha Tosini, May Kelly, Paula Coiz, Natasha Rose Mills, ou encore Nikolai Leon... tout le monde semble surjouer ! Nikolai Leon, dans le rôle de Jean-Christophe, s'en sort un peu mieux, mais cela reste mitigé. Au moins, on rit plus des sous-performances qu'on ne s'agace, ce qui est déjà plutôt positif, je dirais. La composition musicale d'Andrew Scott Bell, sans être mémorable offre quelques titres intéressants. Quant au final, il réserve quelques surprises, tantôt positives avec des morts inattendues de certains personnages, tantôt négatives avec une coupure brutale qui prend le spectateur au dépourvu, laissant clairement entendre qu'il faudra regarder la suite pour connaître la fin. Cette suite devrait probablement réunir Maître Hibou et Coco Lapin, des personnages que l'on n'a pas encore eu la chance de voir. Par contre, où est passé Tigrou ! En attendant, on est sûr de retrouver notre cher et tendre Winnie qui en a pas encore terminé avec nous !



CONCLUSION :



Avec "Winnie l'Ourson : Du sang et du miel", on découvre une tentative audacieuse de revisiter l'univers bien connu de Winnie l'ourson d'une manière horrifique et originale. Malgré un budget limité et des contraintes de tournage, le film parvient à captiver grâce à son rythme haletant et à certaines idées intrigantes. Cependant, des aspects tels que le surjeu dans le casting, les meurtres sans grandes originalités et les masques utilisés pour Winnie et Porcinet peuvent décevoir. Malgré ces défauts, le film offre des moments surprenants et inattendus, notamment dans son final, qui laisse présager une suite prometteuse. Un spectacle offrant à la fois des éléments intéressants et des imperfections. Ce qu'il faut surtout retenir, c'est que le succès inattendu de cette proposition pourrait marquer le début d'une aventure plus ambitieuse, où les ressources financières et le temps seront mieux investis. Hâte de découvrir cela.


La relecture de ce classique de l'enfance dévoile un univers sombre et dérangeant, ouvrant ainsi la voie à de nouvelles possibilités narratives qu'il va falloir concrétiser. Un diamant brut qui ne demande qu'à être taillé.



...Le traumatisme de cette nuit hanta leurs esprits. Ils devinrent sauvages et développèrent une haine sans nom contre toute chose humaine, tout particulièrement contre Jean-Christophe qui les avait abandonnés. Ils passèrent un pacte. Ils renoncèrent à leur humanité et retournèrent à leur bestialité originelle, jurant de ne plus jamais parler.


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le 26 juil. 2023

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