Vita & Virginia aimerait faire dialoguer le siècle des deux femmes de lettres avec le nôtre, de la même façon qu’Orlando (Sally Potter, 1992) s’emparait du roman de même nom de Virginia Woolf pour articuler les époques historiques et remonter jusqu’à la fin du XXe siècle : la musique mêle sonorités électroniques et orchestre classique, le fantastique s’invite lors de brèves scènes à mi-chemin entre le rêve et la réalité, les deux actrices s’entretiennent directement avec le spectateur pour lire à voix haute leur correspondance, par ailleurs magnifique. C’est dire que le long métrage de Chanya Button travaille l’anachronisme, ainsi que l’œuvre littéraire Orlando, tout droit inspirée de la relation peinte dans le présent film, composait un personnage qui traversait les âges sans vieillir.


Pourtant, un problème sous-tend son édifice : il ne réussit jamais à tirer de ses situations ou de son imagerie, lisse et artificielle, une passion véritable qui puisse nous ravir. La froideur tonale adoptée par Vita & Virginia perpétue la représentation d’une Woolf antipathique et distante, construite par ses lettres, ses œuvres et certains témoignages de ses proches, sans oser l’aborder sous un jour nouveau et ainsi rendre justice, par exemple, à la malice qui caractérisera le narrateur du roman à venir ; ou s’il fallait confronter deux énergies opposées, encore eût-il fallu jouer sur les contrastes, accentuer le trait. Arrimé à la lettre de la correspondance épistolaire, accroché à la plume ou aux touches de la machine à écrire, le film manque l’esprit et se contente d’illustrer platement la relation unissant Virginia Woolf et Vita Sackville-West.


Fort heureusement, les deux actrices choisies pour les interpréter (Elizabeth Debicki et Gemma Arterton) s’avèrent talentueuses et compensent, un temps, l’absence de vision et de mise en scène personnelles.

Créée

le 6 mars 2021

Critique lue 215 fois

6 j'aime

Critique lue 215 fois

6

D'autres avis sur Vita & Virginia

Vita & Virginia
Fêtons_le_cinéma
4

Peurs et fantasmes

Vita & Virginia aimerait faire dialoguer le siècle des deux femmes de lettres avec le nôtre, de la même façon qu’Orlando (Sally Potter, 1992) s’emparait du roman de même nom de Virginia Woolf...

le 6 mars 2021

6 j'aime

Vita & Virginia
HorsebackRevenge
7

Critique de Vita & Virginia par HorsebackRevenge

J'ai failli m'enfuir de la salle en courant quand après seulement 30 petites minutes, je me suis aperçu que les lettres de chacune prenaient bien trop d'importance dans ce qui doit rester du cinéma...

le 11 juil. 2019

5 j'aime

Vita & Virginia
constancepillerault
5

Critique de Vita & Virginia par constancepillerault

Un film à la réalisation élégante (beaux décors, reconstitution impeccable), mais qui peine à convaincre. D'un tel sujet, avec de tels personnages, on attendait de la fougue, de la passion. Ca reste...

le 5 avr. 2021

2 j'aime

Du même critique

Sex Education
Fêtons_le_cinéma
3

L'Ecole Netflix

Il est une scène dans le sixième épisode où Maeve retrouve le pull de son ami Otis et le respire tendrement ; nous, spectateurs, savons qu’il s’agit du pull d’Otis prêté quelques minutes plus tôt ;...

le 19 janv. 2019

86 j'aime

17

Ça - Chapitre 2
Fêtons_le_cinéma
5

Résoudre la peur (ô malheur !)

Ça : Chapitre 2 se heurte à trois écueils qui l’empêchent d’atteindre la puissance traumatique espérée. Le premier dommage réside dans le refus de voir ses protagonistes principaux grandir, au point...

le 11 sept. 2019

77 j'aime

14