Un silence ennuyeux
Le sujet, grave et douloureux, de la pédophilie et de la pédopornographie, est saboté par un montage confus, surtout au début, un scénario mal construit qui ne développe pas assez le personnage...
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le 5 janv. 2024
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Autour d’une dialectique dedans / dehors, matérialisée par le portail de la maison, l’ordinateur sans mot de passe ou encore les portes non fermées à clé, Joachim Lafosse interroge la place du regard extérieur sur l’intériorité, entre violation de la sphère de la vie familiale et nécessité de justice, protection du secret et révélations publiques, besoin d’information et profanation du privé, plaisir personnel et curiosité malsaine, droit à l’intimité et illégalité de l’intime.
La scène d’exposition met en scène un silence et introduit d’emblée le titre plus qu’il ne l’explicite. Emmanuelle Devos, interrogée : par qui ? On l’ignore. Au sujet de quoi ? On ne le sait pas vraiment, si ce n’est que son fils est mêlé à l’histoire. Où ? Dans un bureau, vu en plan serré. Que répond-elle ? Guère plus que des silences, qui traduisent, on le sait tout de suite, un secret, lourd de conséquences, qu’elle veut préserver pour le bien de quelqu’un (le sien ? Celui de son fils ? On ne peut que faire des suppositions). Lafosse prend le pari de maintenir le secret chez le spectateur qui pendant près de la moitié du film ne saisit que très partiellement ce dont il s’agit, si bien qu’il erre dans le film, ne percevant que des bribes de réalité, comme un complexe puzzle aux nombreux acteurs et au sujet trop vague qu’il lui faut reconstituer tant bien que mal.
Puis la glace se fend et le mal s’épanche. Le spectateur découvre progressivement ce qui se tait au sein de cette famille aisée et dont l’unité précaire est menacée par un innommable tabou. Le cas abordé est directement inspiré de l’avocat Victor Hissel mais il rappelle d’autres affaires ayant fait les unes des journaux récemment (celle d’Olivier Duhamel par exemple).
Joachim Lafosse ne craint jamais de mettre les pieds dans le plat, comme il l’a démontré dans L’économie du couple ou Les intranquilles dans lesquels le conflit familial tient une place centrale. Or si les cris et hurlements y constituent la forme d’expression la plus naturelle, dans Un silence ce sont les non-dits qui parlent, embarrassent, blessent et brisent la cellule familiale.
Créée
le 28 avr. 2024
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