Le harcèlement à l'école est un sujet de plus en plus abordé. Mais si on commence à en parler, il est toujours compliqué d'observer des changements ou des solutions à ces élèves martyrisés...
Un monde prend le pari de suivre une très jeune fille, Nora, alors qu'elle rentre en CP. Tout d'abord terrifiée à l'idée d'être séparée de son père dans ce monde inconnu, elle va petit à petit s'ouvrir et se faire des amies. Mais Nora a un frère, Abel, plus grand qu'elle, qui se fait harceler, frapper et humilier par des garçons de sa classe. Elle doit alors décider de comment l'aider, en parler à son père, la maîtresse, ne rien faire ?
Étant donné le sujet assez lourd, Un monde est un film pas simple à traiter. Il est toujours compliqué de faire jouer des enfants (surtout dans des rôles complexes avec une palette de jeu à dévoiler), mais c'est bien la plus grande réussite de ce film ! Maya Venderbeque et Günter Duret sont absolument impressionnant dans leur rôle, arrivant à jouer la peur, la joie, l'incompréhension et la tristesse avec une vérité totale et naturelle tout le long du film. Karim Leklou en père de famille est lui aussi impeccable comme d'habitude, mais c'est finalement le seul acteur adulte à la hauteur des enfants (c'est dire leurs performances).
Côté mise en scène, Laura Wandel, dont c'est le premier film, nous plonge dans un quasi-huis-clos à l'école. Le film ne se déroulant jamais à l'extérieur, l'effet enfermé est très réussi et nous plonge dans un monde étouffant où les cris des enfants, la masse qui court partout à la récréation, donne un sentiment de danger quasi constant tout le long. En suivant au plus près Nora, la réalisatrice épouse le point de vue de la petite fille et retransmet à merveille toutes les émotions qui se mélangent en elle. Les scènes d'agressions sont encore plus fortes quand elles sont montrées en hors-champ ou dans un flou, qui nous fait imaginer le pire, accentuées par la performance des jeunes acteurs.
Mais là où le film prend tout son sens, c'est quand il bascule à mi-chemin, où la frontière entre agresseur et agressé devient plus fine. Dès l'enfance, la violence est un moyen d'expression inéluctable (violence physique mais aussi verbale) et même une très bonne copine peut devenir tout à coup très cruelle. Cette escalade de la violence se termine dans un excès de rage impressionnant et donne un sacré uppercut émotionnel au spectateur !
Un monde de Laura Wandel est l'une des très bonnes surprises de ce début d'année 2022, un film fort porté par d'excellents jeunes acteurs et ne laissera pas le spectateur indifférent !
Un gros coup de cœur!!!