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Parmi les genres cinématographiques que j’apprécie, il y a celui abordant l’éducation, que ce soit le corps enseignant comme les élèves.


Récemment, La vie scolaire (2019) avait trouvé grâce à mes yeux. Dès que Le maître d’école (1981), P.R.O.F.S (1985) Le plus beau métier du monde (1996), voire Les sous-doués (1980) sont diffusés dans notre bonne vieille lucarne, je m’attarde quelques instants devant eux. Le sujet est aussi abordé dans des documentaires passionnants comme Entre les murs (2008) et La cour de Babel (2013).


Dans le genre, le cinéma américain n’est pas en reste. C’est plutôt l'aspect dramatique qui retient mon attention avec Half Nelson (2006) et Detachment (2011).


Enfin, la saison 4 de la plus grande série de tous les temps, The Wire de David Simon, aborde le système scolaire américain et ses nombreuses défaillances.


De ce fait, je me devais de me rendre dans les salles obscures infestées de punaises de lits pour découvrir le dernier film de Thomas Lilti.


Au commencement


Benjamin (Vincent Lacoste) débarque en tant que contractuel dans un collège. Il est professeur de mathématiques, un choix par défaut, durant sa thèse de physique. La découverte des différents aspects de ce métier, ne va pas se révéler évidente pour ce jeune homme. Heureusement, il va trouver de l’aide et du réconfort auprès des différents professeurs, aux profils aussi variés que leurs matières.


Vincent, William, Adèle et les autres


Un métier sérieux est un film qui se veut choral. On croise de nombreux personnages, que ce soit le corps enseignant, les élèves et la direction. Les enseignants.es ont chacun leurs propres identités. Comme la direction, le principal et son adjoint, ils sont définis de manière caricaturale.


Pierre (François Cluzet) est le “vieux sage”, celui qui prodigue ses conseils aux nouveaux, en l'occurrence le seul Benjamin, mais qui ne sait pas communiquer avec son propre fils. Sandrine (Louise Bourgoin) qui est dépassée par ses élèves comme par son fils. Meriem (Adèle Exarchopoulos) , la grande gueule en difficulté dans sa vie privée. Fouad (William Lebghil), le gars rigolo qui vit une séparation.


L’histoire fonctionne essentiellement sur ces cinq personnages ce qui, d'une certaine manière, est logique vu que le film se focalise sur le métier d'enseignant. Ils permettent de rendre le film appréciable avec ses moments de rires, de doutes et de tensions. On a aussi une histoire d’amour platonique entre les deux profs de sports où Sophie (Lucie Zhang) qui se pose des questions sur sa place en tant que professeur au sein de ce collège plutôt paisible.


C’est le problème principal de ce film, à savoir son incapacité à développer ses personnages, à aborder les difficultés et questionnements d’un métier qui est de plus en plus dénigré et maltraité par les différents ministres de l’Éducation Nationale, sous l’influence d’un gouvernement qui ne s’intéresse pas à ses enfants, en les sacrifiant au profit du capitalisme.


Thomas Lilti n’est pas Robert Altman. La comparaison est un brin excessive. Le grand metteur en scène américain reste mon mètre étalon dès qu’on se lance dans un film choral. Dans la description succincte de ses principaux personnages, ils/elles ont tous une vie privée désastreuse, à croire que ce métier n’est pas conciliable avec une vie de couple où de famille. Seulement, il ne s’appuie que sur l’aspect humain, sans aborder le manque de moyens, de valorisation sociale et salariale d’un métier qui attire de moins en moins de personnes.


Dans le contexte social actuel, qui dure depuis des années, Un métier sérieux ne se montre pas sérieux. De plus, les élèves sont laissés de côté, à l’exception d’Enzo, un élève difficile. Il est un ressort dramatique pour accentuer les difficultés de Benjamin dans sa découverte du rôle d’enseignant. Comme ses professeurs, la vie privée d’Enzo est difficile avec des parents séparés, dans l’incapacité de lui apporter un cadre et une stabilité.


Le portrait de la vie de ce collège est sombre. Pourtant, le film est d’une agréable légèreté, en contradiction avec la situation des différents personnages.


En dehors des élèves, les autres composantes qui font partie intégrante de la vie d’un collège, comme la vie scolaire, l’intendance et le médico-social restent dans l’ombre où sont passablement évoqués au détour d’un conseil de discipline, ainsi qu’une sortie scolaire, dont on se demande encore quelle est sa pertinence au sein de l’histoire.


Enfin bref…


A trop vouloir en faire, sans trop en faire, Thomas Lilti se perd dans un sujet qu’il ne maîtrise que de manière suggestive, au contraire de sa connaissance du monde médical. Malgré tout, il parvient à signer une sympathique comédie dramatique grâce à la complicité de Vincent Lacoste et William Lebghil (comme dans Première année du même réalisateur), ainsi que d’Adèle Exarchopoulos, déjà parfaite en début d’année dans le magnifique Je verrai toujours vos visages de Jeanne Henry.


easy2fly
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le 21 sept. 2023

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Laurent Doe

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