Très beau film, qui parait bien plus mystérieux qu'on ne pourrait le penser.

Il se présente comme une parenthèse dans la vie de son trio de personnages, notamment pour Haofeng, qui arrive à Yanji, paumé au nord-est de la Chine, pour le mariage d'un ami, dont il ne s'y épanouit que trop peu. Il suivra donc discrètement la guide touristique Nana, avec une relation qui va se construire très, mais très progressivement.

La première partie du film est très mutique, on ne comprend pas trop ce que pensent nos personnages, même si on ressent une grande solitude en eux, particulièrement pour Haofeng. Et on pourrait en rester là, c'est un très beau film, avec de magnifiques plans et paysages, avec une magnifique musique flottante, et ses quelques fulgurances de puissances et de mélancolies, composée par Kin Leonn. Les scènes d'intimité sont aussi vraiment belles, avec une douceur et une beauté sans égal, en particulier avec le rideau de douche.

Mais le film n'en restera pas complètement là, il n'est pas juste question d'errements de personnages ici, mais aussi de quête du sens de la vie. Haofeng commencera à parler plus personnellement, et notamment de la question du suicide. On sent que la solitude du personnage est bien plus viscérale qu'il voulait bien nous le montrer. Surtout quand il parlera de sa vie à Shanghai, qu'il n'apprécie pas plus. Il s'agit aussi de rêves brisés, comme le patinage artistique pour Nana, qu'elle a abandonné plus jeune, ou la flemmardise de Xiao, le troisième du trio, qui l'a empêché d'avoir une meilleure situation.

Il y a à côté de cela d'étonnantes choses, comme cette histoire de voleur nord-coréen qui revient souvent, et dont la récompense pour le retrouver serait de 200 000 yuans, ce qui équivaudrait à sa valeur intrinsèque, pendant que nos trois trublions ne semblent pas valoir autant... faut-il être un dangereux vagabond pour avoir de la valeur ? On pourrait aussi citer la scène de l'ours ou du camion, des scènes dont leur rôle au sein du récit ne me parait pas si évident. Et notamment de ce téléphone perdu du personnage principal, a-t-il vraiment été perdu involontairement ? Téléphone qui ne lui servait qu'à répondre à de faux numéros.

Bref, j'ai réellement adoré le film, particulièrement grâce au duo Liu Haoran / Zhou Dongyu, qui sont vraiment tout mignons et attendrissant, qui n'en font jamais des caisses, il y a un naturel, une certaine simplicité dans leur relation, je la trouve follement ordinaire. Le film a ses quelques passages à vide (un comble), mais avec une toujours une petite fulgurance au bout du chemin. Un film qui réussit à casser la glace entre ses trois âmes perdues, mais avec une telle légèreté et une grande compassion.

À vrai dire, mon esprit balance un peu pour ce film, il y a quelque chose de trop ténu dans ces personnages et cette histoire, mais cela pourtant décuple mon empathie pour eux, et de leur mal-être universel qu'est la solitude.

(Vu le 2 décembre 2023 en VOSTFR au cinéma)

On en parle dans le Ciné-florg #64

Tiflorg
8
Écrit par

Cet utilisateur l'a également ajouté à ses listes Films Vus en 2023 (+ avis) et Les meilleurs films de 2023

Créée

le 11 déc. 2023

Critique lue 11 fois

1 j'aime

Tiflorg

Écrit par

Critique lue 11 fois

1

D'autres avis sur Un hiver à Yanji

Un hiver à Yanji
Electron
6

Déambulations d'un improbable trio

Venu de Shanghai, Li Haofeng est à Yanji (Chine du nord), pour le mariage d’un ami qui épouse une coréenne. C’est l’hiver et son climat rigoureux, à l’image du ressenti initial de Li Haofeng, jeune...

le 21 nov. 2023

9 j'aime

5

Un hiver à Yanji
Cinephile-doux
7

Recours en glace

Deux gars, une fille : il n'en faut pas plus pour qu'Un hiver à Yanji reçoive l'étiquette de "Jules et Jim de la nouvelle génération chinoise." La comparaison n'est pas incongrue mais un peu...

le 15 nov. 2023

9 j'aime

2

Un hiver à Yanji
Moizi
5

Trop beau

Un hiver à Yanji souffre d'un problème majeur : il n'est en aucun subtil, il en fait des caisses et Anthony Chen voulait absolument que son film soit "beau" rajoute de la poésie pour la poésie, sur...

le 10 déc. 2023

7 j'aime

2

Du même critique

Sans jamais nous connaître
Tiflorg
8

Deuil d'une enfance perdue

Un film surréaliste que nous propose Andrew Haigh, que j'ai connu avec "Week-end" un de ses premiers films, qui est parmi mes romances gays préférées au cinéma, et donc il me tardait de voir son...

le 3 déc. 2023

11 j'aime

The Last of Us: Remastered
Tiflorg
8

Pas un jeu à faire. Mais un jeu à vivre.

Un jeu unique. Je n'avais pas prévu de me faire ce jeu à la base, mais suite aux différents critiques qu'il a eu, je me suis dis que ça vaudrait peut-être le coup. Par contre, il ne faut pas...

le 6 févr. 2015

7 j'aime

Ghost Trick : Détective fantôme
Tiflorg
8

Sissel l'impératrice

Après un titre d'une originalité sans précédent, je m'en vais vous conter mes impressions d'un jeu que j'ai fini il y a de ça déjà quelques mois. Je lui avais à l'époque juste laissé un laconique 7,...

le 25 mai 2016

6 j'aime

2