Un, deux, trois
7.2
Un, deux, trois

Film de Billy Wilder (1961)

J'imagine les réunions d'écriture autour du scénario : comment rendre chaude la guerre froide ? Comment brasser tous les clichés liés au communisme et au capitalisme, et les faire valser sur fond d'intrigue amoureuse (la fille du grand patron de Coca-Cola s'est marié en secret à un communiste patenté et est tombée enceinte : comment le chef de la firme de Berlin Ouest va-t-il réussi à enrober tout cela sans perdre son travail ?), tout cela sur un rythme échevelé qui laisse le spectateur à bout de souffle tant les fous rires s'enchaînent dans la dernière demi-heure de film ?

J'imagine, et je suis admirative du rythme qu'ont su créer Wilder et son fidèle IAL Diamond. Je viens d'éjecter le dvd et mille répliques me reviennent, m'arrachant de nouveaux sourires béats. Tant de trouvailles absurdes ("I will not have my son grow up to be a capitalist. - When he's 18 he can make his mind up whether he wants to be a capitalist or a rich communist."), foutraques ("Schlemmer you're back in the SS, small salary! " ; They're staying at the Grand Hotel Potemkin. You know where that is? - Yes, sir. It used to be the Great Hotel Goring, and before that, it was the Great Hotel Bismarck." )... Tant de dialogues géniaux entre un James Cagney survolté, tenant d'un capitalisme et d'un américanisme triomphants (de son coucou jaillit l'oncle Sam... et comment résister à ce genre de punch line : "The only royalty we know are Count Basie, Duke Snider, and Earl Wilson" ^^), confronté à un Horst Buchholst passionné (" Darling, no woman should have two mink coats...until every woman in the world has one."), déterminé à sauver l'humanité et sa femme de la pourriture du commerce.

L'ensemble est brillant : à la roublardise jubilatoire de Cagney répondent la fougue de Buchholst et une poignée de seconds rôles aux petits oignons. Une fiancée écervelée au sang chaud, un assistant dont les claquements de talons dissimulent mal le passé de SS, une secrétaire très Marilyn, déterminée à apprendre la prononciation du Umlaüt à son patron, une épouse à l'ironie délectable, un trio de russes impayables... Tout ce joyeux monde passe sous la porte Brandebourg, boit du coca-cola, se met au garde-à-vous et fait hurler de rire.

On en pardonnerait presque un léger défaut de rythme au tout début du film, tant le reste n'est que trouvailles de dialogues savoureuses et moments dignes d'une farce, sur une bande-son qui oscille entre univers burlesque du cirque, jazz suave et détournements classiques malicieux.

Un régal !
LongJaneSilver
9
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le 28 nov. 2013

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LongJaneSilver

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