Gardons-le notre cinéma national, jalousement, même s’il déplait à certains qui le trouvent trop chiant et cérébral, voir incompréhensible et laissons M. Besson se débrouiller seul dans ses tentatives d’en faire un business plus lucratif. C’est exactement ce qu’inspire Un Conte De Noël, superbe petite chronique familiale totalement jouissive et névrosée assortie d’un florilège de règlements de comptes sans limites.


On remarque en premier le casting qui enthousiasme de plus en plus à chaque nom qu’on découvre, c’est du lourd, du super-lourd même ! Jean-Paul Roussillon, Catherine Deneuve, Anne Consigny, Mathieu Amalric, Melvil Poupaud, Hippolyte Girardot, Emmanuelle Devos, Chiara Mastroianni, entre autres ! Tous en forme, tous au plus juste du rôle qui leur a été offert et tous semblant prendre un vrai plaisir. Au milieu il y a un acteur moins connu mais qui restera sans doute le plus touchant : Laurent Capelluto jouant un homme ayant renoncé à celle dont il est fou amoureux depuis des années pour la laisser à son cousin. Tant de fois on veut le réconforter, le serrer fort pour l’aider à faire le deuil de son énorme connerie, bref une révélation.


On remarque ensuite, dès que l’histoire commence à s’étoffer, que les dialogues sont d’une qualité rare et savent faire mouche aussi bien dans l’émotion, dans l’humour ou dans la saillie verbale. L’émotion est surtout laissée aux histoires d’amour et surtout celle, dissimulée, entre Chiara Mastrioanni et Laurent Capelluto qui bénéficie de moments de poésie qui mériteraient d’être publiés. L’humour et plutôt laissé à Melvil Poupaud et Jean-Paul Roussillon, personnages à la répartie transformée en discipline olympique. Quant à la saillie, évidemment c’est Mathieu Amalric, toujours impérial, qui s’en charge. Comme on aimerait avoir son culot, son à-propos cinglant, si incorrect et peu respectueux des conventions.


On remarque finalement l’histoire, simple prétexte en fait à un grand déballage de linge sale en famille, juste au moment des fêtes de Noël, moment le plus propice, comme chacun sait, à ce genre d’affrontements. A peu de choses près on est au théâtre avec ses entrées, ses sorties, ses deux ex-machina mais au final, le génial Arnaud Desplechin nous laisse le plaisir d’une fin en suspend et pleine d’interprétations.


Alors oui, si le cinéma français doit mourir de sa qualité qu’il meure, car mieux vaut ça qu’une succession d’Astérix moisis, de Ch’tis indigestes et de Taxi misérables. Que Luc Besson devienne citoyen des Etats-Unis d’Amérique et qu’il nous oublie, nous aussi nous l’oublierons, d’ailleurs on a déjà commencé à l’oublier. Arnaud Desplechin est un monsieur capable de renouveler un des plus beaux cinémas du monde sans le trahir et si d’aventure les Français se transformaient en bouffeurs de boudin et boudaient ses films, ça sera sans les cinéphiles.

Jambalaya
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le 13 sept. 2013

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