UglyDolls
4.2
UglyDolls

Long-métrage d'animation de Kelly Asbury (2019)

Au cinéma comme dans toute création humaine, les intentions premières ne doivent pas être confondues avec le résultat, soit l’œuvre soumise à notre réception critique. Et là, problème. UglyDolls repose tout entier sur un paradoxe assez stupide, celui qui consiste à chanter la différence en se servant, pour ce faire, de poupées uniformisées et dépourvues de personnalité propre. Il semblerait retrouver les porgs de Star Wars 8, ces immondes créatures aux yeux exorbités dont l’existence n’est justifiée que par le souci de vendre à la pelle des peluches dans les magasins. Alors le film essaie, tant bien que mal, d’habiller ses petites choses d’une profondeur source vive d’émotions. Mouais. D’autant que la mise en scène se pense tel un kaléidoscope de toutes les utopies adaptées pour les enfants au cinéma : Charlie et la Chocolaterie ouvre l’ensemble, puis vient le village des Schtroumpfs (ou du Grinch, au choix) dans lequel vivent des Barbapapa, pâles reflets des jouets de l’univers Toy Story. Et le toboggan de Baby Boss ! Ça fait beaucoup. Le second écueil sur lequel bute le long-métrage est à chercher du côté de la morale délivrée, dans l’ère du temps puisqu’elle paraît extraite d’une chanson pour l’Eurovision : « tu es indestructible, tu t’es fait toi-même » etc. etc. Mignon, peut-être ; faux, sûrement. À simplifier de la sorte ses enjeux, le film vend du rêve et du leurre, trompe son public sur le caractère insidieux du conformisme. S’il illustre par une scène en miroir assez pertinente la pression exercée sur la marge par les groupes de références, il refuse toute progression psychologique, ôte à ses protagonistes et au spectateur la nécessité fondamentale d’un cheminement spirituel qui se devait violent, qui se devait sinueux, qui se devait fragile. Quoi de plus fragile, en effet, qu’une poupée ? Quoi de plus fragile, en effet, qu’un être en marge de la mode et de la culture dominantes ? Nous ne ressentons jamais l’énergie d’une particularité individuelle dans la mesure où d’individus il n’y a pas, seulement deux groupes opposés l’un à l’autre selon une polarité manichéenne. Devenir est une construction, non un pré-acquis. UglyDolls martèle son message sans se rendre compte qu’il participe à niveler par le bas les spécificités de chacun, créant ainsi une vaste mascarade où tout le monde chante et danse, uni main dans la main. « Soyez différents avec fierté ! ». Mais que signifie différents, dès lors qu’il ne reste ni particularité, ni marge ? La couleur a lavé les aspérités. Le film, en fin de compte, a les mêmes propriétés qu’un bonbon acidulé : fun, pop et chromatiquement saturé, il semble sympathique mais rend obèse.

Créée

le 28 août 2019

Critique lue 267 fois

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