Toy Story 4
7.1
Toy Story 4

Long-métrage d'animation de Josh Cooley (2019)

Largué par mon jouet préféré ? Il faut sauver le soldat Fourchette.

Pourquoi j’attribue la note de 5 ? —> JE PEUX TOUT EXPLIQUER, RANGEZ LES KALACHNIKOVS. Je sors de Toy Story 4 après un revisionnage du 3. Ce Toy Story 3 qui nous avait été annoncé comme la résolution ultime d’une saga mythique du film d’animation, qui nous regarde grandir depuis 1995. Toy Story 3 (que j’avais noté 10/10) était selon moi l’accomplissement et la définition même d’un dénouement parfaitement aboutit. Laissant la plupart des spectateurs larmoyant sur cette avant dernière scène où nos personnages préférées courent à une mort certaines, se regardent, main dans la main, puis sur cette dernière scène de la transmission des jouets d’Andy vers Bonnie. Une scène aussi déchirante que satisfaisante, le happy-end en demie teinte parfait, être content d’être triste, un sentiment rare. Toy Story 3 avait pour message fort qu’un jouet se devait de répondre présent pour l’enfant qui l’aime, afin d’être transmis, à un autre enfant, ou une génération future.
Ce message est beau, car étant un amoureux des jouets, j’ai cette âme de collectionneur, et j’adore l’idée qu’un jouet avec lequel j’ai adoré jouer pendant mon enfance, m’attende pour le jour ou je le ressortirais, ou le transmettrais.

Et c’est donc 9 ans plus tard que nous nous retrouvons dans la chambre de Bonnie, en compagnie de nos jouets préférés, et d’un nouvel arrivant, Fourchette,

un jouet fabriqué par les soins de cette dernière.

La trame de fond se tient, et le choix de l’intrigue est assez amusant. Fourchette qui n’accepte pas le fait d’être considéré comme un jouet va par tous les moyens essayer de se jeter à la poubelle. C’est donc Woody qui va s’enquérir du rôle de protecteur de Fourchette, afin de s’assurer qu’il reste auprès de Bonnie.

So far, so good, mais alors pourquoi le film nous laisse t-il un léger goût amer pendant et surtout APRÈS le visionnage ?

Woody, Woody, Woody...
Qu’est ce que j’adore dans Toy Story ?, et bien j’adore Woody, mais j’adore autant Buzz l’Éclair, l’un ne va pas sans l’autre. Et j’adore Rex et son caractère flippé/paniqué/paranoïaque. J’adore Bayonne, et Zig-Zag, et les Monsieur et Madame Patate, etc... Je suis né en 1994, j’ai grandit avec ces personnages, j’y suis attaché. Et c’est un des problèmes majeurs de cet opus. Le manque de présence de chacun des membres de la team Woody se fait ressentir. Pour Zig-Zag, je n’ai presque aucun souvenir de l’avoir entendu sur une réplique à lui. Toute l’aventure se focalise sur Woody et les nouveaux protagonistes de l’histoire, quitte à délaisser complètement les autres compagnons de route (Rex, Jessie, Les Patates, Bayonne, et même Buzz qui reste sous développé et presque inutile dans l’accomplissement de la quête principale). Ces derniers attendront bien sagement le retour de Woody,

sur la banquette arrière du camping-car,

sans pouvoir apporter leurs pierres à l’édifice. Même chose pour Fourchette au final, qui paie les pots cassés du temps d’écran monopolisé par Bo et Woody, et aucune poursuite de la romance initiée dans l’épisode 3 entre Buzz et Jessie (ils étaient trop choux, pourquoi avoir laisser ça de côté ?). Dans l’épisode 2 par exemple, c’est toute la team qui part à la recherche de Woody. Alors pourquoi laisser Woody s’occuper seul de sa rescue mission ? C’est une première veritable incohérence, les jouets ont toujours été soudés, et pour la première fois, j’aurais aimé qu’ils fassent confiance à Woody, après tout ce qu’ils ont vécus, et le suivent dans sa mission « ramener Fourchette à la maison (allez, les bleus, allez)» On fera l’impasse sur le nom français de Fourchette (Forky) en VO... sérieux les gars ? Vous pouviez pas laisser Forky ? Ça sonnait mieux Fourchette ? Ah bon ? Ok ok...

Ensuite, et le plus gros point noir du film selon moi : l’incohérence TOTALE des prises de décisions et des caractères des personnages. Dit comme ça, ça peut paraître flou, alors laissez moi m’expliquer. En fait si vous y réfléchissez bien, quasiment AUCUN personnage-mis à part Woody-(au début du film, puis de moins en moins) n’a les reactions qu’il se devrait d’avoir par rapport à ce qu’on nous a présenté d’eux dans les précédents volets. On commence d’abord avec Bo, la Bergère, qui a subit une mise à jour « femme forte indépendante », qui ne correspond à RIEN mais alors RIEN de ce qui nous avait été présenté d’elle dans Toy Story 1. Je veux bien croire qu’elle ait changé en toutes ces années passées, mais de là à avoir complètement reset le personnage... why you do this to me guys ?? Stop hurtin’ my feelings pls... Je ne suis absolument pas contre ce caractère, mais cela aurait été beaucoup plus juste de l’octroyer à un nouveau personnage que l’on a jamais eu l’occasion de voir auparavant. C’est simple, pour moi ce n’est presque plus le même jouet que dans Toy Story 1 et 2. C’est donc un parti pris qui rejoins la dynamique féministe à laquelle est exposée notre société en ce moment, qui tombe un peu à plat. Surfer sur la tendance féministe actuelle; Why Not, ça nous change des princesses sans détresse qui attendent qu’un héros masculin vienne les sauver, ici c’est même elle qui sauve les autres. Mais... Est ce que ce féminisme appuyé/parfois grotesque est vraiment pertinent dans le développement de l’intrigue ? Ab-so-lu-ment PAS. Il dessert même le film, en rendant Bo moins attachante, il nous est plus difficile d’accepter l’issue du film... Par exemple il est vrai qu’un pantalon c’est plus pratique pour se balader, mais c’était son costume de Bergère et sa robe à pois qui faisait de son character design un personnage dont j’étais tombé sous le charme. La bergère timidement amoureuse du Toy Story 1 n’est plus, elle dirige et c’est elle qui prends les décisions (gare à celui qui ne suit pas son plan, il se fait engueuler). Ça aurait pù aller, mais le personnage agace presque par moments. Elle ne demande pas, elle ordonne, et on observe Woody, impuissant, se faire daronner pendant 45 min.
Concernant notre cosmonaute préféré, son manque d’initiative est décevant, la franchise nous ayant habitué à positionner Buzz comme un des piliers du groupe, il avait porté Toy Story 3 sur ses ailes. Il nous apparaît ici presque mou du genoux, perdu et démuni, ne sait jamais vraiment quoi faire ni quand lorsque Woody n’est pas à ses côtés... (Pareil pour les autres de la team mais c’est pas Rex qu’on va blâmer, il a toujours été paniqué).

Les personnages secondaires à l’exception de l’excellent Duke Kaboom sont sympa mais facilement oubliables, alors qu’on découvrait dans Toy Story 3 les excellents Ken et Barbie, le singe-cymbales responsable de la sécurité vidéo, le hérisson comédien et les autres jouets de Bonnie. Dans Toy Story 4 nous avons même droit à des personnages secondaires insipides et irritants comme la petite poly pocket gendarme.

```Alors, on nous présente Woody toujours au service de son enfant, Bonnie, comme il l’avait fait avec Andy, jusque là on est bon, mais c’était sans compter sur le twist final. En effet, on nous a toujours présenté Woody comme le jouet le plus loyal de tous. Tout dans Toy Story 4 est fait pour nous montrer qu’être un jouet qui reçoit l’amour d’un enfant c’est la chose la plus fantastique sur terre. L’antagoniste Gaby-Gaby ne rêve que de ça et Woody ne cesse de vanter les mérites que sont le fait d’appartenir à un enfant et de la fierté que représente le fait de le voir grandir etc... dans l’épisode 3, Woody nous rappelle le rôle d’un jouet, être présent pour son enfant, et que s’il a besoin de ses jouets dans le grenier, ou dans un placard, c’est du devoir des jouets de tout faire pour répondre présent lors du jour où l’enfant aura de nouveau envie de voir ses jouets, ou de les transmettre à ses enfants. Et cette morale là, elle fait chaud au coeur, parce que QUI n’a pas gardé ses vieux jouets dans l’idée de les transmettre à sa descendance, sans pour autant ne cesser de les aimer ? Dans Toy Story 4 Woody décide de finalement rester avec Bo-qui a fait voeu de rester indépendante et de ne plus appartenir à un seul enfant mais de se rendre disponible pour le plus d’enfants possible- et donc de quitter toute la team de jouets. Cet aboutissement ne fait pas vraiment sens, puisqu’on sait que Woody est obnubilé par la potentielle peine que pourrait ressentir Bonnie, ce à quoi Buzz réponds « Bonnie s’en remettra ». Là résonne une des plus fatales erreurs de Toy Story 4. Si Bonnie pourrait s’en remettre voire ne pas du tout se rendre compte de la disparition de Woody pendant un temps, il n’est pas dit qu’elle n’aura pas un élan de manque du Cow-boy plus tard. Comme nous en avons nous aussi lorsque nous sommes enfant. En faisant ce choix, Woody fait une croix sur presque tous ses principes, ceux qu’on nous a présentés pendant ces 4 opus. Qu’en sera t-il si Andy décide un jour de revoir Woody rien que pour la nostalgie de revoir son jouet préféré ? Via cet acte de quitter Bonnie, Woody nous fait nous questionner sur le sens même de rester avec un seul enfant, alors qu’on venait justement de valoriser sa loyauté et son sens du sacrifice. Est ce que le fait que Woody prenne la décision de devenir un jouet « indépendant » rend cette décision comme la meilleure décision qu’un jouait devrait prendre ? Cela veut-il donc dire que le reste des jouets sont des losers ? Et qu’ils feraient mieux eux aussi, des qu’ils se sentent délaissés, de tout plaquer et de devenir un « jouet perdu » ????.

Vous allez me dire... il part pour celle qu’il aime... Bo la Bergere, puisqu’a priori si elle n’avait pas été dans l’équation, il n’aurait jamais quitté sa bande de potes... Le problème étant que la romance et l’attachement à Bo dans le film n’est pas du tout assez fort pour qu’on se rende compte de l’amour viscérale qu’éprouve Woody à l’égard de cette dernière, qui aurait pu être un élément déclencheur nous permettant de comprendre comment Woody fait d’un coup arrive à faire l’impasse sur ses convictions enracinées. Il ne l’est tellement pas, qu’on nous explicite l’amour de Bo pour Woody quand elle dit « ... et c’est une excellente raison pour l’aimer! ». Cette réplique n’a lieu d’être que parce que le spectateur ne RESSENT pas l’amour de Bo pour Woody. C’est très rare de voir l’amour explicité de cette façon dans un film, l’amour c’est quelque chose qu’on doit absolument faire passer à travers l’écran pour qu’on puisse s’y identifier et faire appel à nos propres émotions. Expliciter l’amour à ce moment là du film c’est très maladroit, et on est loin d’un amour inconditionnel. C’est comme si elle décidait de l’aimer d’un coup, alors qu’elle passe les 3/4 du film à remettre les choix et convictions de Woody en question. Bref, on ne répare pas un parachute troué avec du ruban adhésif. Quant à l’intrigue, les moments merveilleux passés entre un jouet et son enfant nous sont tellement relatés que la logique aurait presque voulu que Bo, en voyant l’amour de la petite qui trouve Gaby Gaby, à la toute fin, se souvienne d’à quel point posséder l’amour d’un enfant est unique et incroyable, et rejoigne Woody et les autres. La morale aurait donc été; peu importe qu’un enfant délaisse un jouet; son amour pour lui n’en est pas pour autant amoindri.

Mais soit... Ok, Woody décide de partir, et vient le moment des Adieux... Ces Adieux auraient dû être déchirant, et même si c’est émouvant, le câlin entre Buzz et Woody ne suffit pas. Non, parce qu’à ce moment là, tout notre être est chamboulé. Woody sans Buzz L’Éclair ?? Impensable !!. La réaction de Rex et des autres n’est pas adapté et nous laisse complètement ahuri. Bayonne, Rex et les autres auraient du s’insurger du départ de Woody, et nous l’aurions complètement compris. Après avoir débattu quelques minutes; Woody aurait fini par expliquer clairement ses motivations et aurait réussi à rassurer quelque peu ses compagnons meurtri par la peine de son départ. Nous savons que sans Woody, les jouets ont toujours-ou presque-fait les mauvais choix, et ont manqué d’en payer les conséquences. Ils ont toujours été perdus sans Woody, alors pourquoi autant embrasser son départ ? On a presque le sentiment qu’ils sont heureux que Woody s’en aille loin d’eux. A deux doigts du « yes bon courage à + on s’appelle t’inquiète pas ».

Je rajouterais aussi un truc qui m’a chagriné et dont personne ne parle; la boite vocale de Woody qu’on lui retire. Alors c’est tout ? Juste comme ça ? Envolée ? Plus de ficelles ? Plus de « J’ai un serpent dans ma botte !», « Les mains en l’air ! », « Cette ville est beaucoup trop petite pour nous deux ! » Avec cette boite vocale s’envolent des souvenirs uniques et une partie de ce qui faisait de Woody un jouet unique et... sacré. Avec cette boite vocale s’envole aussi la capacité à Woody de pouvoir communiquer au monde extérieur en cas d’extrême nécessité (comme il l’avait fait avec Sid). Je trouve ça extrêmement dommage de lui retirer cette partie de lui. Et surtout, il l’abandonne avec une facilité déconcertante... a des fins pas si noble. En effet, j’aurais adorer qu’en voyant Fourchette, Gaby Gaby se rende compte d’à quel point un enfant peut se prendre d’amour pour un jouet « imparfait », voire même qui n’est pas un jouet. Faire de sa boite vocale défectueuse une force, c’est ce qu’aurait du nous proposer le film... En effet, les réals loupent le coche sur ce traitement la de l’histoire, en nous proposant le stéréotype d’une fille qui veut qu’on l’aime mais qui doit subir une opération esthétique afin de pouvoir accéder à l’amour. Manque de bol, c’est en prenant confiance en elle qu’elle finira par trouver l’amour d’un enfant, et non pas grâce à une boite vocale parfaite. J’aurais aimé qu’elle trouve même un enfant qui la choisit pour sa boite vocale détraquée, le message aurait été fort et impactant; quelqu’un qui t’aime pour ta différence, ne renoncera jamais à toi.
```
Bref, même si l’animation et la réalisation du film restent impeccables, l’humour toujours présent et bien dosé, ce Toy Story aigre-doux nous laisse sur notre faim. C’est un opus qui dissous complètement l’équipe originelle et qui met même certain personnages aux oubliettes. C’est d’ailleurs impensable pour moi que cet opus soit le dernier de la license Toy Story. A l’inverse du dénouement de Toy Story 3, je suis démuni, et triste d’être triste. Les jouets devront se réunir à nouveau au moins une fois pour rassasier les fans de la première heure. Si comme moi vos jouets préférés vous avaient manqué, ce n’est malheureusement pas dans Toy Story 4 que vous les retrouverez sous leur meilleurs jours.

Édit: Même ceux qui ont adorés le film et qui ont mit 10/10 s’accordent à peu près sur les points négatifs que j’évoque ici, j’avoue que j’ai donc du mal à comprendre une telle note finale de la part du grand public, et pour la première fois, j’ai l’impression que l’exemplarité qu’on attribue à Pixar pour le reste de sa filmographie prends le pas sur l’objectivité de la notation. N’hésitez pas à commentez cette critique pour contrer/invalider certains arguments que j’avance, ça m’aiderait à y voir plus clair.

AngelDeLaMuerte
5
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le 27 juin 2019

Modifiée

le 2 juil. 2019

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