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Pour ma 200 ème critique, je partage le coup de et au cœur, que j'ai ressenti pour ce teen-movie hyperréaliste et déchirant, rempli d'écorchés vifs. Voici ma critique juste après l'avoir découvert en avril 2014.


Le portrait d’une adolescente ordinaire pour ce petit film indépendant qui compte dans le cinéma, pour son perfectionnisme au réalisme. Le personnage d’Evan Rachel Wood est innocent et


le simple coup de poignard du final achève le portrait d’une jeune fille brisée et trahie : douloureux.


Catherine Hardwicke entre dans la tête des adolescent-e-s, dans chaque fragment de leurs pores pour les montrer avec un rare réalisme. "thirteen" pourrait être comparé à un autre film sur l’adolescence chez les filles : ces mêmes jeunes filles en fleur, qui fument, paraissent être dans leurs propres mondes : "Virgin Suicides". Si Sofia Coppola laisse le Mystère sur ses filles et bien Catherine Hardwicke, elle, fait plutôt dans le détail, elle raconte chaque microcosme de petites choses qui arrivent et font de Tracy, une jeune fille ordinaire et innocente au début et à la fin,


une adolescente hors-la-loi et suicidaire.


Si Sofia Coppola nous fait comprendre le parcours de ses filles (dans "Virgin Suicides", il en y a pas vraiment), Catherine Hardwicke qui montre la descente aux enfers d’une jeune fille ordinaire. Le début et la fin du film nous montrent une chose : Tracy (époustouflante Evan Rachel Wood qui rien qu’avec un regard nous étreint), une jeune fille peu populaire.
On ne peut pas détester le personnage d’Evan Rachel Wood, on en as pitié parce que comme elle, on s’est fait manipulés, d’une part son personnage admire une de ses camarades et s’identifie à elle avant qu’elle


ne la poignarde prétextant que sa mère ne pouvait pas l’adopter et nous on se fait avoir avec elle,


mais aussi en tant que spectateurs : le début, mis à part la séquence pré-générique débute comme un teen-movie ordinaire et puis très vite bascule dans une folie d’où on sait qu’il ne peut pas y avoir de rédemption.
Pour filmer une descente aux enfers, à Los Angeles (le film as été entièrement en décors réels), il faut coller ses personnages et les saisir, saisir leurs émotions.
En tant que cinéphile, j’aurais aimer que certaines scènes soient cadres autrement mais bon, il y a pas mal de Sofia Coppola dans le film : des adolescentes ; une descente aux enfers ("Marie-Antoinette") et l’immersion dans une ville ("Lost in translation"), ainsi c’est Los Angeles que la réalisatrice nous fait découvrir : des banlieues paisibles au centre ville : à un moment du film, Tracy et Evie traînent la nuit dans le centre-ville, Tracy perd Evie de vue une seconde et tente de la retrouver, avec un type. On suit les personnages qui passent dans plein de boutiques encore ouvertes. J’en ai vu des teen-movies, quelques uns, il y a toujours ces mêmes choses : scènes de cours (le film n’en montre que trois très courtes) ; relations avec les autres.


"thirteen" débute vraiment comme un teen-movie ordinaire, la séquence pré-générique ne pourrait que du bluff mais c’est un avertissement, on se dit qu’on va se mater un teen-movie tranquille genre "American Pie" et bien au bout de quelques minutes, quand Tracy décide de tout changer (le changement est radical, il est fait d’une scène à une autre, laissant le spectateur reconstituer les pièces du puzzle, raisons de ce changement), le film vire au portrait de la jeunesse mais Catherine Hardwicke tient absolument à ce que ce soit Tracy qui soit en première ligne, elle est dans quasiment toutes les scènes, quand elle n’y est pas, son regard (magnifiques yeux bleus d’Evan Rachel Wood) en disent énormément.
Si vous avez vu la série "Angela, 15 ans" : on retrouve ce point commun entre Angela et Tracy : vouloir devenir quelqu’un, changer d’identité, pour Angela, c’est d’abord sa couleur de cheveux (par ailleurs Claire Danes très naturelle) et pour Tracy, c’est de jeter ses jouets et certaines fringues avant de plus dramatique. Vouloir devenir quelqu’un d’autre, c’est enlever une partie de soi et bien Tracy à trois reprises, se vide, on voit d’abord qu’elle prends une petite paire de ciseaux dans la salle de bains mais on ne voit pas ce qu’elle en fait, plus tard :


elle reprends cette paire de ciseaux et se scarifie, elle recommence encore plus tard et prends une lame de rasoir, la camera cadre et fixe le taillage de veines (on pourrait croire à du voyeurisme mais en fait non) et on voit le visage en plan fixe de Tracy ressentant la douleur : j’ai pleuré à chacun de ces scènes, je connais sa douleur et Evan Rachel Wood la joue fort bien : c’est comme un reflet dans lequel je me suis vu.


Catherine Hardwicke ne cache rien au spectateur, montre tout. Le personnage de Tracy est extraordinairement riche et intéressant, elle peut envoyer chier sa mère 35 000 fois pendant le film (dans quasiment toutes les scènes elle l’envoie chier), on ne la déteste pas.


Elle n’est pas quelqu’un d’ammoral, elle n’est pas née comme ça et ne le serait plus.
Le personnage d’Evie, c’est tout le contraire et Nikki Reed ne s’interprète pas elle-même mais une personne qui l’as entraînée, dès la première séquence où elle apparaît : elle est la fille la plus populaire du lycée, à tendance nymphomane, extraordinairement extravertie.
On découvre dès le début, qu’elle a une forte tendance pour le mensonge, si bien qu’on ne sait plus si ce qu’elle dit est vrai ou faux : elle donne un faux numéro à Tracy ; raconte des bobards sur sa mère… Dans une scène, elle raconte à la mère de Tracy, que le petit ami de sa mère a un penchant pour la violence et l’as balancer contre une voiture en flammes (ce qui peut expliquer une brûlure dans le dos que Tracy remarque), que son oncle l’aurait violer a l'âge de neuf ans, un peu plus tard on voit la mère de Tracy tenir un article de journal semblant confirmer cela. Evie trouve un prétexte toujours pour squatter chez Tracy : elle dit d’abord que sa mère n’est pas là, puis que c’est sa tante, puis une amie de sa mère, que sa mère est morte… on n’y comprends plus rien et


elle vient habiter chez Tracy.


Catherine Hardwicke brosse très bien Tracy, la cadre dans son environnement et il y a ce basculement dans la déchéance.
Mais le personnage d’Evie outre de posséder une grande influence, peut-être du à son vécu dégoûtant qu’elle la canaliser en rage est capable de tout mais vraiment et rarement un teen-movie n’aurait été aussi cru : ainsi elle embrasse sur la bouche la mère de Tracy, se fait aimer de la mère de Tracy afin de se faire bien voir et que Tracy et sa mère s’engueulent mais n’en profite non plus. Ouvertement fumeuse et dealeuse, cocaïnomane, elle est aussi nymphomane et


incite Tracy à baiser avec un type.


Si le film se montre parfois léger : à coups de séquences superficielles (habituels des teen-movies même chez Van Sant), il est aussi ironique,


ainsi après s’être dépuceler : Tracy dit : "Ce serait bien si chaque personne formerait un couple et procréerait avec quelqu’un d’une race différente, comme ça tout le monde serait égal", un truc comme ça, on pense qu’elle fait référence au type avec qui elle s’est envoyer en l’air qui est noir mais la caméra recule et Evie se pose sur Tracy : la séquence est hilarante.


On sent comment ça pourrait finir, les scénaristes nous donnent quelques indices par ci par la même dès le début mais le final est surprenant.


Le film n’en abandonne pas ses personnages secondaires, en premier lieu : la mère de Tracy (Holly Hunter passive et remarquable) qui est comme un troisième personnage principal. J’ai beaucoup reconnu ma mère dedans, quand la mère de Tracy fait une crise de nerfs ou est à deux doigts de craquer en larmes, j’y ai vu ma propre mère.
Ce personnage est aussi extrêmement riche et ambigu, à la fois très cool mais aussi un peu sévère, elle est la complice de sa fille dans une scène filmée de façon remarquable ou toutes deux vont acheter de nouvelles fringues mais peu à peu leurs relations se détériorent, elles s’aiment mais ne le montrent qu’une fois dans tout le film. Il est aussi insinué qu’elle et sa fille ont une relation incestueuse. Ce rôle de mère dépassée et à la fois coole, qui (se) pose des tonnes de questions est un personnage indispensable : c’est une ancienne junkie qui va à des réunions de drogues anonymes, elle paye le loyer en étant coiffeuse à domicile ou en gardant des gosses.
Elle s’en ramasse plein la gueule pendant tout le film, on à un peu pitié de cette mère mais le jeu d’Holly Hunter outre sa puissance est très riche. Il y a aussi le frère de Tracy : le pire c’est qu’il pourrait bien s’entendre avec Evie, il est mordu de surf


mais balance toutes les conneries que Tracy fait à sa mère.


Il y a aussi Brady, le petit ami de Mel, en cure de désintoxication, revenu, que Tracy ne supporte pas car il est un drogué : le temps d’un flash-back (peut-être la scène la plus crue du film) on le voit prendre de la drogue jusqu’à perdre connaissance et Tracy et sa mère lui viennent en aide.
Il tente aussi en dépit de la haine de Tracy à son égard, d’être un bon père de substitution, c’est lui qui tente de gérer les situations quand elles tournent mal, c’est quelqu’un de plutôt calme et posé (Jeremy Sisto est étonnant dans ce registre d’autant qu’il n’avait que 28 ans lors du tournage, on pense qu’il est plus vieux, genre la trentaine et il forme un drôle de couple avec Holly Hunter, 44 ans lors du tournage, les "toy-boy" dix ans avant) et visiblement pas porté sur les adolescentes.
Il y a l’ancienne amie de Tracy : Noëlle (interprété par une sobre Vanessa Anne Hudgens, quatre ans avant "High School Musical") qui est une amie d’enfance de Tracy et Tracy la lâche et la loose pour ses escapades avec Evie.
Dans la scène lesbienne, Tracy dit qu’elle et Noëlle se roulaient des pelles en regardant un film, il est donc insinué que Noëlle est lesbienne mais leur relation semble plutôt être une relation de sœur : elles sont très proches, comme des sœurs au début et aucune trace d’ambiguïté entre les deux. Parmi cette pléthore de personnages, c’est vraiment le portrait de Tracy qui est le plus intéressant : Evan Rachel Wood est constamment juste, très naturelle et extraordinairement expressive, à un moment donné du film, vous vous dites : "Cette fille là, c’est une Grande Actrice" : je sais pas comment elle as fait pour s’immerger dans ce personnage tant elle est naturelle,
c’est l’un de ses premiers rôles et on a envie de se plonger dans sa filmographie pour voir d’autres de ses performances en se disant que celle la est certainement la meilleure (dire qu’elle avait seulement 14 ans lors du tournage...). Il y a un plan ou Tracy marche dans la rue en traçant un grillage et elle regarde dans la vague en marchant et il se passe rien mais on repense a tout ce qu’elle vient de vivre et on regarde ses yeux : elle nous sert le cœur a fond.


On peut comprendre pourquoi Evie a manipulée et bouleversée Tracy : on a un peu pitié d’elle aussi mais c’est Tracy qui nous bouffe le cœur c’est frustrant de ne pas savoir comment elle finira. L’adolescence dans les grands films comme "thirteen" (dont l’une des qualités et prendre le genre qu’est le teen-movie et le transcender) est traiter de façon différente, celle montrée dans "thirteen" est superficielle (un tout petit peu), exacerbée et réaliste, celle dans "Elephant" de Gus Van Sant est plus terre à terre, plus réaliste, plus proche de nous : avec son quotidien ordinaire ; "Virgin Suicides" se centre plus sur le "comment c’est une adolescente" ?, "Paranoïd Park" est aussi très réaliste et profondément naturel et aussi détaché et très drôle, etc...


Mais dans tous ces films, on pense avoir les réponses mais on se plante. "thirteen" nous laisse un goût amer dans la bouche, on s’épargnerait le début mais nous montre avec un réalisme saisissant, la déchéance d’une jeune fille ordinaire et savoir où elle en est à la fin : le pourquoi : elle, elle ne semble même pas le savoir. Comment en est-elle arrivée là ? Tracy ne semble même pas se remettre en question, le film s’arrête au bon moment : avec plein d’interrogations.
Catherine Hardwicke à sue arrêter son film au bon moment : à un moment frustrant, parce qu’on voudrait une vraie fin mais entière aussi parce que ça montre que la vie continue après Mais comment ?
Je vais finir avec quelques mots de la mise en scène : ce n’est qu’au bout de plus d’une heure, qu’un écran noir s’affiche après une plus d’une heure, d’une succession de scènes et de plans. Le montage à un sens précis, tout est parfaitement calculé pour que l’on comprenne l’œuvre Il y a un deuxième écran noir vers la fin du film ou


Tracy se scarifie et on voit le sang couler de son bras et puis elle se réveille seule peu après, toujours aussi seule.


Ce n’est plus qu’une question de temps, pas le temps de disserter, le final arrive d’un coup comme ça sans prévenir (laisser par quelques indices) et nous laisse comme ça, avec des gens ordinaires, perdus et à la fois retrouvés. "thirteen", c’est aussi ça : des histoires de vies ordinaires.
Comme tous les bons films parlant d'Etres Humains, "thirteen" nous demande : qui nous sommes réellement ?
Pour moi, impossible de répondre mais Tracy sait qui elle est au début et se retrouve un peu a la fin, elle à perdue quasiment toute sa personnalité en traînant avec Evie, elle à perdue presque tout ce qu’elle est. "thirteen", c’est une leçon sur l’existence, un reflet parfait sur nos vies ordinaires.


J’adore ce genre de films et je tenais à le voir aussi pour ça, parce qu’il traite de personnes comme vous et moi : ça m’intéresse beaucoup ça Les vies ordinaires.
On reconnaît dans "thirteen", le réalisme de la série "Friday night lights" : quasi même manière de filmer, être proche de ses personnages pour en ressentir les émotions, les filmer parfois à distance et laisser vivre librement et nous reconnaître en eux.

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le 6 août 2021

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Derrick528

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