The Wonder
6.3
The Wonder

Film de Sebastián Lelio (2022)

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Est-ce un miracle, ou serait-ce une supercherie ? Que croire alors, à quelle parole donner raison ? D’emblée le film nous invite, en brisant le quatrième mur de façon sursignifiante, à croire à l’histoire que nous allons suivre. À croire les personnages qui, eux-mêmes, ont une foi totale en leur histoire (mais avait-on besoin de ce rappel à l’ordre ? D’imposer cette pirouette méta pour nous convaincre du pouvoir de la fiction sur le réel comme sur l’imaginaire ?). Nous sommes en 1862, une dizaine d’années après la Grande Famine qui a sévi en Irlande. Lib Wright, une jeune infirmière anglaise, est appelée dans les Midlands par une communauté dévote pour passer quinze jours au chevet de l’une des leurs. Anna O’Donnell est une jeune fille de onze ans qui dit n’avoir rien mangé pendant quatre mois et avoir survécu par la volonté et l’amour de Dieu. Et alors que sa santé se détériore soudain, Lib, elle-même confrontée à ses démons, est déterminée à découvrir la vérité derrière cette étrange affaire.

Adapté du roman d’Emma Donoghue, inspiré lui-même par le cas des "Fasting girls", The wonder, et malgré son sujet passionnant, déçoit et ennuie. Manque d’à peu près tout. De mystères et de troubles, de tensions et d’émotions. On reste constamment extérieur à ce drame, pourtant poignant, que Lelio illustre sans âme et sans souffle, certes dans un bel écrin magnifié par la photographie d’Ari Wegner et la musique de Matthew Herbert, mais engoncé dans une pseudo radicalité qui, vainement, tente de saisir les ambiances naturalistes et sépulcrales de The witch ou des Hauts de Hurlevent d’Andrea Arnold (auxquels on ne pourra s’empêcher de penser).

Et puis Lelio ne semble jamais inspiré par son intrigue, reléguant les réflexions qu’elle suppose (convictions aveugles, poids du religieux, place de la femme au sein d’un système patriarcal…) à quelques vagues interrogations perdues dans de trop nombreuses longueurs narratives et à l’attente d’une révélation qu’il aurait, peut-être, fallu escamoter au profit d’une ambiguïté, de plus de singularité (car après elle, le récit finit de s’enliser dans une nouvelle direction scénaristique privilégiant la relation entre Lib et Anna fondée sur la confiance, la délivrance et, finalement, la survie). Ce qui est, ici, censé nous questionner, se jouer entre dogmes et vérités, entre indicible et réalité, dévotion et devoir, demeure sans cesse à l’état de thématiques simplement énoncées, de perspectives sages et, surtout, de grandes frustrations.

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mymp
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le 23 nov. 2022

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