The Spider Within: A Spider-Verse Story
6.2
The Spider Within: A Spider-Verse Story

Court-métrage d'animation de Jarelle Dampier (2023)

Retrouvez le film ici, c’est essentiel avant de lire : https://www.youtube.com/watch?v=FcGPpwFdE1Y


Alors que les fans de Spider-Man trépignent d’impatience pour ce qui doit conclure la meilleure trilogie de ces dernières années, Sony décide de combler le manque et de compenser le décalage de Beyond the Spider-Verse en sortant un court-métrage de sept minutes générique compris se déroulant dans le même univers. Nous y retrouvons ce cher Miles Morales qui doit faire face à une crise d’angoisse pendant une soirée, nous imaginons, durant l’année qui sépare les deux premiers opus. Il est toujours bon de rappeler que ces fameux deux premiers opus, Into the Spider-Verse (ou New Generation…) et Across the Spider-Verse se rapprochent du chef-d’œuvre tant ils ont réussi tout ce qu’ils ont entrepris à savoir entre autres une animation rafraîchissante et une intrigue multiverselle qui conserve l’ADN du personnage. Un court-métrage lié à ces deux films qui ont redynamisé mon super-héros favori est alors un cadeau que j’accepte volontiers. Bien que dispensable, la première réalisation de Jarelle Dampier nous replonge d’une belle manière dans l’atmosphère Spider-Verse et s’avère être un bonus pertinent dans le développement du héros en plus d’être un amuse-gueule chatoyant pour ce qui promet d’être une conclusion épique.


The Spider Within, qu’on pourrait traduire littéralement par « araignée à l’intérieur », est un choix de titre judicieux. L’araignée à l’intérieur de Miles Morales représente tout ce que ses pouvoirs et son costume ont pu lui apporter de mal. Le film reprend l’image première que se font les gens d’une araignée et que Marvel a eu tendance à nous faire oublier c’est-à-dire une bestiole dangereuse qui suscite chez certains une peur importante et un profond dégoût. L’araignée est ici l’allégorie des problèmes de Miles qui se sont accumulés au point de faire craquer notre héros. Le titre peut avoir un autre sens et simplement désigner directement Spider-Man qui se retrouve paralysé à cause de ses angoisses et donc prisonnier dans sa chambre. Les fans de l’araignée sympa du quartier sont ainsi rapidement intrigués par le nom du film qui promet de revenir sur les faiblesses du héros, un aspect quelque peu oublié dans la trilogie du MCU.


Après cette petite mise au point sur le titre, évoquons ce qui frappe aux yeux dès la première image qui suit les logos de production accompagnés d’une musique inquiétante et de bruits de respiration pour annoncer la teneur du récit : le charme visuel. Les longs-métrages de 2018 et 2023 ont révolutionné l’animation en donnant plus que jamais une impression d’esthétique de comics qui inspire déjà la concurrence (la suite du Chat Potté chez Dreamworks, Ninja Turtles version 2023 chez Paramount). Il n’est alors pas étonnant de retrouver la direction artistique reconnaissable au premier coup d’œil dans ce court-métrage. Le feu d’artifice de couleurs auquel nous avaient habitués les précédentes réalisations se fait plus discret au profit d’une teinte bleue foncée présente sur la presque intégralité de l’œuvre. Le bleu est souvent associé à la mélancolie, au spleen, une couleur qui paraît donc largement appropriée au sein d’une histoire de crise d’angoisse. Ce bleu est évidemment foncé puisqu’il fait nuit, tout est réuni pour créer une ambiance nocturne déprimante propice à l’émotion. Le court-métrage contient tout de même des plans dans lesquels la couleur change sans raison apparente lorsqu’on fait attention à la cohérence de l’éclairage, ce dans quoi s’est spécialisée la saga. La couleur qui vient remplacer le bleu quand Miles regarde la télé ou quand il subit sa crise d’angoisse est le rouge, ce qui indique le danger. Allons plus loin en disant que le rouge et le bleu sont les couleurs du Spider-Man de Peter Parker, les voir réunies à l’occasion d’une crise d’angoisse de Miles signifie à mon sens que le poids de l’héritage de Peter pèse considérablement sur les épaules de ce jeune Spider-Man encore peu expérimenté.


La crise d’angoisse de Miles est, l’expression n’est peut-être pas adaptée, un vaste terrain de jeu pour le metteur en scène qui va multiplier les bonnes idées pour la retranscrire à l’écran. Ce court-métrage fait du cinéma et utilise pleinement l’image pour construire son propos. Le fait de ne pas prendre le spectateur pour un abruti est quelque chose qui me plaît beaucoup dans les deux volets déjà sortis, j’entends par là que les dialogues ne sur-expliquent pas tout. Condamné à être vu par beaucoup de moins de personnes et par un public d’une moyenne d’âge supérieure, le court-métrage peut en contrepartie utiliser davantage la mise en scène pour se faire comprendre. Ceci se vérifie dès le premier plan. Le film s’ouvre sur un insert sur une flaque, Miles est décadré, seules ses chaussures sont visibles. Il est alors effacé à cause de son anxiété. Le reflet de la flaque est toujours un moyen efficace pour parler d’une double personnalité (pour rester sur du Marvel, la série Moon Knight l’utilise plusieurs fois), ici ce sont Miles et Spider-Man. Dans un silence pesant, Miles rentre chez lui en se remémorant des moments difficiles de sa vie, les moments dans lesquels lui comme Spider-Man n’ont pas été à la hauteur. C’est là qu’intervient le split screen couramment utilisé dans la saga pour rappeler l’art du comics. Le réalisateur et son équipe utilisent parfaitement l’animation pour faire des choses qu’il aurait été complexe de réaliser en live-action : lorsque le troisième écran partagé arrive, Miles rétrécit, il est littéralement écrasé par ses problèmes. Autre élément notable, ce qu’il se passe dans les écrans divisés se fige et adopte une teinte violette, la couleur du costume du Prowler, alias de l’oncle de Miles décédé dans Into the Spider-Verse. Voyons cela comme une manière de rappeler que la perte de son oncle affecte le protagoniste et constitue une partie de ses soucis. Deux plans plus loin, Miles est filmé en plongée zénithale comme si la menace planait au-dessus de lui, l’axe peu commun ajoute une sensation étrange et le spectateur commence peu à peu à sentir l’angoisse du personnage.


Une fois que Miles est rentré dans sa chambre, le spectateur peut se mettre dans sa peau et être aussi angoissé que lui. Ceci passe par un travelling compensé qui déforme l’environnement et un jeu avec le Spider-Sense qui s’active alors que rien ne se passe, le spectateur qui connaît bien les règles de cette capacité de Spider-Man s’attend à voir quelque chose de terrible et le contre-champ vide retranscrit ensuite le sentiment de paranoïa. Plus loin, les cases qui montrent les préoccupations de Miles recouvrent toute l’image et la submerge tout comme ses pensées prennent possession de son esprit angoissé. Au moment où Miles s’allonge, l’angoisse se multiplie et le métrage bascule presque dans l’horreur, en commençant par un petit jump-scare. La caméra qui était très mobile et multipliait les travellings est désormais réduite à de légers tremblements pour bien faire passer le sentiment de paralysie, c’est de plus la première fois qu’un plan subjectif est utilisé. A partir de là se lance un cauchemar qui met Miles face à lui-même (le combat intérieur de Miles contre sa crise d’angoisse) et qui le fait plonger dans ses peurs les plus profondes. Cette séquence fait ressortir la folie de Spider-Verse avec du mouvement partout dans l’image, une explosion de couleurs et des mouvements de caméra hallucinants. La perspective dans le plan à la quatrième minute donne réellement l’impression que Miles ne peut sortir de cette situation, ce train fantôme paraît infini. Ce plan se termine sur une caméra qui fait des loopings et qui rappelle le plan le plus marquant du film d’horreur français Vermines sorti l’année dernière, joli hasard un film avec des araignées. Le court-métrage fait, sans le vouloir, écho au film de Sébastien Vaniček avec une araignée géante et une attaque d’une horde de petites araignées. Comme le titre l’annonçait, l’araignée qui a donné des super-pouvoirs à Miles et qui en a fait un super-héros est également source de nombreux problèmes. J’aime beaucoup l’audace de cette mise en scène qui bascule dans l’horreur (utilisation d’une figure effrayante, des plans débullés faisant penser à Sam Raimi qui a œuvré sur Spider-Man), c’est aussi à cela que servent les projets plus confidentiels. Si je peux me permettre une petite critique négative, il manque la prise de conscience de Miles sur le fait de ne pas s’enfermer et ne pas à hésiter à aller voir son père pour demander de l’aide. J’émets également quelques réserves sur le combat contre soi-même qui est un procédé trop vu, dans Logan par exemple pour rester encore une fois sur du Marvel.


Le générique est accompagné d’une musique spécialement créée pour le film. Make it out alive de Malachiii conclut d’une belle manière en rappelant qu’il est normal d’appeler à l’aide, ce qui correspond aux dernières images du métrage mettant en valeur la sublime relation entre Miles et son père. Une relation qui sera rudement mise à l’épreuve dans Beyond the Spider-Verse qui va faire trembler la Terre et nos cœurs de fans. En attendant, nous pouvons profiter à volonté de ce court-métrage qui ravira les inconditionnels du Tisseur.

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le 29 mars 2024

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BestPanther

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