Les tambours de guerre résonnent. Et épousent le rythme du sang qui bat dans mes tempes. Frénétique.


Les corps, eux, se désarticulent dans une danse éperdue, autour du feu qui embrase la nuit.


Et tandis que les prophéties et les chants entêtent les esprits, les cris gutturaux s'envolent pour déchirer le ciel.


Voilà comment se vit, au cinéma, The Northman, qui signe le nouvel achèvement de Robert Eggers.


Soit une véritable expérience viscérale et intensément sensorielle, en forme d'un aller et d'un retour vengeurs, qui trempe la lame de son épée dans la boue primordiale des émotions élémentaires qui aliènent et rendent un homme à peine mieux qu'une bête... Un berseker.


Soit une véritable expérience immersive, transcendée par l'art du tableau de maître que l'on connaît du metteur en scène depuis le formidable The Witch, et qui s'abreuve encore une fois de mythologie, de religion, de superstitions. Les décors de l'Islande n'y sont pas pour rien, entre désolation spectrale et luxuriance d'un autre monde, entre le vert intense de la vallée, le brun de la boue et le gris calciné d'un foyer éteint.


Et irriguées de visions scotchantes matérialisant la question de l'héritage et de la transmission. Tandis que la soif de violence aveugle et prend toute la place, transformant la destinée en éternelle tragédie figée.


Celle d'Amleth se muera bientôt en chanson de geste, apte à être transmise par la tradition orale. Elle touche immédiatement à une terrassante marche funèbre, servie par le monolithe noir Alexander Skarsgard.


Et s'il y a bien sûr, comme on a déjà dû l'écrire ici, de la scène virtuose, du plan séquence d'une efficacité démoniaque ou encore de la substance cinématographique à revendre, The Northman s'impose surtout comme un intense et résolu poème guerrier. Une œuvre qui se passera aisément des mots de n'importe quelle critique pour privilégier le langage de ses percussions sauvages, la puissance des images de sa mystique, ainsi que les couleurs de son drame, entre le sang de la vengeance et la cendre des lignées qui s'éteignent.


Behind_the_Mask, ♫ I just can't wait to be (vi)king...♪

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le 11 mai 2022

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