Il faut quelques minutes pour tomber sur le cadeau merveilleux que propose le documentaire de Christophe Conte. L’anecdote est si glaçante et merveilleuse qu’on en voudrait même pas à Carey Fleiner, qui tient le pub en face de la maison d’enfance des frères Davis, si par hasard elle avait inventé ou même juste enjolivé l’histoire, tant elle est frappante.


Ray et Dave sont les 7 et 8ème enfants d’une famille très modeste londonienne, et en sont les premiers garçons. Parmi leurs six grandes sœurs, les plus âgées quittent peu à peu le foyer au fur et à mesure de leur majorité et leurs mariages. Lorsqu’il a 13 ans, Raymond désire plus que tout une guitare, que sa mère ne peut lui offrir. Sa sœur Renée revient du canada le matin de son anniversaire et lui offre la fameuse guitare. Un peu plus tard dans la journée, elle joue au piano une petite mélodie et lui montre quelques accords pour qu’il essaie de l’accompagner. Le soir même, elle sort dans un night-club de la capitale et meurt d’une crise cardiaque sur la piste de dance.


Cette guitare offerte par sa sœur le jour de sa mort (et de son propre anniversaire) aura, on s’en doute un impact incommensurable sur le jeune Ray, qui racontera dans de nombreuses interviews qu’il a passé le plus clair de sa carrière à essayer de retrouver la mélodie jouée par sa sœur.
Peut-on imaginer plus belle et plus cruelle muse?


.
Par ailleurs, le documentaire répond en filigrane à une question que tous les amateurs de pop sixties se posent depuis 60 ans: peut-on résumer la carrière des Kinks au seul intitulé de «Beatles qui n’ont pas eu de bol ?». En creux, la réponse se dessine peu à peu. Il y a ce que tout amateur savait : des frères qui s’entre-déchiraient un peu trop souvent, un label moins clairvoyant que celui des Beatles, des Stones ou des Who, et une interdiction de séjour (de 66 à 69) aux States qui les priva d’un envol international dont bénéficièrent leurs rivaux.


Et puis, il y a le reste. La personnalité détachée et à contre-courant de Ray, qui cherche en permanence à aller à rebrousse-poil de toutes les modes et de toutes les attentes. Il y a si bien réussi que, si son talent monstrueux lui a permis d’échapper au désastre, il n’aura cependant pas été suffisamment épaulé (Paul avait John, Mick avait Keith, Pete avait Roger) pour trouver la lumière aveuglante de la célébrité mondiale que son niveau stratosphérique de songwritter méritait.


L’eût-il d’ailleurs trouvé, on se demande bien ce qu’il aurait voulu en faire…

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le 16 mai 2020

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guyness

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