The Grudge 2020 pose, une fois encore, la question de la violence lorsque celle-ci quitte progressivement le champ du récit pour devenir une fin en soi, lorsqu’elle s’autonomise au point de ne plus rien dire de l’univers dont elle est censée émaner. Aussi le film se dégrade-t-il à mesure qu’il avance : l’enchâssement des intrigues et des temporalités constitue d’abord une bonne idée en soi, et l’agencement de ces épisodes, telles les pièces d’un vaste puzzle, reste lisible. Nous avons là un kaléidoscope horrifique dont les facettes renvoient toutes à la même malédiction, déclinée selon le pays, l’âge de la cellule conjugale qui la subit, si bien que la vengeance, étalée sur une heure et demie, prend l’aspect d’une épidémie qui jamais ne cesse.
Pourtant, au fil des révélations, les scènes tendent à se répéter, les images glauques sont reprises et montées les unes à côté des autres, petit condensé dégoûtant de la barbarie dans laquelle le film paraît désormais se complaire. L’expression artistique de cette malédiction perd en originalité et recourt aux codes éculés du genre, à commencer par ces terribles jump scare qui pullulent lorsque les fils dramatiques se resserrent. En résulte non seulement un appauvrissement de l’horreur construite mais également un oubli de l’univers mis en place par Takashi Shimizu.
Si l’actrice principale, Andrea Riseborough, s’avère plutôt convaincante et campe un personnage à la force fragile, les seconds rôles ne bénéficient pas d’une écriture suffisante pour les complexifier : bien interprétés, ils se suivent, se ressemblent et s’annulent entre eux, à l’image des séquences d’épouvante. The Grudge 2020 aurait dû penser la violence au lieu de s’y jeter avidement ; en résulte une production aux réussites locales et à la mise en scène propre, mais qui manque d’audace et surtout n’impose jamais une nouvelle lecture du récit original ici investi.