Un chauffeur de taxi, ancien combattant au Vietnam, erre la nuit dans New York. Il garde en lui toute la rancœur et la révolte du monde.
Et le problème est là : jamais dans ce film on ne ressent cette haine qu'il renferme. Robert de Niro a beau être très droit et limpide dans son interprétation, son personnage semble davantage perdu que révolté. Il respire le racisme et parle à plusieurs reprises de "racaille" pour désigner un morceau de société qu'il vomit. Mais sa colère ne monte pas crescendo, il reste toujours aussi stone. Putain d'insomnie. Donc jamais l'intensité grimpe chez le spectateur.
Scorcese pratique un cinéma pointu et travaillé. Il n'a plus rien à prouver et son "Shutter Island" démontre toute la réflexion qu'effectue le bonhomme. Pour "Taxi Driver", c'est pareil ; plein d'idées ressortent et cette envie de montrer l'ascension de la folie chez le "héros" est déjà présente. Or, ici, le spectateur n'a pas la gorge serrée, ni la goutte au front. Même quand le caractère de Travis change de bord, il ne tique pas. Tout est question de point de vue, qui reste très extérieur à la scène. La musique contribue à rendre ce film culte comme les dialogues portés par les mimiques de ce tout jeune Robert.
Ces éléments laissaient présager la bonne note à la sortie. Mais la fin a tout gâché. La qualité change, et tout est moins crédible. Et toujours pas de haine visible à l'horizon. Juste un mec qui fait le mal et passe finalement pour un héros. Le bon qui sauve la veuve et l'orphelin, en somme. Peut-on alors parler de politiquement correct ?