J’aime les avions, Clint Eastwood et Tom Hanks, dans cet ordre. Autant dire que j’attendais beaucoup de Sully. J’avoue ma déception. Je vous vois venir, si je me suis ennuyé, je ne peux m’en prendre qu’à moi car pas un détail du vol US Airways 1549 du 15 janvier 2009 ne m’était inconnu. Certes, mais je peux en dire autant de la vie de Jésus ou de Dalida. Non, la faiblesse de ce biopic est à chercher dans la limpidité de la vie de Sullenberger. Quarante années de vol sans une anicroche. Un gars rangé. Une seule femme, deux filles, deux maisons et des soucis financiers. Manifestement, les pilotes américains ne disposent pas du train de vie de leurs collègues d’Air France. Sully témoignera devant la Commission des transports de la Chambre des représentants de la forte dégradation des conditions salariales de son métier.


Alors, pourquoi lui consacrer un long métrage ? Pour trois minutes de vol au-dessus de New-York. C’est court. Clint a beau nous faire revivre la séquence quatre ou cinq fois, rêves inclus, c’est trop court. Il tente de stimuler notre intérêt en diabolisant l’expert adverse. L’enquête publique lui permet d’insister sur l’importance du facteur humain, ce mystérieux mécanisme par lequel le pilote va puiser dans son expérience et son intuition la décision gagnante.


Tom Hanks (Chesley « Sully ») est bon. Il a sauvé ses passagers et son équipage. Tout va bien. Mais, va-t-il perdre sa raison de vivre et son gagne-pain. Pouvait-il épargner l’avion ? Une bricole à 100 millions de dollars. Les questions de l’assureur parviennent à l’ébranler. 280 secondes de vol pour juger d’une vie, est-ce juste ?


Aaron Eckhart (Jeff Skiles) est encore meilleur. Arrêtons-nous sur le destin d’un copilote. Contrairement à l’idée reçue, un avion n’a pas deux pilotes, mais un commandant de bord, seul maître à bord, et un assistant. Eckhart joue admirablement bien le second. Il égrène les procédures, ses mains jouent sur le tableau de bord. Il n’ignore rien du tragique de la situation, mais conserve son sang-froid. N’étant pas consulté, il se tait. Sans doute, cet homme mûr se réjouit-il, à cet instant, de n’avoir jamais postulé pour le siège de gauche.


D’ailleurs, si Skiles vole encore, il n’est pas passé commandant de vol. Comme Sully, aujourd’hui retraité, il améliore sa solde en négociant ses conférences. Brodant sur le « Miracle sur l'Hudson », il forme à la gestion de crise. Ses honoraires vont de $ 10.000 à $ 20.000 la soirée.

Créée

le 20 févr. 2017

Critique lue 1.5K fois

19 j'aime

Step de Boisse

Écrit par

Critique lue 1.5K fois

19

D'autres avis sur Sully

Sully
Behind_the_Mask
8

When Heroes Go Down ♫

Le projet Sully pouvait être une nouvelle occasion de célébrer le all american hero, le type normal soudain pris dans une situation extraordinaire, devenant infaillible et porté au rang d'icône...

le 30 nov. 2016

63 j'aime

15

Sully
guyness
5

L'avion, la vie, et un long fleuve tranquille

La notion aux contours les plus flous et à la géométrie la plus variable est sans doute celle du con. On pourrait se contenter, pour donner une idée de la complexité du concept, de reprendre le...

le 8 janv. 2017

52 j'aime

19

Sully
SanFelice
6

Preux homme

Alors, le petit Clint, on l'attend au tournant, une fois de plus. On le connaît, le gaillard. Ça fait 45 ans qu'il nous bassine avec ses histoires de héros, et au moins 20 ans qu'il nous dit, par...

le 7 déc. 2016

43 j'aime

14

Du même critique

Gran Torino
SBoisse
10

Ma vie avec Clint

Clint est octogénaire. Je suis Clint depuis 1976. Ne souriez pas, notre langue, dont les puristes vantent l’inestimable précision, peut prêter à confusion. Je ne prétends pas être Clint, mais...

le 14 oct. 2016

125 j'aime

31

Mon voisin Totoro
SBoisse
10

Ame d’enfant et gros câlins

Je dois à Hayao Miyazaki mon passage à l’âge adulte. Il était temps, j’avais 35 ans. Ne vous méprenez pas, j’étais marié, père de famille et autonome financièrement. Seulement, ma vision du monde...

le 20 nov. 2017

123 j'aime

12