Il était une fois, dans une galaxie pas si lointaine, la planète Hollywood. Sur cette planète prolifique et très riche vivait un Jedi expérimenté, qui répondait au doux nom de J.J. Abrams. Avec sa série Lost : Les Disparus, ses reboots de Star Trek, son Mission Impossible 3, son Super 8, et aujourd’hui sa suite à Star Wars, cet homme a su remplir les caisses de sa communauté et satisfaire un public toujours moins exigeant. Mais sur la planète Hollywood comme ailleurs, à trop courir après l’argent, on finit par rejoindre le côté obscur. Et accessoirement, par devenir le plus grand des escrocs.


A la merci des studios, le Jedi Abrams est certes un bon faiseur : à son palmarès se bouscule une multitude de blockbusters, fabriqués sur mesure pour tenir le public hollywoodien éveillé. Mais parmi ses productions diverses, l’originalité et surtout une véritable identité viennent à manquer. Il faut dire que lorsqu’on s’attaque à des monstres sacrés du cinéma, tels que Brian De Palma, Steven Spielberg, et dans le cas présent, George Lucas, il s’avère difficile de se découvrir une fibre artistique et d’exprimer sa personnalité. Car Abrams semble bel et bien se condamner lui-même à vivre dans l’ombre des géants en se complaisant dans des suites médiocres (Mission Impossible 3), des hommages d’une extrême platitude (Super 8) ou des reprises d’univers cultes, que le réalisateur ne manque pas de dénaturer à sa guise. Et c’est malheureusement le cas pour ce nouveau Star Wars.


Car oui, entre les mains de J.J. Abrams, Star Wars est bel et bien dénaturé, pour ne pas dire violé : on retrouve bien les personnages qui ont fait la légende de la trilogie originelle (le « based on the characters created by George Lucas » est là pour en attester, au cas où on aurait un doute), mais l’ambiance dans laquelle ils sont plongés n’a plus grand chose à voir avec celle de La Guerre des étoiles. Les créatures n’ont plus rien d’organique, le droïde BB-8 n’a pas autant d’âme que R2-D2 et le Suprême Leader Snoke semble tout droit sorti d’un film Harry Potter. La magie et l’émotion elles, sont totalement étouffées dans cet opus dévitalisé, qui se voudrait nostalgique mais ne parvient qu’à être pantouflard. Le scénario reste lui aussi dans sa zone de confort, ne laissant place à aucune surprise : l’intrigue est sensiblement identique à celle de l’épisode IV, le méchant porte un masque superflu pour se la jouer Dark Vador et des histoires de filiation viennent une nouvelle fois innerver tout le film. Si une trilogie inédite doit voir le jour chaque fois que les descendants sont devenus grands, beaux et forts, la saga n’est pas près de s’achever !


Les rejetons en question ne parviennent pas non plus à relever le niveau de ce naufrage intergalactique. Le pauvre Adam Driver, découvert et apprécié dans la série Girls, n’est pas gâté : pour son premier grand rôle dans une superproduction, le petit doit assumer les névroses d’un méchant hystérique et incroyablement ridicule. Il faut dire que ce fou de Kylo Ren devrait songer à soigner ses crises de colère (et sa coupe de cheveux, aussi) au lieu de tout détruire sur son passage à coups de sabre-laser. Quant à Daisy Ridley et John Boyega, les « jeunes recrues » comme on pourra les appeler, il faudrait leur acheter une bonne dose de charisme, ou des cours de théâtre, ça pourrait leur servir. On ne parlera même pas de Mark Hamill, relégué au statut de figurant pour la modique somme de dix millions de dollars. Heureusement que Carrie Fisher et Harrison Ford sont là, car les visages de Star Wars, c’est bien eux.


Devant cette montagne d’échecs, on en vient à s’interroger sur la véritable nature de ce nouvel épisode. Copie conforme ? Opus nostalgique ? Nouveau départ ? Non, il semblerait qu’en réalité, J.J. Abrams ait créé une longue publicité pour les six premiers films, destinée à la nouvelle génération qui n’est pas encore initiée aux pouvoirs de la Force. Oui oui les enfants, la saga Star Wars a bien existé, et on vous pond un film inutile et désenchanté pour vous le prouver. En somme, le Jedi Abrams s’évertue à reconstruire un mythe qui n’avait pas besoin de renouvellement, tant il a traversé les âges par son intemporalité. Au lieu de se démener à réduire en bouillie le travail de ses prédécesseurs – car Le Réveil de la Force est bien plus qu’un mauvais Star Wars, c’est un mauvais film -, ce cher J.J. Abrams ferait mieux de se consacrer à des livres d’histoire du cinéma, ou mieux, de se construire une véritable individualité de cinéaste. En espérant que la Force sera davantage du côté de Rian Johnson (Looper) et Colin Trevorrow (Jurassic World), réalisateurs des deux prochains épisodes.


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le 6 mars 2016

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Amy  Furler

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