L’univers étonnant de ‘Snowpiercer’ n’est certainement pas le plus crédible qui soit, mais le film a le bon goût de fournir quelques explications simples à la situation. Les mots d’introduction, le cours sur Wilford, les souvenirs des survivants ingénieusement disséminés au fil du récit, sont autant de preuves pour le spectateur que le contexte du film n’est pas qu’un simple fantasme d’auteur. On ne gobera évidemment pas tout (le kromol explosif comme astuce scénaristique, la viabilité de la société présentée, le moteur perpétuel), mais il est rassurant de se plonger dans une œuvre de science-fiction cohérente.

De toute façon, ‘Snowpiercer’ prouve très rapidement son sérieux. En quelques plans, le film révèle les injustices qui séparent l’avant et l’arrière du train, et annonce l’insurrection imminente. La vision des choses est évidemment distordue, mais elle est percutante, à la différence de la lutte des classes édulcorée d’un ‘Hunger Games’ par exemple. Pour cela, le réalisateur n’hésite pas à frapper fort, avec le passage douloureux de la punition du lanceur de chaussure.

En fait, Bong Joon-Ho délivre une œuvre d’une noirceur stupéfiante. D’un part, la dystopie qu’il décrit est effrayante, en particulier le rôle des enfants qui y est crispant. Les mystères du train nous captivent jusqu’à la fin, brillante, mais pas tout à fait exempte de défauts. D’ailleurs, il est intéressant de comprendre comment la révélation finale est annoncée par de subtils indices cyniques au fil de l’intrigue : la référence à ‘Soylent Green’, la mention à l’écosystème de l’aquarium.

Mais la véritable réussite noire de l’œuvre, c’est une mise en scène phénoménale, compte tenu du cadre du récit. Les scènes de combats sont incroyables, notamment l’inoubliable bataille contre les hommes cagoulés. A cela s’ajoute les environnements différents de chaque wagon, et une utilisation dosée de ralentis. Les effets spéciaux auraient gagné à être un peu plus propre (les accumulations de neiges dégagées par le train), mais sont largement satisfaisants. Quant à la bande-originale, elle est également de qualité.

Enfin, l’œuvre profite d’un casting intéressant. Chris Evans est surprenant dans ce rôle de parfait antihéros. Antihéros parce qu’il devient meneur sans le vouloir, mais aussi et surtout parce que la fin de l’œuvre nous apprend qu’il est loin d’être un homme bon. L’acteur est convaincant de bout en bout, même si on peut lui reprocher quelques faiblesses sur la fin. A ses côtés Tilda Swinton livre une prestation marquante, tandis que les compagnons de Curtis se rendent attachants sans même faire d’effort.

Une dystopie marquante.
Kroakkroqgar
8
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le 20 mai 2014

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Kroakkroqgar

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