Partir du constat que les films d’horreur sont bourrés de clichés mais qu’on aime bien les regarder pour rire de leurs défauts et / ou pour avoir effectivement peur quand ils sont plus réussis, c’est sans doute comme ça que Wes Craven a imaginé Scream. De la part d’un réalisateur connu pour ses films d’horreur, Les Griffes de la Nuit, La colline à des yeux... ça paraît plutôt pertinent. Si on peut facilement se planter, mais quel jeu de mot, en mêlant la comédie et l’horreur, je suis sûr qu’un exemple vous vient vite en tête, le film réussit très bien son pari à mes yeux, voyons pourquoi en écoutant la belle musique Red Herring.
La première scène est une excellente note d’intention pour tout ce qui va suivre. Le film incorpore le rôle joué par les films d’horreur dans la culture populaire, ses rôles iconiques, ses clichés... pour une mise en abîme assez sympathique puisque Scream est lui-même un film d’horreur. Le personnage féminin en danger sait faire preuve de courage et d’intelligence bien qu’ayant du mal à gérer son-froid en toute logique, elle est n’est pas juste là pour être une victime montrant toute la cruauté et la force de l’antagoniste.
La peur en tant que telle marche bien avec un début tranquille et une tension qui monte par paliers, d’abord quand le mec au téléphone sous-entend qu’il observe la fille depuis le début et que donc il ne s’agit pas d’un faux numéro, puis quand le petit ami arrive dans l’équation pour surprendre tout en relevant d’un cran les enjeux, enfin quand le tueur commence à apparaître un instant à l’écran alors qu’une échappatoire semble se profiler... C’est un rythme qui est parfaitement maîtrisé pour cette introduction et qu’on retrouvera sans surprise par la suite.
L’héroïne est vraiment l’exemple typique de la jeune étudiante plutôt jolie tout en paraissant naturelle, plutôt intelligente sans être particulièrement intello, plutôt badass quand il le faut tout en restant humaine dans ses réactions... c’est une final girl que Neve Campbell incarne superbement. Si quelques autres acteurs font le taf correctement, il faut tout de même admettre que pas mal sont dans le surjeu pur et simple, parfois ça passe parce que c’est clairement voulu et assumé, mais d’autres fois ça peut juste être lourd.
Le petit côté thriller du film est quant à lui très bien mené :
Le twist avec les deux criminels plutôt qu’un seul c’est tout con comme idée mais ça permet de mener en bateau le spectateur tout du long et d’offrir un certain degré de relecture, la journaliste avide de scoops n’est pas qu’un boulet mais permet de remettre en cause des éléments de l’intrigue comme avec le meurtre passé de la mère de Sid, révélation qui participe à rendre Syd humaine dans ses erreurs... Tous ces éléments typiques d’un thriller sont réussis à mon sens. Pour pinailler, je reprocherai juste le raccourci scénaristique quand Gale et Dewey tombent comme par hasard sur la voiture du père de Sid, le coup de bol un peu grossier.
L’OST comprend pas mal de morceaux pour renforcer la peur ou le spectaculaire mais aussi pour parfois instaurer une ambiance détendue surprenante qui marche très bien ou appuyer des moments plus mélancoliques, voire contemplatifs même si c’est plus rare. Ce plan au crépuscule où Sid s’endort avec les petites notes de piano de Red Herring, que je vous proposais en intro, est pour moi un bel exemple de la diversité et de l’efficacité du travail de composition de Marco Beltrami dont c’était pourtant l’une de ses premières OST, avant qu’il ne se mette à composer pour plein de films que j’aime pas trop, voire pas du tout, mais c’est un autre problème.
À côté de ça, Scream a su lui-même dès ce premier film dégager des petits gimmicks identitaires avec le fameux masque Ghostface bien sûr, la réplique sur ton film d’horreur préféré, la menace au téléphone... pour s’intégrer dans la culture populaire horrifique à laquelle il ne cesse de faire référence, ce qui permet de fournir déjà des pistes à suivre pour ses suites. Parce qu’il a beau se moquer de la nécessaire suite à des fins commerciales dans l’idée, il y cédera tout de même, une bonne chose ou non ça reste à voir d’un film à un autre je dirais.
Il y a quelques effets de mise en scène qui sont vraiment bien trouvé comme vers la fin avec l’utilisation de la caméra dans le film et du décalage de 30 secondes, une excellente idée qui permet de retrouver en plus cette notion de film d’horreur introspectif, qui a conscience d’en être un et qui l’assume pleinement dans son scénario. Bon après, on peut tomber dans des clichés, notamment de mise en scène, dont il peut se moquer mais ça n’enlève rien au fait qu’il tombe dedans à l’occasion.
Les mises à mort sont assez sobres, ce qui n’est pas nécessairement un défaut, par contre je leur reprocherai d’être assez peu inventives la plupart du temps pour simplement prendre la forme de coups de couteau. Ça colle bien avec le concept du film mais c’est tout de même un petit défaut, comme le manque de charisme de l’antagoniste qui se laisse facilement dominé en combat, qui commet des gaffes un peu grossières... c’est parfaitement voulu et justifié mais ça limite tout de même le potentiel du film pour moi.
Scream est un bon film d’horreur pour différentes raisons, pas seulement parce qu’il fait peur mais parfois parce qu’il fait rire, parfois parce qu’il brise des codes qui en avaient besoin, parfois parce qu’il est tout simplement agréable à suivre... c’est un film avec beaucoup de qualités dont le concept peut facilement rebuter et trouver ses détracteurs mais personnellement je l’apprécie, sans le trouver exceptionnel dans sa catégorie pour autant mais je l’aime bien et la saga n’arrivera malheureusement jamais à retrouver cette même estime pour ma part, à commencer par Scream 2.