C’est en plein cœur des années 80 et de l’Amérique de Reagan que Rocky IV voit le jour, un nouvel épisode pour la saga qui va ici sortir de ses modestes fondations pour chercher à parler de la grande Histoire.


Après avoir vaincu ses démons et remis les pieds sur terre en terrassant Clubber Lang, Rocky aborde son avenir avec plus de légèreté et de philosophie. Désormais confortablement installé dans son quotidien de champion aisé, il se consacre tranquillement à sa vie de famille. Mais, naturellement, ce ciel bleu ne peut rester ainsi et un nuage va faire son apparition. Tout droit venu d’Union Soviétique, un colosse ténébreux vient provoquer l’inébranlable Amérique en exhibant son invincibilité et sa puissance et chercher à défier la superpuissance adverse sur son propre sol. Un défi auquel Rocky semble destiné, mais c’est Apollo qui se voit ici blessé dans son orgueil et une nouvelle fois appelé à reprendre les gants pour redonner un sens à sa vie et éviter le repos du guerrier, qui n’est pas si loin du repos éternel, comme il le dit à Rocky alors qu’il le prévient qu’il veut se battre contre Ivan Drago.


Ce sont ainsi deux mondes qui se rencontrent et se confrontent, la première manche voyant les soviétiques jouer à l’extérieur, à Las Vegas, temple de l’opulence, symbole de l’idéologie capitaliste poussée à outrance. Devant ce spectacle plein de paillettes et tellement exagéré qu’il devient grotesque, Drago, le colosse, apparaît soudain tout petit, à la fois intrigué et provoqué par tout ce tintamarre, presque intimidé devant une telle différence par rapport à tout ce qu’il a connu. La sentence tombera hélas très rapidement, le monstre soviétique venant à bout de Creed de manière expéditive, au point que ce dernier perdra la vie sur le ring, tombant en guerrier, ce qu’il se disait être. L’heure est désormais à la vengeance pour Rocky, qui doit briser ce géant et ce qu’il incarne. Rocky IV va chercher à opposer sans cesse deux visions du monde et du sport, avec d’un côté le triomphe de la technologie et de la performance à tout prix et, de l’autre, la force brute, la communion avec la nature et le retour à l’état sauvage.


Présenté comme un véritable rat de laboratoire, Drago voit ses performances sans cesse mesurées, avec le concours de machines ressemblant parfois plus à des outils de torture qu’à des machines conçues pour le sport. Rocky, quant à lui, préfère s’isoler dans la campagne russe, affrontant la rudesse d’un hiver polaire pour s’entraîner à l’ancienne, avec des moyens rudimentaires, qui lui permettent d’aller chercher en lui cette force sauvage qui a toujours constitué son principal atout. Rocky IV va ainsi enchaîner à de nombreuses reprises les scènes d’entraînement, offrant au film une dynamique tout à fait particulière, la musique étant ici très présente pour accompagner le périple des deux combattants, de la virée nocturne en voiture avec l’exploration des souvenirs de Rocky, jusqu’à l’ascension de la montagne au crépuscule. Ce choix donne beaucoup de rythme à ce Rocky IV, mais c’est aussi ce qui lui a valu de nombreuses critiques, au point d’être parfois désigné comme étant un clip MTV géant. Car la musique est ici bien plus nerveuse, typique des années 80, très éloignée de la sobriété des mélodies de Bill Conti qui accompagnaient les films de la saga jusqu’ici, faisant partie intégrante de leur marque de fabrique, et étant ici étonnamment absentes.


En voulant illustrer les tensions de la Guerre Froide et l’absurdité de cette rivalité entre blocs occidental et soviétique, Sylvester Stallone ne fait pas forcément dans la finesse, étant souvent dans la caricature, mais cela n’empêche pas le message de passer ni de donner au film une vraie puissance communicatrice, qui trouve son apothéose dans ce combat final très symbolique. Un combat où l’humanité l’emporte, où la solide carapace dans laquelle a été enfermée un homme se brise pour finir par montrer ses failles et montrer que tous les Hommes sont constitués de la même manière, peu importe là où ils vivent ou qui les gouvernent. Un film bien ancré dans son époque, qui continue d’entretenir le mythe, ici sûrement au sommet de sa grandiloquence, toujours plus fort et puissant.


Critique écrite pour A la rencontre du Septième Art

JKDZ29

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