Le Viet-Nam, encore et toujours… Un pays que Ted Kotcheff connaît bien, lui qui vient de réaliser Rambo, l’un des plus gros succès sur le sujet. Il est vrai que nous sommes au début des années 80, la guerre américaine dans l’Asie du sud-est est terminée depuis 5 ans, mais ses séquelles, ses stigmates, ne sont pas résorbés. L’Amérique découvre un nouveau phénomène : les MIA, ou Missing in Action ; ces soldats pas morts officiellement et dont on ne sait pas si ils sont toujours vivants. Le pays apprend que rien n’est fait pour les rechercher, la guerre est finie et Washington est passée à "autre chose"… Un phénomène aussi traumatisant que la guerre elle-même, a-tel point que Hollywood va s’en emparer, sans doute "pour faire bouger les choses", trafiquer le récit national et au passage se faire plein de blé. C’est ainsi qu’arrive sur les écrans Retour vers l’enfer, qui sera suivi de Portés Disparus, Rambo II - dont c’est aussi le sujet - et pléthore de films de série B et de téléfilms.
Dans cet espace embouteillé sur le sujet, Ted Kotcheff a opté pour la sobriété, le film est nettement moins spectaculaire que ses concurrents. Le scénario est pourtant identique d’un film à l’autre : normal, en l’absence d’appui de l’Etat, des vétérans encore fringuants montent une opération clandestine imparable. Sauf que rien ne se passe comme prévu, la CIA leur confisque leurs armes et ils vont devoir se débrouiller seuls sur le terrain. C’est vrai pour Stallone comme pour Chuck Norris et donc pour notre équipe réunie ici. Bref malgré quelques détails, tous ces films sont presque des copier-coller issus de la même matrice : il faut retourner là-bas, botter le cul des "niakoués" - pour de vrai cette fois-ci - et ramener nos petits gars chez nous. A aucun moment on va imaginer commettre des attentats sur des sénateurs US pour leur faire changer leur politique face aux laissés pour compte de leurs sales guerres… Ce serait trop subversif !
Alors, nous voilà face à un épisode de l’Agence Tout Risque version Cinémascope. Le film se découpe en 3 parties, comme un épisode de la sus-mentionnée série : on expose les faits et les rôles principaux échafaudent un plan ; ensuite, on recrute des experts qui vont s’entraîner clandestinement ; enfin, l’équipe prête et déterminée accomplit la mission. Visuellement d’ailleurs, nous sommes là aussi au même niveau que la série : crash d’hélicoptères sans le moindre mort, ennemis stupides et effets pyrotechniques très limités. La seule chose qui sauve ce film à mes yeux, est son casting plutôt sympathique. Gene Hackman et Robert Stack en maîtres d’oeuvre de l’opération, et une belle brochette de seconds couteaux qu’on aimerai encore revoir de nos jours : Fred Ward et Randall Cobb en tête. Avec en plus, un beau rôle pour les débuts du regretté Patrick Swayze.
Je ne me souviens plus si Retour vers l’enfer - qui n’a rien à voir avec l’"autre" Retour vers l’enfer (Final Countdown) - a fait les beaux jours d’une Canal+ alors naissante mais je suppose que oui car je crois me souvenir l’avoir vu sur cette chaîne dans ma jeunesse. Dans cette machine de propagande qu’est Hollywood, RVLE n’est clairement pas le pire film sur le Viet-Nam, il est même plutôt sympathique, et a le bon goût de final cutter juste au bon moment, pour ne pas en faire plus. Façon de dire : voilà c’est tout, vous savez ce qu’il vous reste à faire… vous les politocards.
A voir pour parfaire sa culture ou pour une bonne petite virée guerrière, mais sur le sujet il y a eu bien mieux depuis. On va dire qu’il a le mérite d’avoir lancé le mouvement.