Le livre d’Ernest Cline était une mine de références à la pop culture des années 80 à nos jours : Steven Spielberg a marché sur ses traces en signant avec Ready Player One un véritable concentré de personnages, situations, lieux, scènes, musiques emblématiques du cinéma SF et/ou populaire. Un film somme. Un film sur les icônes des décennies qui ont justement été marquées par les blockbusters de Spielberg lui-même.
Avec Ready Player One, le réalisateur rend hommage à ses références, dont il se nourrit alors qu’il est pour beaucoup lui-même une source d’inspiration.
Ainsi, dans l’univers du jeune Wade Watts et dans les Etats-Unis de 2045, on retrouve le plaisir du jeu semblable aux jeux d’arcade des années 80. On danse en boîte de nuit sur la musique de Saturday Night Fever, on roule dans la DeLorean de Retour vers le futur et King Kong, le Géant de fer et Mechagodzilla peuvent s’affronter… entre autres ! Disons-le, car c’était un risque prévisible de l’exercice de style : aucune lourdeur ne se dégage de cet inventaire à la Prévert pop. Pourquoi ? Parce que Steven Spielberg réussit, à l’instar de son personnage principal dans l’univers virtuel de l’Oasis, à en faire un « jeu dans le jeu », une quête, un easter egg pour le spectateur avisé et avide de détails. Il faut voir cette course automobile effrénée dans un New York virtuel, ou encore cette scène qui prend le décor d’un grand film culte, dont on ne dira rien pour ne pas gâcher le plaisir : l’inventeur du blockbuster n’a rien perdu de sa superbe, son cinéma est encore l’un des plus jubilatoires.
Malheureusement, la beauté de la mise en scène et de l’univers peint dans Ready Player One est quelque peu gâchée par le déroulement de l’intrigue. Car derrière les plans-séquences ébouriffants et les mouvements de caméra nerveux de ce cinéma de divertissement de luxe, Ready Player One ne casse pas les codes du blockbuster classique : la chasse au trésor du jeune héros, porté à l’écran par Tye Sheridan, se transformera en combat épique et boursouflé. L’originalité repassera. Dommage, d’autant que l’univers dystopique dans lequel évoluent les personnages n’est finalement que peu montré et aurait pu être plus développé.
Aussi, le dénouement de l’œuvre laisse dubitatif (en substance, « rien n’est plus réel que le réel ») pour un film qui pendant deux heures a montré son inspiration et son intérêt pour la mise en scène et l’art vidéo ludique. On préférera retenir l’aveu de James Halliday (excellent Mark Rylance), inventeur de l’univers virtuel de Ready Player One, qui explique avec un regard enfantin que sa création est née parce qu’il ne se sentait pas bien dans le monde réel. À défaut de réel, il y a le virtuel. C’est aussi un peu ça, le cinéma de Steven Spielberg.