En me lançant un nouveau film avec le génial Reda Kateb, et des notes aussi bonnes pour un film français assez méconnu, je pensais être conquis d'avance. J'adore cet acteur et bien que ses films reposent très souvent sur l'intensité de sa performance, ça n’annonçait que du bon. Il n'en est rien, le résultat est en demi-teinte, et l'ancienne diplômée de la Fémis Léa Fehner a beaucoup de qualités, certes, mais aussi beaucoup de passif scolaire dans son cinéma. Elle est jeune, elle apprendra. Les Ogres, paraît-il, son prochain bijou.


Ce sont trois histoires, elles sont toutes centrées autour de la prison, ou plutôt des parloirs. Qu'un seul tienne et les autres suivront (superbe titre, repris plus tard par Kery James) s'attache à raconter LE moment, LE moment où tout bascule, LE moment où une prise de décision, une prise de conscience, peut briser vos espoirs à jamais. Cet instant est vécu dans les trois histoires. La caméra amorce une fixité étouffante, le cadre ne se dérobe que lorsque le personnage bouge. Beaucoup d'actions hors champ, le film se veut vraiment intimiste, et la bande-son est assez exceptionnelle. Le casting est intelligent et borné, Reda Kateb marche sur l'eau, comme à chacune de ses apparitions dans un film - les plus pointilleux diront Lost River.


Derrière ce drame très brutal et ses engrenages irrespirables, se cachent des récits qui, sortis du contexte du film, possèdent une écriture assez faiblarde voire carrément insensée. Comment passer à côté du double de Kateb, confrontation fantasque au possible ? Comment penser que Laure soit autant attachée à un tel pauvre type, alors qu'elle est elle-même l'archétype de la fille qui recherche une passion cérébrale avant tout ? Tant de manifestations grossières qui mettent en péril la valeur des histoires, d'autant plus lorsqu'elles sont, de base, totalement anecdotiques. On ne pourrait faire un film avec aucune des trois, car elles ne puisent leur force que par la mise en scène et le jeu, jamais par l'intelligence et la finesse de l'écriture ou des dialogues.


Au final, un film (et une réalisatrice) avec un énorme potentiel, mais gâché par un scénario rocambolesque et brouillon, où les frères Dardenne et Audiard sont déjà passés, avec mille fois plus de pertinence et de vie. Malgré une montée en puissance impressionnante, Qu'un seul tienne et les autres suivront peine à trouver son équilibre.

EvyNadler

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7

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