Je partais avec beaucoup d’a priori avec ce film. Alors que les projets soi-disant « féministes » s’enchaînent et ne sont que trop souvent inégaux, sa réputation ultra — " men are trash » et la surmarketisation du phénomène #metoo me faisait craindre le pire. À tort.
 
Bien qu’exhibant son concept de surenchère permanente, le film s’assume complètement et le rendu final en fait une œuvre assez démentielle, riche en rebondissements et très agréable à suivre. Porté par une Carey Mulligan divine, le personnage de Cassandra est un petit bijou de complexités, un condensé de caractère, de tristesse, d’intelligence, de colère, de détresse, de pudeur. Sous ses airs de femme forte qui terrorise les harceleurs, elle reste une petite chose brisée que l’on aimerait apaiser, ce qui est impossible tant la barrière qu’elle impose entre elle et le spectateur semble volontairement impénétrable. Une distance semblable à celle qu’elle établit avec les « grands salauds » du film, ce qui a le don de provoquer chez le spectateur cette sensation extrêmement désagréable d’être son ennemi, de ne pas avoir sa confiance, d’être mêlé à tous ces comportements odieux. C’est là la force du film, puisque ce ne sont pas réellement les personnages qui sont responsables de leurs actes, mais nous tous, notre société, nos préjugés, notre justice. Certes le fonds est vu est revu, mais la forme, elle, n’est pas banale et épouse le message à merveille. En cela je comprends que le film puisse en déranger certains qui acceptent de voir un film « qui dénonce » tant qu’ils ne s’en sentent surtout pas visés. Alors il est vrai que le film est extrêmement cynique, voire parodique pour le traitement qu’il réserve aux hommes, mais, pour cette proposition, pour cette histoire-là, c’est parfaitement voulu et cohérent, d’autant plus que les femmes sont loin d’être épargnées elles aussi, preuve que le sujet du film dépasse largement les indignations de chacun.
 
Promising Young Woman est un vrai film féministe coup de poing qui se paie l’intelligence d’assumer ses extravagances pour donner du relief à son propos. C’est ce qui fait qu’il se démarque d’une grande majorité de daubes consensuelles actuelles marketées « Girls power », qui n’ont autre prétention que celle de surfer odieusement sur de vrais sujets en se revendiquant progressistes juste parce qu’ils ont un personnage féminin qui casse des bouches. Et ça, c’est assez rare pour être souligné.

ManzaSky
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le 17 mars 2021

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