Prête à tout
6.6
Prête à tout

Film de Gus Van Sant (1995)

Pour sa soi-disant entrée à Hollywood, Gus Van Sant a fait plutôt fort. Plus le film avance, plus ça devient cru, les répliques deviennent plus franches, le film devient de plus en plus explicite et les clins d’œils pullulent. Ainsi on voit le réalisateur très rapidement à la fin du film quand Lydia est finie d’être interviewer et David Cronenberg apparaît en tueur.
Il a été dit que c’était le premier pied de Gus Van Sant à Hollywood… sauf que le film a été tourné au Canada (ce qui explique notamment l’apparition de David Cronenberg, qui est aussi acteur parfois). Le film se présente comme un long reportage en flash-back sur le destin de cette journaliste, Suzanne (Nicole Kidman géniale et en très grande forme).


Ainsi le film est rempli d’écrans, de caméras. C’est Gus Van Sant qui réalise le reportage sur toute cette histoire, ainsi il recueille le témoignage de la sœur du mari de Suzanne, le témoignage de Jimmy (Joaquin Phoenix surprenant, extraordinaire et très juste) en prison, le témoignage de Lydia (Alison Folland très naturelle) et d’autre part, les parents de Larry et de Suzanne sont interviewés à la télé tandis que Suzanne recueille son propre reportage.


Le film intelligent, joue sur tout ces témoignages : ainsi ici les jeunes sont des débiles, attardés, j’ai déjà noté Joaquin Phoenix et Alison Folland mais il ne faut pas oublier Casey Affleck en abruti immature obséder par le sexe, qui est excellent : quasiment à chaque apparition il nous fait marrer. C’est un film de Gus Van Sant car il aborde le lesbianisme et la sexualité chez la jeunesse.
Le film dans deux scènes successives aborde aussi la pédophilie avec un tact étonnant.


Les répliques très crues sont dits avec un naturel extraordinaire et donc très drôle, exemple Joaquin Phoenix témoigne : "Maintenant je peux plus regarder la météo sans me branler." et en fait le terme "branler" est censuré et quelqu’un en voix-off lui fait signe de ne pas dire dire ça et Phoenix dit : "Ah pardon désolé..". Il y aura aussi notamment une fellation mimée (une scène très drôle ou Suzanne pendant qu’elle fait une fellation à Jimmy s’arrête pour lui demander un service avant de recommencer et de s’arrêter et de recommencer, ainsi de suite...).


On note une très jolie scène, même magnifique et réaliste où Jimmy de sa voiture a mis la radio et la chanson "Sweet Home Alabama", Suzanne sort de la voiture et se met devant, les phares de la voiture l’éclairent et elle se met à danser et Jimmy parle tout seul et lui dit qu’il aime, peu avant il lui a dit : "Je t’aime, je ne pourrais jamais faire de mal ni toucher à une femme aussi belle que toi.", la réplique est très touchante et réaliste, Phoenix est très touchant à cet instant la.


Le film est très drôle, de plus en plus au fur et a mesure qu’il avance, rempli d’ironie : plusieurs choses fausses sont prononcées durant un témoignage ou de façon très innocente et juste après ces choses se passent sous nos yeux. L’innocence et la simplicité des trois jeunes gens est pour beaucoup dans l’humour du film.


Le film est passionnant, Gus Van Sant s’est déchaîné avec sa camera, il a compris pour ce premier film sur commande ce qu’il fallait faire pour être respecter à Hollywood et sa camera bouge sans cesse, les travellings sont nombreux, très rapides et jolis, typiques un peu du cinéma hollywoodien. Les acteurs ont l’air d’être un peu en roue libre (chez Van Sant ils le sont plus que moins), même si l’interprétation du film est très efficace et vaut pour beaucoup dans le film (je n’ai pas aimé les personnages d’Ileana Douglas et Dan Hedaya), on retient une prestation : celle de Joaquin Phoenix, son regard à la fois simplet mais aussi fou amoureux du personnage incarné par Nicole Kidman, on le voit devenir obsédé par elle, suffit qu’il la voie une seconde (yeux magnifiques de Joaquin Phoenix) et il a un coup de foudre, plus rien ne comptera, il fantasme sexuellement sur elle, il va se mettre à coucher très intensément et beaucoup de fois avec elle (on note l’enregistrement de son témoignage par les flics ou il donne tout les endroits puis le nombre de fois ou il a couché avec elle).


Déjà Nicole Kidman est très belle mais le simplicité du personnage de Joaquin Phoenix qui est amoureux de cette femme a son opposée et plus âgée que lui : "Je sais que pour toi, je suis qu’un gamin mais...", avant qu’il ne dise qu’il ne lui ferait jamais de mal et ne la toucherait rajoute une touche de réalisme a cette relation. Pour lui comme pour nous, qu’importe qu’elle se soit servie de lui, il en sera Toujours amoureux.
Qu’importe aussi que les deux interprètes aient seulement six ans d’écart : on y croit et c’est le principal.


En fait pour son entrée à Hollywood, Gus Van Sant a tourné un film qui est un contre-pied aux productions hollywoodiennes : c’est ironique mais je pense que le film as été écrit (adapté d’un roman de Joyce Maynard) a été écrit pour lui. Seul un cinéaste indépendant pouvait réaliser ce film. Le film, le plus coûteux du cinéaste (vingt millions de dollars) nous épargne les états d’âmes, les frustrations des personnages, tous sont un peu seules avec eux-mêmes, sont très détachées de la réalité, dans leur propre bulle, un regard dans ce film nous suggère fortement une pensée réaliser Il n’y a quasiment aucun gagnant, sauf Lydia.


Le film, comme beaucoup du cinéastes, prône le naturel, les acteurs sont épatants car soit ils savent qu’ils jouent un personnage, soient ils l’ignorent et c’est là qu’ils excellent.
On note aussi le soin particulier apporté à la bande-originale qui alterne une jolie partition de Danny Elfman et des chansons populaires comme celle que clôt le film (on note que le film se termine sur un long plan fixe après les derniers crédits du générique et se finit en laissant la chanson finir), ou "Sweet Home Alabama" déjà cité ci dessus.

Derrick528
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le 8 août 2021

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