Après Bryan Singer en 2000, Peter Jackson en 2001 et Sam Raimi en 2002, c’est au tour de Disney de lancer sa saga qui marquera les années 2000. Pari risqué puisqu’elle est la transposition à l’écran d’une attraction, Pirates des Caraïbes connaîtra un large succès et n’aura aucun mal à se hisser au rang de saga culte. J’aime cet univers et en particulier la première trilogie alors quand UGC décide de diffuser La Malédiction du Black Pearl en Culte je ne peux que courir en salle. C’est un bonheur de redécouvrir cette introduction sur grand écran et constater que le film n’a absolument pas vieilli vingt ans après quand le dernier Ant-Man n’a aucun fond vert correct (ça me fait mal d’écrire cela). Ce premier volet et ses deux suites constituent selon moi tout ce que devrait être un blockbuster à savoir de l’épique, des personnages légendaires, un univers riche et par dessus tout un vrai savoir-faire derrière la caméra. Gore Verbinski avant de devenir un massacreur de dieux et d’être recruté par Disney n’avait pas l’air réputé à en croire les moyennes sur SensCritique de ses films, Mickey lui a donné l’occasion de briller.


Attention spoilers


Je me dois de débuter cette critique en parlant du capitaine Jack Sparrow. Personnage désormais légendaire sur lequel repose la saga, il est le rôle d’une vie pour son interprète Johnny Depp. Que ce soit dans les mimiques ou la manière de parler, il transcende totalement le personnage. Il construit avec le metteur en scène et les scénaristes une certaine aura autour de ce protagoniste mystérieux dont les origines sont cachées et qui a inexplicablement survécu sur une île abandonnée. L’introduction de ce cher capitaine est prodigieuse, ce n’est pas pour rien qu’elle est une des nombreuses scènes cultes du film. Le cadrage et la contre-plongée qui le magnifient contrastent avec le montage qui donne un ton décalé à la séquence. Sa petite embarcation filmée comme les navires les plus conséquents du film et la musique de Hans Zimmer dont je connais la mélodie par cœur n’en finissent pas de rendre le capitaine Jack Saprrow grandiose. Cette entrée en scène nous fait comprendre qu’il est une légende, ou du moins un célèbre pirate sur le déclin. Un brin d’humour et de l’iconisation, le personnage pourrait être résumé à cette scène. Le capitaine Jack Sparrow est drôle grâce à son tact, ses répliques cultes et charismatique grâce à la caméra de Verbinski ou le charme naturel de Depp. Sa capacité à se sortir de toutes les situations en manipulant tout le monde et en planifiant tout dévoile au fil du film son intelligence. Il n’est pas celui qui évolue le plus mais il arrive à obtenir sa vengeance et à retrouver son statut d’antan. Chose remarquable dans la conception du héros : il n’est jamais ridiculisé. Il aurait été très facile de basculer dans le grotesque avec un tel personnage mais on se souviendra heureusement du 13 août 2003 comme du jour où ils ont failli ridiculiser le capitaine Jack Sparrow.


Pirates des Caraïbes est une vraie ode à la liberté. Le parcours de Will Turner et d’Elizabeth Swann va complètement dans ce sens. L’un veut quitter son job de forgeron, l’autre veut s’affranchir d’un milieu coincé qui la cloisonne. Les deux vont peu à peu basculer dans la piraterie, un milieu dans lequel ils se sentent vraiment à leur place et où ils pourront montrer l’amour que chacun ressent pour l’autre. Avant la rencontre avec le capitaine Jack Sparrow, Elizabeth est bloquée dans son corset qui l’étouffe, on voit facilement un rapport avec son entourage. Elle plonge ensuite entièrement dans le monde des pirates, elle y apprend les règles, le code d’honneur et adopte progressivement leurs méthodes tout en gagnant en charisme. Will Turner ira encore plus loin en sauvant le nouveau propriétaire du Black Pearl, on notera le parallèle entre son lancer d’épée qu’il exécute dans un premier temps pour arrêter le capitaine Jack Sparrow et pour finalement l’empêcher d’être pendu. Faire un film sur la piraterie est alors ici un prétexte pour faire un film qui donne envie de voyager et d’être libre voire de s’émanciper. La réalisation vient appuyer tout cela en sublimant les bateaux qui sont le moyen d’accéder à une nouvelle vie.


Pour faire une bonne saga, il faut également un bon méchant et c’est évidemment le cas ici. Il y a en réalité deux groupes d’antagonistes dans le film : d’un côté la bourgeoisie (et forces de l’ordre) de Port-Royal et de l’autre Barbossa accompagné de son équipage de traîtres. Une partie des vilains du film sont ceux qui emprisonnent les personnages rêvant de liberté et sont dépeints comme l’exact inverse des pirates. Le portrait dressé est peu valorisant : ils sont lâches et hypocrites tandis que les pirates ont un code d’honneur bien qu’il fasse plus office de guide que de règlement. Le vrai antagoniste qui restera dans les mémoires est bel et bien Barbossa. Du charisme et de vraies motivations, il n’en faut pas plus pour créer un méchant réussi. Ce pirate qui se retrouve maudit à cause de sa cupidité s’avère bien écrit. Toutes ses interactions avec Elizabeth ou le capitaine Jack Sparrow sont géniales. Le fait qu’il gagne d’une certaine manière en ressentant à nouveau le froid le rend d’autant plus marquant. La malédiction fait de son équipage de morts-vivants une terrifiante menace lors notamment de la séquence cauchemardesque durant laquelle Elizabeth comme le spectateur découvrent la particularité du Black Pearl. Voir ce genre de scènes dans un blockbuster tout public donne toujours le sourire.


Gore Verbinski met en image cet univers de la meilleure des manières. Ce monde mélangeant piraterie (chose qu’on voit peu au cinéma) et fantasy est déjà superbe sur le papier, le réalisateur lui donne parfaitement vie. Les effets spéciaux et fonds verts n’ont pas pris une seule ride puisqu’ils sont utilisés avec parcimonie. Verbinski laisse une place importante aux décors réels, au maquillage et aux costumes. En résulte un film qui est techniquement irréprochable. La mise en scène des séquences d’action est tout à fait à la hauteur des prouesses techniques. Le découpage laisse le spectateur voir les chorégraphies qui utilisent admirablement l’espace. Les acteurs et cascadeurs sont sans cesse en mouvement, ils vont dans chaque recoin du décor, montent et descendent avec une fluidité folle. Le montage lors des duels à l’épée alterne plans larges pour faire respirer le spectateur ou lui faire comprendre la géographie de la scène et plans plus serrés qui le mettent au cœur de l’action. C’est la plupart du temps jouissif et le climax pouvant s’appuyer sur un montage alterné maîtrisé ainsi que la composition grandiose de Hans Zimmer se révèle même épique.


Gore Verbinski nous souhaite la bienvenue aux Caraïbes à travers un opus généreux en humour et action qui ne souffre d’aucune baisse de rythme le long de ses 2h20. On a qu’une seule envie en le voyant : prendre le large sur le Black Pearl. Disney a produit un blockbuster exemplaire qui entre une scène époustouflante et un dialogue exquis n’hésite pas à célébrer la liberté. Le meilleur dans tout cela : ce n’est que le début d’une aventure qui n’en finira pas de gagner en intensité. Le revisionnage des deux suites fait d’ores et déjà partie de mes séances les plus attendues de l’année.

BestPanther

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