Je ne peux m’empêcher de déplorer le manque d’avis, et de popularité de ce film.
Je suis certainement influencée par mon amour pour l’histoire et pour les pays insolites en rédigeant cette critique. Cependant, ce film est une petite pépite. Vous savez, le genre de film inconnu au bataillon, méconnu des grandes salles, qui ne paye pas de mine à vue d’œil mais que vous considérez comme un chef-d’œuvre après l’avoir visionné. Voilà comment je considère Peu M’importe Si L’histoire Nous Considère Comme des Barbares.
Comment la population d’un pays de la guerre, fait-elle face à ses mémoires, de longues années après? Radu Jude fait le pari risqué de parler d’un sujet complexe, qui à la problématique d’être un sujet épineux car très subjectif. Ainsi, il nous offre une réelle interrogation : Comment traiter les mémoires d’un pays ayant commis des crimes de guerres innommables, près de 70 ans après ? Le film aurait pu faire l’erreur de nous donner une vision manichéenne du problème. Après tout, Ion Antonescu qui était au pouvoir en 1940 en Roumanie a bien été reconnu coupable d’avoir exécuté 500 000 militaires et civils, ainsi que déporté ou d’avoir assassiné de près de 300 000 Juifs roumains ou ukrainiens et de 15 000 Roms. De fait, la Roumanie est un pays avec un lourd passif, et il aurait été plus simple de condamner Antonescu et de réduire les mémoires de la Roumanie à des mémoires honteuses, tâchées de sang. Mais ce n’est pas ce qu’a fait le réalisateur.
Radu Jude nous offre une Roumanie enthousiaste, vivante, contemporaine, avec des souvenirs biaisés et une population qui idéalise Antonescu au point d’ignorer les horreurs commises lors de sa dictature.
Mais une personne en particulier décide de ne pas faire abstraction de ces crimes et d’en parler. Cette personne, c’est Mariana, le personnage principal qui décide de faire une mise en scène théâtrale visant à dénoncer le massacre d’Odessa de 1941 mandaté par Antonescu. Elle décide alors de lever le voile des mémoires de son propre pays, et de confronter le peuple à son passé. Seulement voilà... c’est un passé qui fâche. Et confronter une population qui idéalise un gouverneur de guerre qui s’en fout que l’histoire le considère comme un barbare...c’est compliqué. Mariana est pourtant déterminée. Elle va prouver à tout le monde que sa mise en scène va se faire, que les gens veulent voir les choses en face ou non, contents ou non.
Sur la forme cinématographique, je ne peux être précise, je me suis beaucoup plus intéressée au fond du film.
Toutefois, le réalisateur nous offre quelque chose de concis, qui nous permet de suivre le cheminement du récit sans trop grosses longueurs, même si quelques moment auraient pu être évités. L’histoire va tout de même à l’essentiel, le problème est amené rapidement et traité de manière objective. Ce film, à vrai dire, est un bel hommage à la Roumanie, un pays trop souvent sous-estimé et jugé, à tord, à cause de la méconnaissance et des amalgames qu’il y a autour. Personnellement, j’ai eu envie d’en savoir plus sur la Roumanie en sortant de la projection.
En bref, c’est un très bon film, qui nous fait vraiment bien cogiter. Il ne donne pas de réponse directe à la manière dont il faudrait gérer les mémoires sanguinaires d’un pays, mais il nous donne des pistes. Si vous êtes un amateur de cinéma, foncez! Mais si vous êtes un fan d’histoire, c’est encore mieux, n’hésitez plus!

Movieafficionado
10

Créée

le 13 oct. 2021

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