En auscultant le quotidien réglé et immuable d'un homme dont on ne sait rien Wim Wenders propose forcément à son spectateur une expérience de cinéma lente et déroutante.
Mais en posant ainsi une base aussi répétitive, il s'autorise avec malice son dérèglement. C'est lorsqu'un grain de sable vient donc temporairement se glisser dans l'engrenage et que l'imprévu tant fui fait irruption que le film délivre alors sa beauté pour se révéler en road trip intime où les destins de vies hasardeuses et maladroites viennent exhumer des joies, des peines et surtout des regrets.
L'opacité muette du personnage (déchirant Koji Yakusho, comme un alter ego nippon du cinéaste) se fêle alors au rythme de classiques du rock américain et laisse percer un sourire attendri devant l'évidente et sensorielle beauté des éléments.
Wenders prouve alors avec ce film épuré mais plus profond que laisse présager sa modestie, qu'il peut s'imprégner et respecter à merveille les codes d'une culture qui n'est pas la sienne tout en y distillant ce qui fait le sel de son cinéma : des sentiments simples et tus qui donnent une béate, littérale, mais jamais naïve, foi en l'humanité et procure un réconfort sincère.
Mais ça, on le savait déjà.