Les années 80, plus que d'autres, n'ont pas échappé à ce phénomène assez agaçant : le vocabulaire à la mode. D'où des mots ou des expressions qui, pendant une période plus ou moins longue, colonisent le langage courant de par leur omniprésence vite lassante.
Dans ses fameuses "Tranches de vie", le dessinateur Gérard Lauzier a caricaturé avec une ironie féroce les discours particulièrement creux qui découlent le plus souvent de cette forme de snobisme. Et, les deux étant étroitement liés, les comportements soit-disant libérés qui vont avec.
En passant derrière la caméra, il a évidemment voulu donner vie à des personnages très représentatifs de certains milieux sociaux. Ainsi, le jeune héros de "P'tit con", son 2e film, est la parfaite illustration d'une expression d'alors synonyme de stress et de frustrations en tous genres : "être coincé".
Pour être coincé, Michel, 18 ans et trois mois fils cadet d'un couple très style petits bourgeois, l'est tout à fait. En proie aux tourments sentimentalo-idéalistes qui traduisent le passage de l'âge dit ingrat à l'âge dit adulte. En conflit ouvert et permanent avec son père, indifférent à son avenir, écoeuré par tout ce qui a trait à la société de consommation (Vegan avant l'heure, pour ainsi dire), il a adopté une attitude de rejet systématique. Se sentant incompris et même carrément agressé par les autres, il se réfugie dans un journal intime où il note aussi naïvement que pompeusement ses états d'âme. Sans être toutefois dupe du côté dérisoire que cela revêt.
Il croit enfin accéder à un certain épanouissement en tombant amoureux fou d'une loubarde sans complexe et en se faisant adopter par la famille - a priori très positive - de son meilleur ami. Mais du côté amour comme du côté famille de remplacement, il va amèrement déchanter...
Michel, mal dans sa peau 23 heures sur 24, vit..; un "drôle de drame" passionnel.
Drame, car il est convaincu d'effectuer ce qu'il appelle sa descente aux enfers.
Mais aussi drôle, parce que cela est vu à travers l'humour on ne peut plus grinçant de Lauzier.
Mises à part quelques longueurs, "P'tit con" se regarde avec plaisir. Fait pour plaire aux jeunes de l'époque (mais, pourquoi pas, aussi à ceux d'aujourd'hui), devant se reconnaître en Michel, interprété avec beaucoup de conviction par un inconnu prometteur : Bernard Brieux. Il l'est hélas resté !
Avec, en prime, Guy Marchand, au mieux de son registre de jeu flirtant avec virtuosité avec l'antipathique ; et, surtout, Souad Amidou en Lolita de la zone (y compris érogène !). Une actrice qui ne passait vraiment pas inaperçue (déjà remarquée dans "Le grand frère", de Francis Girod), tant était rayonnante sa beauté très typée.
Mais attention : ignorer son talent alors mûrissant pour ne retenir d'elle que le côté "belle plante" était aussi injurieux que l'exclamation qui sert de titre au film !

Ticket_007
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le 25 juin 2019

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Ticket_007

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