Le parcours d’Ida Lupino est assez atypique. Surtout pour une femme, surtout à cette période. Elle commence comme actrice au début des années 1930 et bascule dans la réalisation et la production à la fin des années 1940, par hasard, comme toujours. Sauf qu’il n’y a pas vraiment de hasard. Outrage est son troisième long métrage en tant que réalisatrice scénariste. Une carrière hors du commun pour des thématiques hors des sentiers battus.
On suit la jeune Ann, employée tranquille destinée à un mariage sans histoire. La veille de la cérémonie, à la sortie du travail, elle est traquée par un type puis violée par celui-ci. Profondément choquée, Ann laisse tout derrière elle et fuit là où elle ne revivra pas son traumatisme dans le regard du quidam.
On notera en premier lieu la maîtrise totale de la mise en scène. La scène de poursuite est digne de figurer dans les classiques. Un magnifique travail de studio à l’éclairage parfait et à la tension maîtrisée. On pensera à de Palma assurément. On sera tout aussi estomaqué par le développement d’une thématique assez casse-gueule pour l’époque. On tient là une héroïne qui traduit les angoisses des femmes dont la parole pèse peu, toujours un peu coupables, même quand il leur arrive le pire. Un regard acéré sur la masculinité toxique en somme. Au rayon des franches réussites, notons aussi l’interprétation au poil de Mala Powers, en retenue et en emphase, toujours juste. Au final, un thriller dramatique très efficace et novateur, tant sur le fond que sur la forme.