Oppenheimer est une œuvre ample, démesurée, bruyante et exigeante, une nouvelle démonstration que le cinéma de Nolan peut faire cohabiter grand spectacle et expérimentation formelle, divertissement et intransigeance narrative.

En faisant se répondre le destin intime du créateur de la bombe atomique et les répercussions de ses travaux sur l’ordre mondial, qu’il changera à jamais, Nolan nous offre un gros moment de cinéma, massif et exaltant.

Taiseux, le scénario est principalement construit autour d’échanges scientifiques, de confrontations et d’audiences. Mais la précision du montage et l’extrême concision de chaque scène rendent parfaitement digeste ces dialogues certes ardus, mais intelligibles.

Oppenheimer démontre surtout une nouvelle fois la virtuosité du réalisateur pour éclater son récit sans jamais nous perdre. Il mélange les temporalités avec des flash-back et des flash-forward pour mieux construire son argumentation et développer la portée dramatique de son histoire, dont la tension va aller crescendo pour emmener le spectateur vers un dénouement tendu et inattendu.

Mais Oppenheimer et aussi une expérience sensorielle assez incroyable, aussi bien visuelle que sonore. Le sound design est particulièrement impressionnant, conférant au film une dimension viscérale. La mise en scène, alternant couleur et noir & blanc, espaces clos et grands espaces, est évidemment d’une minutie d’orfèvre, d’une beauté saisissante, servant d’écrin précieux à l’histoire que Nolan nous raconte. L’histoire d’une course à l’arme de destruction ultime, du combat intérieur qui agite le cerveau du scientifique et des répercussions politoques que sa découverte va déclencher. Le spectateur pénètre littéralement l’âme complexe et torturée de Oppenheimer, incarné avec passion et un talent nucléaire par Cillian Murphy. L’intensité du regard, la gravité de la voix, tout chez l’acteur traduit le trouble du personnage et l’ambiguïté que soulève sa création : va-t-elle assurer la paix dans le monde ou entraîner sa destruction ?

L’acteur peut déjà faire un peu de place sur sa cheminée pour la statuette des Oscars.

Et il serait temps que Christopher Nolan remporte enfin la sienne. Oppenheimer ne pouvait être une plus belle occasion.

Thibault_du_Verne
8

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le 25 juil. 2023

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