Les aventures de James Bond : 007 et le Lac aux requins

• La vanité aussi à ses risques.


• La vanité monsieur Bond, un défaut que vous connaissez mieux que personne.


• Ma chère petite, ne vous flattez donc pas. Ce que j'ai fait ce soir je l'ai fait pour la Reine et pour mon pays. Vous ne pensiez pas que ça m'avait causé le moindre plaisir j'espère ?


• Mais bien sûr j'avais oublié votre standing monsieur Bond. James Bond, l’homme qui n’a qu’à faire l’amour à une femme pour qu’elle entende chanter tout à coup le chœur des anges. Elle se repend et sans plus attendre elle revient sur la route du bien et de la vertu. Mais pas celle-là ! Quel choc cela doit être pour vous ? Vous avez essuyé un rude échec.


• On ne gagne pas à chaque fois.

Pour le quatrième épisode des aventures de l'agent 007, Terrence Young après avoir réalisé James Bond contre Dr. No et Bons Baisers de Russie revient en tant que réalisateur succédant au cinéaste Guy Hamilton à qui l'on doit Goldfinger. Je ne vais pas mentir, au début j'ai eu très peur lors d'une séquence d'ouverture où James Bond affronte au corps-à-corps un homme travesti en femme au cours d'une chorégraphie nerveuse malheureusement proposée en images accélérées dégueulasses. Un combat visuellement étrange qui se poursuit par une fuite en jet pack pour se terminer dans la fameuse Aston Martin qui tire des jets d'eaux à hautes pressions, alors... comment dire...

Commence le générique musical sur une superbe chanson de Tom Jones au milieu de silhouettes de filles nageuses plutôt bien réalisé. On reprend finalement sur James Bond en cure de soins qui use de beaucoup de chance puisque dans ce centre se trouve l'homme qui comme par hasard le conduira à rejoindre la fameuse mission sur l'enlèvement des deux ogives nucléaires commanditée par l'organisation SPECTRE. S'ensuivra une scène des plus hilarantes et grotesques dans laquelle James Bond allongé sur une table lombalgique se retrouve violemment gigoté dans tous les sens, si bien qu'on dirait qu'il fait l'amour à la table. Sur l'instant, je me suis dit que ce genre de scènes ce n'est juste pas possible. Puis vient le rassemblement de tous les agents 00, tous réunis à cause de l'importance de la mission : '' Opération de tonnerre. '' Une séquence très intéressante mais grossièrement élaborée dans laquelle nous voyons une réunion ultra-secrète dans un gigantesque bâtiment dans lequel apparaît une carte géante sur le côté du mur avec les dossiers ''Classés Secrets'' ainsi que tous les agents 00, au nombre de 9 tous présentés de dos. Jusque-là me direz-vous c'est parfait sauf que, que ce soit la carte géante, les dossiers ultras Secrets, ou encore tous les agents 00, tous font face à une gigantesque fenêtre qui s'ouvre en grand sur un immeuble avec des centaines de fenêtres. Tous les éléments les plus secrets des Britanniques sont rassemblés et divulgués dans une salle à la vue de tous. Paye ta crédibilité !

À ce moment-là, je me suis dit que j'étais certainement en train de regarder ce qui allait être un des pires films de James Bond, sauf que passer les 20 premières minutes Opération Tonnerre trouve une forme beaucoup plus engageante et réaliste qui va totalement transformer le film en une grande fresque d'action sous-marine dans laquelle on va retrouver le véritable James Bond.
Les scénaristes Richard Maibaum et John Hopkins ramènent au-devant de la scène l'organisation criminelle mondiale SPECTRE, dans un scénario de contre-espionnage habilement entretenu par une intrigue efficace, concrète et instructive en s'inspirant d'une histoire vraie : celle où en janvier 1961 la Caroline du Nord a failli être rayée de la carte après la perte de deux bombes nucléaires suite au crash d'un bombardier B-52. Et comme si cela ne suffisait pas, quelques mois après la sortie du film, soit le 17 janvier 1966 survient un autre incident aussi catastrophique puisque l'Amérique perdra quatre bombes nucléaires sur les terres d'Espagne. Deux seront détruites durant le crash réduisant à néant plusieurs hectares de terre à cause de la radioactivité, une autre bombe sera retrouvée immédiatement grâce au parachute de sécurité qui c'était ouvert, alors que la dernière disparaîtra durant 80 jours. Dans un tel climat les scénaristes frappent très fort avec une telle proposition malheureusement, fatalement et tristement d'actualité ce qui confère une ambiance particulière à cette quatrième mission Bondesque.

• James ! Et à quoi pourriez-vous la reconnaître ?


• Très facile. Elle a deux grains de beauté sur la cuisse gauche !

Une aventure exotique passionnante située aux Bahamas avec des paysages somptueux (on visite également la France et l'Angleterre) et des gadgets un peu plus crédibles : passé la fameuse lance à eau sur l'Aston Martin. Les scènes de combat sous-marin sont impeccablement réalisées. Les nombreuses séquences d'infiltrations fonctionnent à merveille notamment celle sous l'eau avec les requins gravitant autour, offrant un contraste sous tension perceptible. Que ce soit dans la piscine ou dans la mer la menace des requins se fait constante. La confrontation finale illustrée par une guerre immergée dans les flots entourés par des requins est absolument saisissante ! Une véritable boucherie où tout le monde y va de son harpon et de son couteau. Un affrontement qui m'a captivé de bout en bout et qui se soldera sur un duel final percutant à bord d'un hydroptère incontrôlable qui offrira l'un des meilleurs duels d'un James Bond. Visuellement le film est impeccable la photographie sous-marine en jette, à savoir qu'Opération Tonnerre est le premier et le seul film de la licence à remporter l'Oscar des meilleurs effets visuels spéciaux.

Enfin, on retrouve le vrai James Bond ! Cela faisait depuis deux films : Bons baisers de Russie et Goldfinger, que l'agent 007 était relégué au second plan, laissé comme simple spectateur des événements, subissant les actes plutôt que de les provoquer. Un choix scénaristique particulièrement frustrant enfin délaissé au profit de l'espion anglais. Le revoici de nouveau dans la partie avec une conduite bien plus proche de celle vue dans James Bond contre Dr No dans lequel il avait une attitude certes sexiste mais beaucoup moins '' scandaleuse '' que dans les deux épisodes suivants, avec un humour ironique toujours présent mais bien moins dédramatisant. Sean Connery est au top le comédien est toujours aussi charismatique dans ce personnage qu'il maîtrise si bien. Quatrième apparition pour Bernard Lee en tant que M, et Lois Maxwell en tant que Miss Moneypenny qui comme toujours joue de taquinerie sexuelle avec un Bond qui inlassablement frime lorsqu'il entre dans le bureau du patron en jetant son chapeau sur le porte vêtements. Porte vêtements, qui cette fois-ci va changer de place ce qui surprendra James Bond qui y perdra son chapeau. On retrouve l'agent de la CIA Felix Leiter, cette fois-ci incarné par Rik Van Nutter.

Emilio Largo alias " N°2 ", joué par Adolf Celi fait office d'excellent antagoniste principal avec son cache-œil noir et cette posture de gentleman au tempérament maîtrisé. J'aime beaucoup ce méchant que je trouve très charismatique et authentique tant il pourrait être vrai. Avec Largo, on est bien loin des caricatures du mal. C'est un homme impitoyable toujours dans la retenue qui se délivre peu et dont on apprend quasiment rien, si ce n'est qu'il voue une fascination aux requins mangeurs d'hommes et qu'il est prêt à tout. N'hésitant pas à torturer sa prétendue nièce '' Domino '' en écrasant sa cigarette allumée sur le haut de sa poitrine. Pour lui, seul le résultat compte, c'est pour cela qu'il en arrive à jeter l'un de ses hommes de main en pâture aux requins parce qu'il a échoué face à 007. La comédienne Claudine Auger en tant que Domino est une étonnante et élégante James Bond Girl. James Bond Girl qui a été traitée avec '' respect '' autant dans l'écriture que par 007 et ça fait du bien. Elle possède une portée affective touchante à travers un personnage qui n'est pas une mijaurée et qui s'avérera cruciale de par son ultime geste envers Largo. Terminons en beauté avec la magnifique Luciana Paluzzi sous les traits de Fiona Volpe, qui incarne la première véritable '' Bond Girl Sexy Méchante '', qui deviendra la référence pour les nombreuses antagonistes à venir. Antagoniste féminin qui fut déjà exploré dans Goldfinger avec Pussy Galore ( Honor Blackman) qui dans une virevolte consternante changera de camp après être tombé sous le charme amoureux de James Bond (d'ailleurs Fiona Volpe à mon grand plaisir y fera une allusion sous une moquerie : voir ma première citation proposée). Bien entendu la place fut en amont préchauffé dans Bons Baisers de Russie avec Rosa Klebb (Lotte Lenya) qui par contre n'avez rien de bien sexy, mais que l'on devait déjà au cinéaste Terrence Young.

CONCLUSION :

Opération Tonnerre réalisé par Terrence Young de retour dans la licence pour le 4e épisode des aventures de James Bond propose un film particulier de par le contraste proposé entre les 20 premières minutes que je trouve scabreuses, et les 1h 50 restantes qui seront de haute volée. Une quatrième mission dans laquelle on va retrouver un James Bond de nouveau au centre de l'action à travers une mise en scène magnifique au cours de nombreuses scènes d'action dont une bataille sous-marine finale mémorable avec pour conclusion une confrontation au top entre Bond et Largo.

Tonnerre de Brest que ce long-métrage est bien ! S'il n'y avait pas eu cette première partie déroutante j'aurais pu trouver ce film parfait.

• Toutes les filles barbotent dans l’eau. Vous, vous nagez comme un homme.


• Vous aussi !


• Mais moi j’ai ce qu’il faut pour ça.